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fcans doute, en amendant la loi et la manière de la mettre en pratique, atténuer ces dangers, mais on ne peut avoir l’espoir de les supprimer complètement. Néanmoins, en admettant que nous ayons été mis au courant des cas les plus défavorables au système actuel, nous déclarons qu’on n’a fait devant nous la preuve d’aucune allégation de mauvaise foi ni d’aucun abus sérieux, »

La législation anglaise contenait d’importantes dispositions sur les asiles de spéciaux pour les aliénés criminels dès 1800, c’est-à-dire à une date où la même législation en ce qui concerne les aliénés ordinaires était très confuse. Il faut noter, toutefois, que ce ne fut qu’en 1808 seulement qu’un quartier spécial lut créé pour 60 aliénés Criminels à l’hôpital de Bedlam. Ce quartier devint rapidement insu (Usant, et les aliénés dits criminels continuèrent à s’entasser dans les prisons. En 1860, le parlement anglais reprit la question et vota une loi en vertu de laquelle la création d’un asile spécial fut décidée. Cet asile, construit à Broadmoor, à douze lieues de Londres, fut ouvert en 1863. Le secrétaire d’État de l’intérieur peut faire placer dans cet asile toute personne ; 1° que la reine a le droit de faire garder et soigner ; 2° que le secrétaire d’État est autorisé à faire placer dans un asile d’aliénés ; 3<> qui, ayant subi un jugement et ayant été condamnée à la servitude pénale, serait aliénée, et ne peut subir sa peine par Buite du trouble de sa raiscn.

L’asile est administré par un conseil de trois membres nommé par le secrétaire d’État de l’intérieur. Les frais de séjour des malades sont à la charge de la paroisse où se trouve son domicile de secours, ou à défaut, à la charge du comté où il a été emprisonné. Si le malade a des revenus personnels, on en affecte tout ou partie à son entretien. L’État ne s’apporte que la dépense des aliénés dont la pension n est pas soldée autrement. Les commissioners visitent les malades enfermés dans cet asile spécial, mais s’ont pas le droit d’en ordonner la sortie.

Depuis l’époque de son ouverture jusqu’au l«r janvier issi, l’asile de Broadmoor a reçu 1.322 personnes. Il y a eu 167 sorties pour cause deguérison ; 108 malades ont été remis en liberté, et 59 ont été réintégrés en prison pour y terminer leur peine. Les principaux crimes ont été les suivants : meurtres, assassinats, homicides, 230 ; tentatives de meurtre, 122 ; incendies, 18 ; vols, 25 ; vols qualifies et par effraction, 16. Parmi les 230 malades homicides, 93 avaient tué leurs propres enfants, 23 leur femme, 8 leur fiancé, 7 lear mère, 4 leur père ; 18 étaient des aliénés qui avaient tué d’autres malades dans les asiles où ils étaient enfermés.

Au 1er janvier 1883 on comptait en Angleterre 52 asiles de comtés, il asiles de bourgs, 15 hôpitaux enregistrés, l asile pour les militaires aliénés, 1 pour les marins, 1 pour les aliénés des Indes, i pour les aliénés criminels, S workhouses de districts métropolitain», 35 maisons de santé métropolitaines, 62 maisons de santé de province. Soit en tout 182 établissements spéciaux.

Les asiles de comtés et de bourgs renfermaient 44.065 aliénés, dont 19.898 hommes et 24.157 femmes ;

Les hôpitaux enregistrés 3.028 individus, dont 1.593 hommes et 1.435 femmes ;

Les workhouses ordinaires 12.224 individus, dont 5.026 hemmeset 7.018 femmes

Les workhouses de district métropolitain 2.533 personnes : 1.206 hommes et 1.324 femmes ;

Les asiles privés 5.000 individus des deux sexes ;

Les asiles d’aliénés criminels 5131ndividus, dont 381 hommes et 132 femmes ;

La population soignée dans tes divers établissements ad hoc s’élevait pour l’Angleterre seulement à 76.765 individus, dont 34.482 hommes et 42.283 femmes.

Écosse. Le service des aliénés est règlementé en Écosse par une loi de 1857 qui a subi en 1862, 1866 et 1871 certaines modifications. Cette législation est plus moderne et mieux unifiée que celle qui fonctionne en Angleterre. L’interdiction est prononcée par les tribunaux ordinaires, et rien dans le système écossais ne se rapproche de ce que nous avons vu plus haut en ce qui coocerne les aliénés du lord chancelier. Le service est aux mains d’un bureau de commissioners

?i lunacy qui siège à Édimbourg et dont

l’autorité s’étend sur tous les aliénés interdits ou non interdits. Ce bureau tient un répertoire de tous les malades en traitement. Tous les placements définitifs d’aliénés dans les établissements spéciaux sont ordonnés par un magistrat, le schérif, qui est à la fois investi de fonctions administratives et judiciaires ; l’ordonnance du schérif est rendue sur le vu d’un double certificat médical. En cas d’extrême urgence, un seul certificat médical peut permettre le placement provisoire d’un malade ; mais, sous les trois jours, le magistrat doit être appelé a statuer dans les conditions ordinaires. Les commissioners exercent une surveillance personnelle sur tous les aliénés inscrits, qu’ils soient riches ou pauvres, interdits ou non, et placés soit dans des asi.ns publics, soit dans deb maisons particulières. Les aliénés indigents sont très nombreux dans certains villages qui deviennent de vraies colonies d’aliénés. Tous ces malades

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sont visités par les commissionners, leurs adjoints ou par les médecins de la localité qui ont accepté cette charge. Ces derniers t, ont tenus d’adresser au bureau central un rapport faisant connaître les résultats de leurs visites. Les établissements spéciaux d’Écosse sont remarquables par leur aménagement, les soins qu’on y prend des malades et la douceur avec laquelle ils sont traités, et aussi par une innovation sur la valeur de laquelle les aliénistes ne sont pas d’accord : nous voulons parler des asiles aux portes ouvertes. Le principe qui a servi de point de départ à cette Création est le respect de la liberté du malade, tant qu’il n’est pas démontré que cette liberté pourrait avoir pour la société ou pour lui de funestes conséquences. Les aliénistes écossais pensent que les restrictions généralement admises en cette matière dans les autres pays peuvent être atténuées, et comme conséquence ils sont partisans : I» de l’abolition des murs d’enceinte dans les préaux ; 2° de la suppression des portes fermées dans l’intérieur des asiles ; 3" de l’extension des congés sur parole. L’asile écossais, construit d’après la théorie nouvelle, se trouve ordinairement établi dans un domaine rural, dont les pelouses et jardins entourent de tous côtés les bâtiments ; tout est ouvert comme dans une habitation particulière. Cette disposition a pour conséquence de rendre la surveillance plus difficile et d’exiger un plus grand nombre de gardiens, mais elle donnerait, d’après ceux qui la préconisent, de meilleurs résultats que le Bystème des quartiers adoptés en Angleterre. L’inspecteur général Foville, à qui nous empruntons les principaux éléments de cet article, s’exprime ainsi au sujet des asiles à portes ouvertes : • J’ai vu des applications du systètite écossais à l’asile de Morningside, près d’Édimbourg, à celui de Melrose, à Gartnavels, à la porte de Glasgow. J’ai visité en détail, à deux reprises différentes, le grand asile de Woodelee, à Lenzie, près de Glasgow. Ce dernier établissement, l’un des plus beaux qu’on puisse voir à tous égards, a été construit il y a quelques années en vue de l’application du nouveau système, dont il est jusqu’à ce jour le spécimen le plus complet. L’administration, qui a fait les fiais de cette création dispendieuse, s’applaudit d’avoir adopté cette méthode, et, loin d’être tentée d’y renoncer, elle tient au contraire à lui donner le plus de développement possible. »

Une expérience prolongée pourra seule permettre de statuer sur la valeur de ce système.

Il n’existe pas en Écosse d’établissement spécialement affecté aux aliénés dits criminels. Toutefois un quartier spécial de la prison de Perth a été aménagé pour recevoir : 1« les aliénés qui ont été mis a la disposition de la reine parce qu’ils ont été reconnus tels au cours de l’instruction ou des débats ; 2° ceux qui ont été acquittés pour cause de folie ; 3° enfin les condamnés à de fortes peines et qui sont devenus aliénés pendant qu’ils subissaient leur sentence. Les condamnés à de faibles peines et qui deviennent aliénés, ceux qui arrivent au terme de leur peine et dont 1 état mental est encore affecté, sont en général placés dans les asiles ordinaires.

Avant de donner quelques détails statistiques sur les établissements d’aliénés et le chiffre des malades en Écosse, nous croyons devoir signaler la création, relativement récente en ce pays, d’écoles pour idiots (l’raining schools). Ces établissements sont au nombre de deux : celui de Baldorun, près de Dundee, ouvert en 1855, et qui en 1882 comptait 65 pensionnaires, et celui de Larbert, dans le comté de Stirling, fondé en 1862, et qui en 1882 comptait 133 élèves. Les asiles royaux d’Écosse étaient au nombre de 7, avec une population de 3.256 individus, dont 1,601 hommes et 1.655 femmes. Les asiles de districts étaient au nombre de 13, avec une populationde 2.933 individus, dont 1.430 hommes et 1.503 femmes. Les asiles privés étaient, à la même date, au nombre de 6, avec 43 hommes et 106 femmes, soit 149 malades. On comptait enfin 6 asiles de paroisses, dont 3 à Glasgow ; leur population s’élevait à 1.377 individus, dont 632 hommes et 745 femmes. Les poorhouses, ou maisons de pauvres, contiennent un certain nombre d’aliénés des deux sexes ; mais, contrairement à ce qui se passe dans les workhouses en Angleterre, les aliénés ne sont reçus dans les poorhouses que s’ils sont reconnus incurables et inoffensifs, et a la condition que cet établissement possède un quartier spécial. On comptait, au commencement de 1883, 716 aliénés dans les poorhouses, dont 325 hommes et 391 femmes. Enfin 1.813 malades, dont 709 hommes et 1.104 femmes, étaient soignés dans des domiciles privés. La population aliénée d’Écosse s’élevait a cette date au chiffre de 10.510 individus, dont 4.904 hommes et 5.606 femmes.

Allemagne. Le régime des aliénés en Allemagne variant avec chacun des États de l’empire et même avec chacun des établissements d’aliénés, nous n’en dirons rien et sous bornerons à donner quelques chiffres.

Au 1er décembre 1880 le nombre des aliénés soignés dans l’empire s’élevait à 66.345, dont 31.309 hommes et 32.036 femmes. De toutes les causes des maladies mentales, celle qui fait le plus de ravages est l’hérédité ; sur 66.345 aliénés, 17.636 étaient nés avec cette maladie, 32.365 avaient été traités une fois

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déjà pour aliénation mentale, 16.344 étaient traités pour la première fois. Au point de vue de l’âge, l’état des aliénés se répartit comme il suit : au-dessous de 15 ans, 7.148 ; de 15 a 50, 42.086 ; au-dessus de 50 ans, 15.999.

Autriche. Le régime des aliénés est réglé en Autriche par une ordonnance prise, en 1874, par le ministre de l’intérieur de concert avec le ministre delà justice. Les principales dispositions de cette ordonnance sont les suivantes. Nul ne peut fonder un asile sans autorisation préalable ; cet asile doit être dirigé par un médecin ayant pris ses grades en Autriche et donné des preuves de sa compétence sur la matière. Si ce médecin vient à être remplacé, son successeur devra obtenir une nouvelle autorisation. L’admission de3 malades a lieu sur la production d’un certificat de médecin. Vingt-quatre heures après l’admission, le médecin doit informer le tribunal de première instance du ressort et solliciter la confirmation du maintien de l’aliéné dans l’asile. Les aliénés non guéris peuvent être réclamés par leurs parents ; ils leur sont rendus s’il est établi qu’ils ne Sont pas dangereux. Si l’aliéné a été interné d’office et par ordre de l’autorité publique, le magistrat qui a ordonné l’internement peut seul, après avis des médecins, ordonner la mise en liberté. Les établissements d’aliénés sont placés sous la surveillance de la police sanitaire. Les fonctionnaires de cette administration doivent visiter, tous les trois mois au moins, les asiles d’aliénés. Le compte rendu de ces visites est adressé aux autorités de cercle qui les transmettent aux autorités centrales de la province. Les médecins-directeurs peuvent être révoqués s’il résulte des rapports en question que leur gestion est défectueuse ; l’établissement peut même être fermé par mesure administrative. Les asiles publics sont régis par des statuts qui leur sont propres et qui doivent être approuvés par le ministre de l’intérieur.

On comptait en 1884, en Autriche, 21 établissements publics et 5 asiles particuliers, renfermant ensemble 8.870 aliénés. Le plus grand établissement de ce genre est celui de Prague, qui possède 1.322 lits et dans lequel on traite annuellement 1.850 malades. L’asile de Vienne ne contient que 553 lits. Viennent ensuite ceux de Kulparkow, près de Lemberg (545 lits), d’Ybbs (432 lits), de Cosmanos (395 lits), de Brun (372 lits), de Mederhardt (370 lits), de Feldhof, en Styrie (350 lits), de Klosterneuburg (270 lits), Il existe en outre quelques maisons en Dalmatie,

Un trèsgrand nombre d’aliénés sont soignés à domicile. Le total des malades s’élevait en 1884 à 25.038, dont 13.699 du sexe masculin et 13.369 du sexe féminin. Les cas les plus nombreux d’aliénation mentale se présentent de vingt-cinq à quarante ans : il y en a 11.068. On compte enfin 650 enfants de moins de dix ans et 1.100 de dix à quinze ans.

Italie. Le 15 mars 1881, M. Depretis, ministre de l’intérieur du royaume d’Italie, a présenté à la Chambre des députés un projet de loi très complet sur les aliénés. Avant l’unification de l’Italie, le régime des aliénés dans les divers États de la Péninsule était soumis à des règlements absolument défectueux. Seule, la Toscane possédait, sous le nom de motu proprio de 1838, une loi spéciale. Le gouvernement italien, énergiquement sollicité par la Société des médecins aliénistes d’Italie, songea dès 1876 a règlementer la question. M. Nicotera, ministre de l’intérieur eu 1878, déposa, au mois de novembre de la même année, un projet qui fut très bien accueilli par cette société. Mais le cabinet dont il faisait partie ayant été renversé, il faut nous reporter au 15 mars IS81 pour voir reparaître la question devant les Chambres italiennes.

Le projet de M. Depretis dispose que toute province devra posséder un manicome (asile d’aliénés) ou s’entendre avec une province en possédant un, pour y opérer la placement de ses aliénés. Les corporations et tout citoyen jouissant de ses droits civils et politiques peut fonder un asile, sous la condition d’obtenir l’autorisation du ministre de l’intérieur. Cet asile doit être dirigé par un médecin qui devra avoir exercé en cette qualité au moins deux ans dans un asile public. Le placement a lieu sur la demande des parents ou tuteurs du malade. Il peut être effectué d’office sur la requête de toute autorité publique. La demande doit être appuyée par un certificat médical ne remontant pas au delà de huit jours. L’internement provisoire ne devient définitif que par arrêt du tribunal rendu en la chambre du conseil. S’il s’agit d’un étranger, la demande doit être appuyée par une attestation du conseil. Après une année d’internement, l’interdiction sera prononcée sur la réquisition du procureur du roi. La mise en liberté définitive du malade n’a lieu que par décision du tribunal et à la requête du directeur. La mise en liberté provisoire à titre d’essai ne peut être ordonnée que par le tribunal. En cas de rechute, la simple constatation faite par le médecin directeur entraînera la réintégration. Sur la demande des familles, un aliéné reconnu en voie de guérison et non dangereux pourra leur être remis, mais toujours par décision judiciaire. La surveillance des manicomes est remise aux préfets, qui l’exercent par l’intermédiaire des agents placés sous leurs ordres.

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Le projet Depretis s’occupe des asiles d’aliénés criminels. Il dispose que des manicomes sont institués aux frais de l’État en vue d’y enfermer : 1° les délinquants devenus fous depuis leur condamnation ; ï« les inculpés de faits graves et à l’égard desquels il aura été rendu une ordonnance de non-lieu ou un acquittement pour cause de folie ; 3° les prévenus ou détenus non encore définitivement condamnés et qui deviennent fous au cours de leur détention. Ces derniers ne seront internés dans les manicomes criminels que si le tribunal qui connaît de leur affaire juge qu’il y aurait péril à les enfermer dans les manicomes ordinaires.

À la simple lecture de ce très court résumé, on a dû constater que si le pouvoir judiciaire peut seul en Italie ordonner l’internement, même provisoire, d’un aliéné, il s’en faut que la législation, prise dans son ensemble, soit ans.si libérale que celles qui sont en vigueur sur la matière soit en Angleterre, soit en France, notamment en ce qui touche la mise en liberté provisoire et la réintégration.

Les éléments de la statistique qui suit sont empruntés à un document officiel italien publié par les soins du ministère de l’agriculture, du commerce et de l’industrie : l’auteur de ce travail, M. le professeur André Verga, après avoir constaté qu’il lui a été impossible d’obtenir le recensement exact de tous les individus atteints de folie, déclare que ses chiffres comprennent néanmoins tous les aliénés dangereux.

Il existe, en Italie, 62 asiles. Les uns sont exclusivement destinés aux aliénés : ce sont les asiles proprement dits ou les manicomes ; les uutres reçoivent des fous et d’autres malades : ce sont les hospices. Quelques asiles sont ouverts aux deux sexes, d’autres exclusivement réservés aux hommes ou aux femmes.

Au 1« janvier 1881, on comptait dans les asiles d’aliénés du Piémont 8.062 individus : 1.093 hommes, 963 femmes ; dans les hôpitaux de la Liguria, 734 individus : 311 hommes, 423 femmes ; en Lombardie, 3.099 individus : 1.582 hommes, 1.517 femmes ; dans la Vénétie, 2.182 individus : 890 hommes, 1.592 femmes ; dans l’Emilie, 2.581 individus : 1.322 hommes, 1.259 femmes ; dans l’Orabrie, 319 individus : 176 hommes, 143 femmes ; dans les Marches, 991 individus : 548 hommes, 443 femmes ; en Toscane, 2.116 individus : 1.008 hommes, 1.108 femmes. Dans la province de Rome, 779 individus : 449 hommes, 330 femmes ; dans la Napolitaine, l.585 individus : 1.013 hommes, 572 femmes ; en Sicile, 900 individus : 531 hommes, 369 femmes ; en Sardaigne, 123 individus : 77 hommes, 46 femmes. Soit, pour tout le royaume : 17.471 aliénés, dont 9.000 hommes et 8.471 femmes.

La population de l’Italie étant, d’après le recensement de 1880, de 28.524.399 habitants, le chiffre des aliénés s’élève à 61.25 pour 100.000 habitants ou 1 aliéné par 1.634 habitauts. Ce chiffre est très faible, mais il n’est pas rigoureusement exact, M. le professeur André Verga ayant pris soin de nous apprendre que son rapport ne contenait que le relevé des aliénés agités ou dangereux.

Le chiffre des malades qui, mis en liberté, ont dû être réintégrés, s’est élevé à 21.45 pour 100. L’âge qui fournit le plus de victimes à la folie est, pour les hommes, celui de 20 à 40 ans. Pour les femmes, la période la plus dangereuse est celle de 40 à 60 ans. Les célibataires fournissent un contingent considérable ; ils sont en nombre presque double des fous mariés (10.075 contre 5.623).

Belgique. La loi qui régit le service des aliénés en Belgique ayant été succinctement résumée au tome XVI du Grand Dictionnaire, nous n’en dirons rien ; mais cette étude serait incomplète si nous ne disions quelques mots de la colonie de Gheel, située à peu de distance d’Anvers. Gheel est une commune d’assez grande importance et dont la population comprend un certain nombre d’aliénés (1.663 au 1er janvier 1883) qui vivent chez l’habitant et sont soignés et surveillés par ces derniers. Avant 1850, cette colonie était un établissement exclusivement communal et indépendant de toute autorité autre que celle du bourgmestre local. La loi de 1850, à laquelle celle de 1873 n’a rien changé sur ce point, plaça cette colonie sous la surveillance du pouvoir provincial. Un arrêté royal, en date du 23 mai 1882, a minutieusement réglé les conditions de fonctionnement de cette colonie et décidé notamment que les aliénés dangereux ne pourraient y être envoyés. La colonie de Gheel est unique en son genre à l’heure actuelle. Les aliénés, au nombre de plus de 1.600, y vivent au milieu d’une population de 10.000 habitants qui paraissent ne pas s’inquiéter de ce voisinage. Chaque aliéné est logé chez un nourricier qui prend soin de lui et le nourrit moyennant une rétribution de Ofr. 60 par jour. Lorsqu’on visite Gheel, non seulement dans le centre de la commune, mais dans les hameaux qui en dépendent, on est étonné de l’ordre qui y règne. Si l’on entre dans les habitations, ou y trouve généralement plusieurs aliénés occupés soit aux travaux du ménage, soit a quelque besogne facile qu’ils accomplissent de compte à demi avec le nourricier, sa femme ou ses enfants. Chez la plupart des habitants, on constate une grande bienveillance