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le 25 juillet, le général de Sonnaz, chargé de la reprendre, l’attaqua la nuit suivante, mais après une lutte sanglante et acharnée, qui dura jusqu’au lendemain matin, il dut se retirer à Certongo et se concentrer sur Goïto. Nommé ensuite gouverneur de la division militaire d’Alexandrie, puis de celle de Turin, il fut élevé au grade de général d’année (maréchal), reçut le collier de l’Annoneiade, commanda le grand département militaire de Turin et mourut gouverneur des Invalides.

SONNÉ, ÉE (so-né) part, passé du v. Sonner. Annoncé par le son de la cloche : II est trois heures sonnées. Il est midi sonné. Le départ est sonné. L’heure est sonnée.

— Qu’on agite pour produire des sons : La cloche est beaucoup moins sonnée aujourd’hui qu’autrefois sur les navires de l’État. (J. Lecomte.)

— Fig. Arrivé, en parlant du temps, du moment -.Quand mon heure sera sonnée, je mourrai sans regret. Il Révolu, complet : Jl a quarante ans sonnés.

SONISENBERG, ville de l’Allemagne du Nord, dans le duché de Saxe-Meiningenj ch.-l. du bailliage de son nom, à 54 kilom. S.-K. de Meiningen ; 3, 600 hab. Fabrication de porcelaine, de pipes en terre, de boissellerie, d’ardoises, de clouterie, de menue quincaillerie, de jouets d’enfants. Exportation de tous ces articles.

SONNENBERG (François-Antoine-Joseph-Ignace-Marie, baron de), poëte allemand, né à Munster (Westphalie) en 1779, mort en J805. Dès l’enfance, son imagination vive, mais déréglée, prit le pas sur ses autres facultés morales, et, comme son éducation ne détruisit point cette disproportion, elle ne fit ques’accroître, lorsqu’il se trouva, à une époque de troubles et d agitations, sans carrière bien déterminée, et elie finit par causer sa perte. Étant encore au gymnase de Munster, il avait ébauché, d’après la Messiade de Klopstock, le plan d’un poëme épique sur la Fin du monde (Vienne, 1801, t. 1er), où dominent tous les défauts d’une conception gigantesque et sans règles, un style emphatique et une imagination complètement déréglée, sauvage. Il consentit cependant, plutôt pour satisfaire aux désirs de ses proches que par vocation, à étudier le droit, mais il y renonça bientôt et vécut dans la retraite aux environs d’iéna. Il travailla alors à une seconde épopée inùtulée : Douatoa, toujours sur la fin du monde, dont l’idée occupait à tel point son imagination, qu’il y sacrifiait le sommeil, le manger, la société et tous les plaisirs de la vie. Dans un moment d’exaltation, il se suicida en se jetant par une fenêtre. Sonnenberg eût pu être un grand poBte, si une habile éducation avait corrigé ses défauts naturels. Il s’est montré véritablement l’émule de Klopstock dans sa Donaloa, où, malgré les imperfections du plan et de l’exécution, éclatent fréquemment la profondeur, l’abondance, la vigueur et la noblesse des pensées. Ce poSme a été publié avec une biographie de l’auteur (Rudolstudt, 1806, 2 vol.) par Gruber, qui a également édité ses autres Poésies (Rudolstadt, 1808).

SONNENBURG, ville de Prusse, province de Brandebourg, régence et à 28 kilom. N.-E. de Krancfort-sur-1’Oder, au confluent de la Wartha et du Lôniiz ; 3, 700 hab. Fabrication de draps, ancien château de l’ordre de Malte, converti en pénitencier.

SONNENFELS (Joseph, baron de), littérateur allemand, né à Nikolsburg (Moravie), mort en 1817. Après avoir été quelque temps au service militaire, il fit son droit à Vienne, s’y appliqua en même temps à l’étude de l’hébreu et fut adjoint à son père, qui était interprète de cette langue près la régence de la basse Autriche. Il se lit connaître dès cette époque par plusieurs publications, et, après diverses vicissitudes, devint, en 1763, professeur de sciences politiques à l’université de Vienne. —Bien que sa hardiesse lui eût fait dans la suite un grand nombre d’ennemis, il ne se laissa jamais détourner du but constant de ses efforts, le perfectionnement moral et littéraire de ses concitoyens. Avant que Becoaria fût encore connu, il avait, par son livre Sur l’abolition de la torture (Zurich, 1775), amené la suppression de la question da, ns les Etals autrichiens. En dépit des attaques de ses ennemis, qui l’accusaient de blasphème et du crime de haute trahison, il fut comblé d’honneurs par Marie-Thérèse et

fiar François II, qui, en dernier lieu (1797), ui accorda le titre de baron. Ses écrits, dont le recueil a paru en 10 volumes (Vienne, 1783-1787), ne se distinguent pas par la vigueur de l’invention, mais bien par leur libéralisme et par la noblesse des sentiments. Il a surtout contribué à introduire dans le droit pénal, dans la policeet dans l’organisation financière des améliorations qui lui acquirent une grande réputation. Il eut aussi la plus heureuse influence sur le perfectionnement du goût dramatique, et, dans tous ses ouvrages, il sait allier la concision et l’éclat à la simplicité et à la facilité, l’esprit et la satire à une morale tantôt touchante, tantôt terrible.

SONNER v. n. ou intr. (so-né — latin sonore, mot qui représente exactement, selon liiehhoff, la racine sanscrite svan, retentir, résonner, d’où aussi, d’après lui, le grec ai SONN

nein, lithuanien zwanu, russe zweniu, cymrique syniu, même sens, le sanscrit svanas, son, grec ainos, latin sonna, gothique sangws, allemand sang, anglais song, lithuanien zmanas, russe zwon, même sens, le sanscrit svanitan, bruit, latin sonitus, et le sanscrit svanacas, bruyant, latin sonax). Rendre un son : Les cloches sonnent. Cet écu est faux ; faitesle sonner, vous verres qu’il ne vaut rien. J’entends sonner la trompette. (Acad.) Ils ont des colliers d’or sous la gorge pendants, Et des mors d’or massif qui sonnent sous les dents.

L* Fontaine.

— Tirer des sons : Sonner de la trompette, de la trompe, du cor. Ces piqueurs sonnent bien.

Dieu préserve, en passant, toute sage personne D’un porteur de huchet qui mal a propos sonne.

Molière.

— Mettre une cloche en branle, en tirer des sons : Sonner pour un mort. On a sonné toute la nuit. Il Agiter la sonnette, pour appeler-ou se faire ouvrir : Sonner à ta porte de quelqu’un. J’entends sonner chez vous. J’entends SONNBR. (Acad.)

— Être indiqué, annoncé par une sonnerie : Les vêpres sonnent à la paroisse. Le sermon sonne à la cathédrale. Voilà midi qui sonne. (Acad.) Deux heures sonnaient à l’horloge voisine quand ils songèrent à la retraite. (J. Sandeau.)

Le jour luit, la charge sonne. Le combat va commencer.

J.-B. Rousseau.

— Arriver, en parlant d’un moment, d’une époque : Votre heure sonnera, nul n’est immortel. Je viens attendre, dans les fers, l’heure d’une mort affreuse qui a déjà sonné pour tant de victimes innocentes. (De Jouy.)

Le moment va sonner de risquer le grand coup.

V. Huoo.

— Prendre un certain son, un son d’une certaine qualité : Ce mot sonne bien à l’oreille. Ces vers sonnent bien. Il Produire une certaine impression : Aux oreilles des rois les plus philosophes, le moi de liberté ne sonne pas beaucoupmieux que le mot de révolte. (D. Sterne.) Le mot droit sonne mal à l’oreille des puissants et des privilégiés. (F. Huet.) Le mot de sang royal sonne très-haut À bien des

OREILLES. (Vitet.)

Sonner creux, Être vide, ne rien contenir : Frappe sur sapoitrine, elle sonnecrbdx. (Lamenu.)

Les estomacs à jeun dès longtemps sonnaient creux.

J. AUTKAN.

Faire sonner, Faire retentir, faire produire un son à : L’homme qui appelle l’attention sur ses traits d’esprit est un pauvre qui fait sonner soit argent. (Latena.)

Il marchait d’un pas relevé Et faisait sonner sa sonnette.

La Fontaine.

A —Fig. Vanter, exagérer, faire valoir : Jl fait sonner bien iiAUT les services qu’il a rendus. (D’Ablanc.) Itivarol descendit bravement à l’hôtel d’Espagne, en faisant sonner son titre plus haut que ses écus.m (Ars. Houssaye.)

Vous faites sonner haut de minces découvertes.

AtiDIUEUX.

On veut de votre bien revêtir un nigaud Pour dix mots de latin qu’il nous fait sonner haut.

Molière. … Est-ce un sujet pourquoi Vous fassiez sonner vos mérites ?

La Fontaine.

Entendre sonner les cloches et ne savoir de quelle paroisse, Avoir le souvenir d’une chose sans pouvoir en préciser quelque circonstance. Il Cette locution est usitée en Alsace et en Lorraine.

— Gramm. Se faire entendre, en parlant d’une lettre : R ne sonne pas à l’infinitif des verbes de la première conjugaison. On fait rarement sonner s à la fin des mots..

— Mus. Sonner sur la basse, Entrer dans l’accord, n’être qu’une simple note de passade.

— v. a. ou tr. Tirer du son de : Sonner les cloches. Autrefois, à chaque changement de quart, on sonnait ta cloche pour avertir et faire monter sur le pont la fraclionde l’équipage qui reposait jusque-là et allait entrer en surveillance à la place de ceux qui devaient, à leur tour, aller prendre du sommeil. (J. Lecomte.) Beaucoup d’instituteurs sonnent les cloches et chantent au lutrin. (L. Jourdan.)

— Appeler ou avenir par le son de la sonnette : Sonner ses gens, ses domestiques. Elle sonna sa cuisinière, sa femme de chambre. Où avez-vous donc les oreilles ? Madame vous a sonné deux fois. (Th. Leelercq.)

— Annoncer par une sonnerie : Sonner la messe. Sonnur les vêpres. Sonner le sermon. Sonner les heures. Le bourgeois fait sonner son mariage, te baptême de ses enfants ; il fonde même des obils pour faire sonner après sa mort à perpétuité. (B. de St-P.) Il Annoncer par des sons quelconques : Les clairons sonnèrent la charge. Les piqueurs sonnaient la retraite. Le postillon fil claquer son fouet et sonna une fanfare. (J. Sandeau.)

Comme il sonna la charge, il sonne la victoire.

La Fontaime.

SONN

Le sinistre tambour sonna l’heure dernière.

V. Huoo. C’est l’airain du canon qui sonna vos baptêmes. Barthélémy.

— Fig. Annoncer : La presse est le clairon vivant qui sonne la diane des peuples. (V. Hugo.)

Si l’on parle de nous, rendez-nous témoignage Que tous deux, sans pâlir, nous avons écouté Cette heure qui, pour nous, sonnait i’éternfté.

V. Huoo.

Il Offrir un sens : La vertu sonne je ne sais quoi de plus grand et de plus actif. (Montaigne.) || Sens tout latin, qui n’est pas usité.

Sonner le fêlé, Rendre le son particulier que produit un vase fêlé.

Sonner le creux, Résonner comme une chose vide : // faudra écrire au marchand de vin, nos tonneaux sonnent le creux. Notre choix s’arrêta sur une jolie chambre, dont les murs, frappés avec la main, ne sonnaient pas le creux. (Th. Gaut.)

Ne sonner mot, Ne dire mot, se taire : Tel est mon projet, biais je vous prie de N’en sonner mot. J’eus beau le presser, lui faire des reproches, il ne sonna mot. (Acad.)

— Prov. On ne saurait sonner les cloches et aller à la procession ou dire la messe, On ne peut pas faire à la fois des choses différentes qui s’excluent l’une l’autre.

— Mus. Sonner un son, un accord, Le faire entendre : Le jeu du nasard sonne la quinte au-dessus du prestant,

— Véner. Annoncer par les sons du cor : Sonner le débucher. Sonner le laisser-courre. Si le cerf sort du bois et prend la plaine, on sonne le débucher. (E. Chapus.) Pour réparer une erreur de change, il est à propos d’arrêter les chiens et de sonner un hourvari. (E. Chapus.) Il Sonner un ou deux mots, Faire entendre sur le cor un ou deux sons prolongés.

— Art miVit. Annoncer par les sons de la trompette : Sonner la charge. Sonner la retraite. Sonner le boute-selle, il Sonner à cheval, Sonner pour faire monter à cheval.

— Mar. Sonner le quart, Avertir, par le son de la cloche, de venir faire le quart.

— Gramm. Employé comme verbe neutre et en parlant des heures, sonner prend l’auxiliaire avoir ou l’auxiliaire être, selon qu’on veut parler du moment précis ou l’horloge a sonné ou des moments qui ont suivi : Midi a sonné comme vous sorties de la maison ; Midi est sonné depuis plus de dix minutes.

SONNERAT (Pierre), naturaliste et voyageur français, né à Lyon en 1745, mort à Paris en 1814. Appelé à l’île de France par Poivre, son parent, il explora, à partir de 1768. la plupart des Iles des mers de l’Inde et de là Chine, où il recueillit de précieuses collections, dont il enrichit le cabinet d’histoire naturelle de Paris, et ne revint en France qu’en 1805. Il introduisit l’arbre à pain, le cacao et le mangoustan aux îles de France et de Bourbon. Le nom de Sonnerat a été donné, par Linné, à un arbre qu’il a découvert sur la côte de Malabar, On a de lui : Voyage à la Nouvelle-Guinée (1776, in-4o, 120 lig.) ; Voyage aux Indes orientales et à la Chine, de 1774 à 1781 (1782, 2 vol. in-4", et 1806, 4 vol. in-8o, avec atlas). L’auteur est d’une grande exactitude pour tout ce qui concerne l’histoire naturelle ; il n’en est pas de même dans la partie géographique et dans la description des mœurs.

SONNERATIE s. f. (so-ne-ra-U — de Sonnerai, voyugeur et naturaliste). Bot. Genre de petits arbres, de la famille des myrtacées, tribu des myrtées, comprenant plusieurs espèces, qui croissent dans l’Inde et les îles voisines.

— Encycl. Les soaneraties sont des arbres à rameaux tétragones ; les fleurs, grandes, terminales, presque solitaires sur les petits rameaux, présentent un calice urcéolé, coriace, persistant, à six divisions ; une corolle k six pétales étalés, des étumines nombreuses ; le fruit est volumineux, globuleux, charnu, à nombreuses loges polyspermes. L’espèce type, vulgairement nommée bagatbal, pagapute, blatti, est un arbre d’environ 5 mètres, à feuilles opposées et k grandes fleurs rouges. Il habite le Malabar, les Moluques, la Nouvelle-Guinée, et croit dans les lieux humides. Les naturels mangent ses fruits cuits avec d’autres mets. Le suc acide exprimé de ces fruits et mélangé avec du miel est employé contre les aphthes et les fièvres. Les feuilles pilées sont appliquées en cataplasme sur la tête pour dusiper les vertiges et combattre les insomnies causées par la fièvre. SONNERIE s. f. (so-ne-rt — rad. sonner). Son de plusieurs cloches ensemble:Il y a une bonne sonnerie dans telle église. La grosse sonnerie. La petite sonnerie, (Acad.) Il n’y a point, disait te célèbre Lnlli, d’instrument de musique qui vaille une agréable sonnerie; aussi venait-il de Versailles à Paris pour entendre la sonnerie de Saint-Germain-desPiés. (***.) Une pesante sonnerie proclame dans lu région des nuées les triomphes du Dieu des batailles. (Chateaub.) Il Se dit aussi de la totalité des cloches d’une église : La sonnerie de cette église a coûté cher.

— Assemblage de toutes les pièces qui servent a faire sonner une pendule, une montre :

SONN

8t>

I 11 y a quelque chose à refaire à la sonnerie de cette montre. Pendule, montre à sonnerie. I^es mécanismes de sonnerie varient beaucoup dans leur détail, (Lenorm.)

— Art milit. Air que sonnent les clairons d’un régiment, et qui varie suivant les exercices, les mouvements qu’il annonce : Les principales sonneries sont le réveil, la gêné' raie, le boute-selle, l’appel, la retraite, la charge, etc. (Acad.) Aussitôt le clairon de garde répète le signal, composé de trois sonneries prooresstues. (Baron de Baz ; uicouvt.)

— Mar. Air de clairon équivalant à une batterie de tambour, et qui annonce les heures ou les diverses sortes de service.

— Véner. Air sonné par un ou plusieurs cors de chasse.


SONNET s. m. (so-nè — de l’ancien français sonet, diminutif de son, qui signifiait dans l’ancienne langue bruit d’une petite cloche, chansonnette, petit chant). Morceau de poésie, composé de quatorze vers distribués en deux quatrains et en deux tercets, quatrains qui sont sur deux rimes seulement : Sonnet italien. Sonnet français. Sonnet à rimes croisées. Sonnet régulier, irrégulier. Faire un sonnet. Composer un sonnet à la louange d’un tel, pour une telle. Les sonnets de Pétrarque. La chute d’un sonnet. (Acad.) J’ai tellement changé mon sonnet, que vous le méconnaîtrez. (Racine.) Une idée dans un sonnet, c’est une goutte d’essence dans une larme de cristal. (Ste-Beuve.)

… Tel, d’un sonnet ayant donné les rimes,
Croit tenir un haut rang chez les esprits sublimes.
Poisson.

Sonnet. C’est un sonnet. L’espoir… C’est une dame
Qui de quelque espérance avait flatté ma flamme.
Molière.

Ce beau sonnet est si parfait
Que ne crois que vous l’ayez fait ;
Mais je crois, Pauline, au contraire,
Que vous vous l’êtes laissé faire.
Morin.

— Encycl. Le sonnet nous est venu d’Italie. On s’accorde assez généralement à le faire naître en Sicile au XIIIe siècle. Quelques-uns, cependant, en regardent Pétrarque comme l’inventeur, et d’autres le font remonter à nos troubadours. Mais, chez ces derniers, le mot sône ne signifiait pas sonnet ; il s’appliquait à diverses poésies, avec le sens de chant. Les poëtes de la pléiade le cultivèrent avec amour. Il resta en honneur durant le XVIIe siècle. Ogier de Gombaud, Maynard, Malleville, Voiture, etc., y excellèrent à cette époque. Le XVIIIe siècle négligea le sonnet, comme un grand nombre d’autres formes poétiques. Quand l’école lyrique contemporaine nous rendit les rhythmes, les coupes et les formes de l’ancienne poésie française, et lui restitua ainsi les éléments d’éclat et de richesse qu’on lui avait enlevés, le sonnet devint de nouveau l’un des objets de l’émulation des artistes savants en versification. Il est resté depuis lors parmi les genres difficiles et charmants sur lesquels aiment à s’exercer nos poëtes.

Le sonnet se compose de quatorze vers, formant quatre stances, dont les deux premières sont des quatrains, et les deux dernières des tercets. Les deux quatrains ne comportent que deux rimes, c’est-à-dire que les deux rimes masculines et les deux rimes féminines du premier quatrain doivent être reproduites dans le second ; les deux tercets sont construits sur trois rimes, placées dans un ordre déterminé.

Boileau a donné en vers, d’une façon assez heureuse, les règles générales de ce petit poëme :

.......... Un jour ce dieu bizarre (Apollon),
Voulant pousser à bout tous les rimeurs françois,
Inventa du sonnet les rigoureuses lois ;
Voulut qu’en deux quatrains de mesure pareille
La rime avec deux sons frappât huit fois l’oreille,
Et qu’ensuite six vers, artistement rangés,
Fussent en deux tercets par le sens partagés.
Surtout de ce poème il bannit la licence.
Lui-même en mesura le nombre et la cadence,
Défendit qu’un vers faible y pût jamais entrer,
Ni qu’un mot déjà mis osât s’y remontrer.
Du reste il l’enrichit d’une beauté suprême ;
Un sonnet sans défaut vaut seul un long poème.

Dans le sonnet régulier, l’intérieur des quatrains doit contenir deux rimes plates masculines, ou féminines, disposées, dans le second, dans le même ordre que dans le premier. Le premier tercet se compose de deux rimes plates, dont le genre est commandé par la rime extérieure des quatrains, et d’un troisième vers rimant avec le second vers du deuxième tercet ; celui-ci se compose donc de deux rimes croisées, enfermant le vers destiné à rimer avec le tercet précédent. Cette disposition a pour but d’obtenir que le dernier vers du sonnet soit à rime féminine si le premier est à rime masculine, et vice versa, ce qui est encore une des règles du sonnet orthodoxe. Mais il est juste de dire que peu de poètes se sont astreints à cette extrême régularité. Voici quelques exemples de sonnets où les règles sont rigoureusement observées :

Nourri dès le berceau près de la jeune Orante,
Et non moins par le cœur que par le sang lié,
À ses jeux innocents enfant associé,
Je goûtois les douceurs d’une amitié charmante