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posées en vue d’empêcher !a salivation dans •les traitements où les préparations mercurielles sont d’absolue nécessité. L’introduction des înercuriaux dans l’économie amène une perturbation générale, dont un lies symptômes presque constant est la salivation, accident toujours redouté du malade et du médecin, et qui souvent force d’interrompre le traitement. Dès 1855, le docteur Gustin eut l’idée d’administrer simultanément la préparation mercurielle et les chlorates alcalins dont les propriétés antisialiques venaient d’être constatées. Alors, on administrait au malade le sel mercuriel et ensuite le chlorate alcalin antisialique. Aujourd’hui, le sel alcalin et le sel mercuriel sont réunis sous forme de pastilles ; et le sel mercuriel produit tout son effet sans que la salivation ait lieu. Douze années d’expériences et d’observations ont donné la formule définitive des pastilles antisyphilitiques : protoiodure de mercure, chlorate et iodate de potasse. Un autre résultat de la plus haute importance a été ainsi mis en évidence : par le contact prolongé et immédiat entre la pastille qui fond lentement dans la bouche et la muqueuse buccale, le |>nlais et les amygdales, l’état de ces organes, souvent ulcérés ou tuméfiés, subit une rapide et heureuse modification, qu’on n’obtient guère qu’au bout de dix à douze jours par 1 ancienne méthode de traitement.

Les pastilles (bonbons pectoraux) d’eucalyptus globutus, de M. P. Ramel, l’importateur en Europe de cette plante australienne (gommier bleu de Tasmanie), sont l’une des nombreuses préparations des principes actifs de cet utile végétal. L’action tonique et fortifiante que ces pastilles exercent sur les organes vocaux et respiratoires les a rapidement fait considérer comme l’indispensable vade mecum du chanteur et du comédien, de l’avocat et du professeur, du conférencier et, en général, de toutes les personnes qui, par leur profession, sont appelées à parler en public.

Il existe en pharmacie une foule d’autres pastilles ; elles n’ont qu’une valeur très-secondaire et sont, pour la plupart, des préparations affaiblies de remèdes que l’on emploie plus efficacement sous d’autres formes ; telles sont les pastilles d’ipécacuana, etc.

Le mode général de préparation est celui-ci : on réduit les substances qui doivent en faire partie en poudre très-fine ; on incorpore d’abord dalis un mortier une partie du mélange au mucilage, puis on porte cette masse molle sur une table de marbre, et l’on y incorpore par malaxation le reste de la poudre sucrée ; on étend cette masse en couche uniforme au moyen d’un rouleau, après avoir saupoudré la table avec un peu d’amidon. Afin d’avoir des pastilles de même épaisseur, on se sert de carrés ou de règles en bois ou en fer, de l’épaisseur qu’on veut donner aux pastilles, sur lesquelles les deux extrémité du rouleau s’appuient lorsque la pâte est convenablement étendue ; à l’aida d’un emporte-pièce, on la découpe en pastilles. •

Les pastilles ainsi préparées sont étalées sur des feuilles de papier et séchées à l’étuve. Le mucilage que l’on emploie peut être préparé soit avec la gomme arabique, soit avec la gomme adrugante. La gomme arabique donne lies pastilles qui sont légèrement translucides. Les pastilles qui contiennent beaucoup de mucilage deviennent très-dures avec le temps. *

Le meilleur procédé pour aromatiser extemporanément les pastilles uprès leur dessiccation consiste a faire dissoudre une huile volatile dans de l’éther, à verser cette dissolution sur les pastilles contenues dans un flacon à large ouverture et à remuer en tous sens ; on verse les pastilles sur un tamis et on met un instant à l’étuve pour évaporer l’éther.

11 existe un grand nombre de formules de pastilles ; voici les principales :

Pastilles de baume de Tolu. On dissout : baume de tolu sec, 32 grammes, dans alcool à 86" centésimaux, 32gramines ; on ajoute eau distillée, 64 grammes. On chauffe au bainmario pour fondre la résine précipitée ; on liltre la liqueur refroidie ; on en fan un mucilage avec gomme adragante, 5gf,20, préalablement humectée ; on y incorpore alors sucre, 500 grammes, et l’on fait despastilles de ogi-,80.

Pastilles de bicarbonate de soude ou de Yiehy, alcalines digestiues. On fait une pâte avec : bicarbonate de soude, 50 grammes ; sucre, 1,950 grammes ; mucilage adragunt, 180 grammes ; on divise cette pâte en pastilles de 1 gramme, qui contiennent chacune 0,025 de ce sel alcalin. Ces pastilles sont employées pour faciliter la digestion.

Pastilles de charbon. Ces pastilles, de ogr,80, fuites avec 1 partie de charbon végétal et 3 de sucre réduites en pâte avec une quantité suffisante de mucilage, sont très-employées contre la fétidité de l’haleine.

Pastilles d’ipécacuana. V. ipécacuana.

Pastilles de kermès. Elles se font avec partie de kermès, 66 de sucre, 4 de gomme arabique et autant d’eau de fleur d’oranger ; chacune pèse ogr,60 et contient 0,003 do kermès.

Pastilles de magnésie. Magnésie pure,

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9& gr. ; sucre, 416 gr. ; mucilage de gomme adragant, q. s. Une tablette de OS^SO contient 0,15 de magnésie.

Pastilles de soufre. Pastilles do OB^ÎIO, faites avec : soufre lavé, 64 grammes ; sucre, 500 grammes ; mucilage et eau, quantité suffisante pour une pâte. Chacune contient ogr,18 de soufre. Elles sont employées comme antipsorique et pectoral, au nombre de 5 a 10.

Pastilles du sérail. EUes se distinguent par leur mode d’emploi et leur configuration. Ce sont de petits cônes noirs ou gris que l’on allume par la pointe et qu’on laisse se consumer. Dans la combustion, elles répandent une forte odeur qui rappelle l’encens. Elles sont composées de poudre de charbon de bois, de salpêtre, de benjoin et de quelques autres résines, malaxés ensemble et constitués à l’état de pain au moyen de gomme ou d’un mucilage quelconque. C’est à tort qu’on les dit désinfectantes ; leur odeur ne faitque masquer momentanément les autres odeurs, qui ne sont nullement détruites et qui reparaissent aussitôt que le parfum des pastilles s’est dissipé.

PASTILLEUR s. m. (pa-sti-fleur ; Il mil. — nul. pastille). Pharm. Instrument dont les pharmaciens se servent pour fabriquer des pastilles.

— Techn. Ouvrier qui fait des ouvrages de confiserie appelés pastillages.

PASTILLIER s. m. (pa-sti-l !é ; Il mil.du lat. pastiltus, petit gâteau). Hist. relig. Nom donné aux ministres luthériens de Souabé, vers le milieu du xvie siècle, parce qu’ils soutenaient que le corps de Jésus-Cbrist était dans le pain de l’Eucharistie comme la viande dans un pâté.

PASTINACA s. m. (pas-ti-na-ka — du lat. paslus, nourriture). Bot. Nom scientifique du genre panais.

PASTISSON s. m. (pa-sti-son — de pâté, qui s’est écrit pasté ; allusion à la forme du fruit). Bot. Nom vulgaire d’une espèce ou variété de courge. 0 On l’appelle aussi pâtisson.

PASTO ou SAN-JUAJV-DEL-PASTO, ville de

l’Amérique du Sud, république de la Nouvelle-Grenade, ch.-l. de la province de son nom, à 730 kiloin. S.-S.-O. de Bogota, 235 kiloin. N.-E. de Quito, au milieu des Andes, dans une belle plaine, au pied et à l’E. d’un volcan, par 1» 13’5" de latit. N., et 79» 41’40" de iongit. O, ; 7,000 hab. Ruinée en partie par les tremblements de terre de 1827 et de 1S34. Il La province de Pasto, l’une des quatre que comprend l’État du Oauca, est un plateau très-froid, entouré de volcans et de soufrières qui dégagent continuellement des tourbillons de fumée. Les malheureux habitants de ces contrées (60,000 civilisés et 70,000 Indiens) n’ont d’autres aliments que les patates, et, si elles leur manquent, ils vont dans les montagnes manger le tronc d’un petit arbre nommé achupalla ; mais ce même arbre étant l’aliment de l’ours des Andes, celui-ci leur dispute souvent la seule nourriture que leur présentent ces régions élevées. PASTON s. m. (pa-ston). Techn. Morceau de paie que l’ouvrier potier place sur la tête du tour, et qui sert à 1 ébauebage des petites pièces.

PASTOPHORE s. m. (pa-sto-fo-re— gr.pastophoros ; de postas, édicule ; pkoros, qui porte). Antiq. Prêtre grec ou égyptien qui, dans les théories sacrées, portait les images des dieux enfermées dans une espèce de petit temple. Il Nom donné à des prêtres égyptiens qui pratiquaient la médecine. Il Prêtre chargé de lever le voile qui, à la porte des temples égyptiens, cachait la divinité, il Edicule situé près d’un temple, et dans lequel on gardait une image de la divinité.

— Iron. Prêtre : Les pastophores vont s’assembler, et tout est à craindre. (Volt.)

Il Mot de Rabelais, souvent employé par Voltaire.

PASTOPHORION s. m. (pa-sto-fo-ri-onrad. pastophore). Antiq. Habitation des pastophores. p Cellule à côté des temples, où l’on portait les offrandes. 0 Edicule que les pastophores portaient dans les cérémonies publiques. Il Chez les Hébreux, Tour du haut de laquelle le sacrificateur en charge sonnait de la trompette, et annonçait au peuple le sabbat et les jours de fête.

PASTOR s. m. (pa-stor — mot lat. qui signifie pasteur). Ornith. Nom scientifique du genre martin.

PASTOR (Luis-Maria), homme d’État et économiste espagnol mort vers 1865. lia été, à différentes reprises, député aux cortès, puis ministre des travaux publics. On a de lui : la Bourse et le crédit (Madrid, 1848) ; Philosophie du crédit, déduite de l’histoire des nations les plus importantes de l’Europe (Madrid, 1850) ; la Science de l’impôt (Madrid, 1856, 2 vol.). — Son fils, Enrique Pastor, a dirigé pendant plusieurs années, avec succès, la revue mensuelle intitulée la Tribuna de los economistus, qui comptait à cette époque, parmi ses principaux rédacteurs, Venturo Dias, Luis-Maria Pastor, Bonego et Pardo Gonzalez y Elguerra.

Pimtor Fiilo (il), tragi-comédie pastorale de Uuarmi, en cinq actes et en vers ; représentée en 1585. Cette pièce, où brille la poésie la plus riche et la plus fraîche, est

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fondée sur cette fiction : L’Arcadie, en butte depuis un siècle au courroux de Diane, est forcée de lui sacrifier chaque année une jeune vierge, et ce tribut de sang no doit cesser, d’après un oracle obscur, que lorsque deux cœurs d’origine céleste seront unis par l’amour, et lorsque la haute piété d’un berfer fidèle aura reparé l’antique erreur d’une ergère qui ne le fut pas. L’oracle s’accomplit par le dévouement de Nistyl.qui obtient le titre de Berger fidèle, et par le mariage de Donne et de Sylvio. Ce qui fit le succès du Pastor Fido, c’est la peinture de l’amour : il est, d’un bout à l’autre du drame, l’âme et le mobile de toutes les actions. ■ Le genre du Pastor Fido est très-irrégulier sans doute, et, pour ainsi dire, monstrueux, dit Ginguené ; mais dans les arts, la première de toutes les règles est de plaire, et il est certainement peu d’ouvrages où elle ait été mieux observée... On y admire avec raison les récits, qui sont en général d’une clarté et d’une élégance rares ; les descriptions de la vie pastorale et de la nature champêtre, quelquefois altérées par trop d’affectation et de recherche d’esprit, mais aimables, douces et riantes, comme la nature même l’est au printemps. On y admire des scènes où les sentiments sont vrais, touchants et même pathétiques ; où le dialogue est vif et les tirades éloquentes ; où l’on aperçoit trop de luxe et de surabondance peut-être, mais jamais de sécheresse, de disette, de pauvreté. Il y a beaucoup de spectacle, et ce spectacle est naturellement lié à l’action. • Le Pastor Fido eut quarante éditions du vivant de l’auteur et fut traduit presque immédiatement en espagnol, en français, en allemand, en grec moderne, en dialectes napolitain et berguuiasque. La première traduction française fut publiée a Paris chez Matthieu Guillemot en 1622. Nos auteurs dramatiques ont tiré un grand parti de la pièce du célèbre poète ternirais. Elle fut, en outre, arrangée en livret d’opéra par Pasqualigo, et Luigi Pietragrua en composa la musique. Cet ouvrage fut représenté sur le théâtre de Sauf Angiolo, à Venise, en 1721.

PASTORAL, ALE adj, (pa-sto-ral ; a-lelat. pastoralis ; de pastor, pasteur). Qui appartient aux pasteurs ou bergers, aux habitants de la campagne : Vie pastorale. Mœurs PASTORALES. La simplicité de ta vie pastorale et champêtre a toujours quelque chose quitouche. (J.-J. Rouss.) L’humanité peut passer de la vie pastorale à la vie agricole, mais elle ne licencie pas pour cela le troupeau ; elle te parqueau contraire à côté dusillou, (E. Pelletan.)

J’aime des Andelys la rive pastorale.

I’OSTANES.

— Littér. et B.-arts. Qui retrace la vie, les habitudes pastorales : Poème pastoral. Comédie pastorale. C’est en Sicile que l’on doit chercher l’origine de la poésie pastorale. (Barthél.)

Dans ton beau roman pastoral% Avec tes montons pêle-mêle, Sur ua ton bien doux, bien moral, Berger, bergère, auteur, tout bêla.

Leeeun.

— Retig. Qui appartient aux pasteurs, aux ministres du culte ayant charge d’àmes : Des instructions pastorales. Un mandement pastoral. Le sceptre pastoral

Des princes du conclave annonce la puissance.

C- DSUkVIGNE.

— s. m. Littér. Genre pastoral.

— Liturg. Livre où sont contenues les prières et cérémonies que doivent faire les évêques,

— s. f. Littér. Pièce de théâtre, dont les personnages sont des bergers et des bergères ; poésie pastorale : Pope, dans ses pastorales surtout, a beaucoup imité les anciens. (Boissonade.) La pastoral» n’a jamais été naturalisée en France. (De Bonald.) Noire siècle a donné un autre caractère à la pastoralïs : on n’a plus fait des bergers, mais des paysans. (G. Sand.) Madame Sand fait des romans passionnés ou paradoxaux et des pastorales naïoes et simples. (St-Matc Girard.) À quoi sert de parler comme une pastorale.

Et quel profit croit-oa qu’en tire la morale ?

Ponsaro.

— Arboric. Grosse poire d’automne.

— Rem. L’Académie refuse un masenfin pluriel au mot pastoral ; on peut avoir, suivant elle, des mœurs pastorales, mais quant aux goûts, ils ne sauraient être... que chaula pètres seulement. Nous nous sommes élevés plusieurs fois contre cette façon bizarre de proscrire des mots nécessaires. Entre pastoral et pastoraux, l’Académie, n’osant choisir, rejette l’un et l’autre. Dans ce doute, il convient de dire pastoraux, en appliquant la règle des adjectifs en al.

— Enoycl. Littér. On donne le nom de pastorales à toutes sortes de poésies inspirées par les douceurs de la vie champêtre, et spécialement à celles où des bergers sont mis en scène. Comme genre de poésie, la pastorale comprend l’idylle, l’égloguô ou bucolique, une sorte particulière de drame, née au xvie siècle en Italie, et qui n’est qu’une églogue excessivement développée, et de plus quelques compositions où la pastorale prend

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la forme épique. Nous ne nous occuperons que de ces deux derniers genres, renvoyant pour les autres à bglogub et idylle.

Le drame satyrique des Grecs, quelques comédies dont nous n’avons que les titres, les Bouviers de Cartinus, le Paysan de Ménatidre, montrent que les anciens connaissaient très-bien ces développements scéniques de l’églogue qui eurent tant de vogue au xvib siècle et passèrent pour une invention nouvelle ; mats ce genre était tombé dans un profond oubli, et ce fut l’admiration des lettrés de la Renaissance pour Théocrite et pour Virgile qui le remit à la mode. Ange Politien parait avoir le premier introduit sur le théâtre les sentiments et le langage de la poésie bucolique dans sa Favola d< Orfeo, représentée en 1472 à Mantoue ; mais le plus ancien drame composé entièrement dans ce genre est le Sacrifizio d’Augustin Beccari, qui fut joué d’abord en 1554, à Perrare, devant le duc Hercule IL Moins de vingt ans après, le chef-d’œuvre des pastorales, VAminta du Tasse, fut donné à la même cour en 1573. Le nombre des imitations et des pastiches auxquels cet ouvrage donna lieu no peut se compter. Parmi toutes ces pièces, on distingue principalement le Pastor Fido de Guarini, représenté en 15S5, et qui eut un immense succès malgré l’affectation du style et le raffinement des pensées, ou plutôt à cause de ces défauts mêmes.

Vers la même époque où la pastorale Hérissait en Italie, Sannazar y publiait l’/lreadia, mélange do prose et de vers, dont la délicatesse et l’élégance ont été hautement louées par les meilleurs critiques. Régulièrement, ou ne devrait donner le nom de pastorale qu’à un ouvrage en vers, églogue ou drame pastoral ; l’usage a prévalu de le laisser aux compositions mêlées de prose et de vers, comme celui de Sannazar, ou même à celles qui sont écrites entièrement en prose et dont le Daphnis et Chloé de Lougus offre un des plus anciens modèles. Ce roman est même souvent désigné sous le titre de la Pastorale de Longus. Les imitateurs de YArcadie et de Daphnis et Chloé forent au moins aussi nombreux que ceux du Pastor Fido. En Espagne, Moniemayor écrivit sa Diane, Cervantes sa Galatée ; on Angleterre, Sidney composa VA rcadie, simple imitation du roman de Sannazar ; en France, d’Urfé mit au jour YAslrée et fit lui-même école parmi les imitateurs. La plupart des productions que YAstrée inspira sont oubliées ; mais le genre pastoral produisit de loin en loin dans la. poésie des œuvres dignes d’être signalées. Dès 1025, Racan avait terminé son poëme dramatique dos Bergeries. Le succès qui l’accueillit ne peut prévaloir contre les défauts, qui sont le manque de mouvement et le manque de vérité. Sans doute YAstrée n’était pus vraie non plus ; mais d’Urfé s’était composé un monde astreint à des lois idéales, auxquelles lui-même il restait fidèle. C’est ce que ne fit point Racan, et dans ses simples églogues il a rencontré plus souvent la note juste, la note qui fait vibrer l’âme humaine. Après lui la pastorale, comme genre épique ou comme genre dramatique, fut négligée en France, , mais en Suisse Gesner en raviva le goût par son Daphnis et sa Mort d’Abel. Toutefois, avec la science des détails et une apparente émotion, Gesner est souvent déclamateur ; son art est souvent factice ; il y a bien de la sensiblerie et de la convention dans son sentiment. On s’engoua en France du poëte do Zurich. Turgot contribua à le traduire. Diderot le vanta avec enthousiasme. Berquin et Léonard recueillirent plus intimement que personne l’accent de cette poésie d’idylle, comme on l’aimait et on la concevait à celte époque. Tous deux, suivant leur nature, s’éprirent et s’inspirèrent de la pensée de Gesner. La nature tendre et rêveuse de Léonard mêla une teinte de mélancolie à toute sa poésie pastorale. Berquin imita avec plus de fadeur et de maniérisme l’auteur de la Mort d’Abel, qu’il appelait sincèrement le glorieux émule de Théocrite et de Virgile. On sent chez lui le contemporain de Boucher aussi bien que le disciple de Gesner. Ses petits poèmes se terminent par un mot du cœur, par un trait dont la grâce minaudière effleurait alors, avec discrétion, le sentiment qui se contentait de peu. Les pastorales de Berquin, où le goût du xvme siècle s’unissait au ressouvenir des classiques de la Grèbe et de Rome et à quelque parfum des montagnes helvétiques, furent le dernier soupir de ce genre de poésie. Florian se borna le plus souvemà. imiter les pastorales espagnoles, en leur mêlant quelque chose des bucoliques suisses. Il offrit à Gesner sa Galatée, avec ce joli compliment : iJ’ai tâché d’habiller la Galatée comme vous habillez vos Chloés ; je lui ai fait chanter les chansons que vous m’avez apprises, et j’ai orné son chapeau de fleurs volées à vos bergères. • La Révolution française mit en fuite les bergers de la poésie ; on ne peut pas croire que ce fut un grand malheur, lorsqu’on voit les poètes confondre ainsi les siècles et les génies, mêler Cervantes et Gesner, et ajouter l’anachronisme à la fausseté intime du genre.

Pniiorale en musique (la), opéra, paroles de l’abbé Penin, musique de Camberj ; joué à lesy, duus le château de M. de La Haye, au mois d’avril 1659. C’est le premier opéra français et un des premiers ouvrages lyri-