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Jésus. « Ce fut dans cette session, dit encore Sainte-Beuve, et à, l’occasion surtout de la loi sur l’instruction secondaire, que l’orateur prit à la Chambre des pairs la position élevée qu’il a gardée depuis, et qu’il se posa décidément comme le chef du parti catholique, le défenseur et un j>eu le conducteur du clergé et de l’épiscopal français tout entier. C’était un beau rôle à l’âge de trente-trois ans, et il sut le remplir dans toute Sa hauteur et son étendue. Il était allé, en 18-13, à l’île de Madère pour y chercher un climat propice à la santé de sa jeune femme (M1’* de Mérode, sœur de M. de Mérode, qui fut prorainistre des armes à Rome) ; il y travaillait dans ses loiairs à une histoire de saint Bernard. À la nouvelle du projet de loi, c’est-à-dire du danger, il lança de ce rocher de Madère une brochure où il traçait aux catholiques leurs devoirs et la conduite à suivre dans ht conjoncture présente. Il revint tout exprès de Madère pour soutenir le poids de la discussion, et il y retourna ensuite pour veiller à Ses affections domestiques, conciliant ainsi d’une manière touchante les devoirs de l’homme privé avec ceux de l’homme public. » C’est dans cette discussion célèbre qu’il prononça la parole un peu déclamatoire et tant do fois citée : Nous sommes les fils des croisés, et nous ne reculerons pas devant les fils de Vottairel

Le belliqueux orateur était dès lors accepté comme un des chefs du parti catholique, sauf par les ultras de Y Univers, contre lesquels il Soutint des luttes fort vives. En 1845, il fonda le Comité de la société religieuse, en prévision des élections auxquelles il voulait faire concourir le parti catholique ; nous soulignons ces derniers mots, car c’est une expression qui est familière à M. de Montalembert.

Dès 1831, il avait défendu la cause de la Pologne. Il éleva également la voix en faveur des Grecs, des chrétiens de Syrie et des Irlandais. Son discours sur l’incorporation de Cracovie fut un événement. On se souvient du mouvement que lui inspira cette nouvelle usurpation, lorsqu’il montra « la nation opprimée qui s’attache aux flancs de la puissance opprimante comme une plaie "vengeresse immortelle. •

Il est à remarquer, d’ailleurs, que son chaleureux dévouement pour les nationalités opprimées s’exerçait particulièrement «ontre les souverains non catholiques. Jamais il n’a défendu l’Italie contre l’Autriche.

Lors de l’affaire du Sonderbund, il prononça un discours violent contre l’invasion de la démocratie et prophétisa la république à trois mois d’échéance. On était alors en janvier 1848.

À la révolution de Février, il se rallia sans hésiter au nouvel ordre de choses et, dans un manifeste souvent cité, il offrit son concoure à la République. Ceci est l’histoire banale de tous ceux qui ont ensuite et presque aussitôt travaillé avec furie au renversement de la République. Elu à la Constituante par le département du ûoubs, il prit naturellement place à l’extrême droite et devint un des coryphées du parti réactionnaire. On vit bien alors comment il entendait lui et son parti, la liberté, qui leur avait si longtemps servi de mot de passe, a’il nous est permis d’employer cette expression. Laliberu, pourM.de Montalembert, n’était autre chose que la domination de la secte cléricale, et puis encore la reconstitution d’une forte aristocratie, comme celle du moyen âge. Qu’on lise, en effet, se* écrits, et 1 on y verra, dans cent passages différents, qu’il préconise le moyen âge comme l’âge d’or de la liberté. Le despotisme monarchique, compliqué du despotisme delu noblesse et de celui du clergé, c’est ce qu’il appelle la monarchie tempérée ; ce sontces despotismes amalgamés qu’il nous donne comme l’idéal de la liberté. De tels paradoxes pourraient sembler une mystification. Mais c’est très-sérieusement et aveu conviction que M. de Montalembert les émet.

Membre du fameux comité de la rue de Poitiers, il fut un des meneurs les plus actifs et les plus influents de ce cénacle réactionnaire j en même temps qu’il était à l’Assemblée 1 un ces porte-voix de la coulition clérico-monarchique. Il vota cependant contre

le rétablissement du cautionnement des journaux et contre la mise en accusation de Louis Blanc. Mais ce furent lit des exceptions, des oublis pour ainsi dire. Il les répara dans tout le reste de la session par ses votes et par ses discours, notamment en soutenant le projet de loi contre la presse présenté par M. Dufaure, et en ftppuyunt avec énergie l’expédition de Rome. Réélu à la Législative par le Uoubs et les Cotes-du-Nord, il reprit son poste de combat et lutta souvent contre Victor Hugo, particulièrement au sujet de la question romaine et du projet de loi sur l’enseignement ; cette espèce de duel, qui eut des reprises nombreuses, fut d’autant plus émouvant, que des passions personnelles paraissaient se mêler aux passions politiques. M. de Montalembert lit partie de la fameuse commission dite des Hurgruues, qui prépara la loi du 31 mai, pour là mutilation du suffrage universel. Dans Sun idée, c’était le prélude de ce qu’il nommait la campagne de Rome à l’intérieur, c’est-à-dire l’écrasement de la démocratie et de lu liberté. Son rapport à l’appui du projet de loi-tendant à rendre obligatoire la célébration du dimanche et des jours fériés était une nouvelle étape doua

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cette fameuse campagne ; mais le projet ne fût pas voté.

Bien que fort étroitement engagé dans la coalition monarchique de l’Assemblée qui attaquait tout £l la fois la République et le président, M. de Montalembert prit plusieurs fois la défense de Louis-Napoléon, qu’il représentait comme victime de « l’une des ingratitudes les plus aveugles et les moins justifiées de ce temps-ci. » Suivant la tactique bien connue du parti jésuitique, auquel il se faisait gloire d’appartenir, il se ménageait ainsi un point d’appui dans les deux camps qui se disputaient la succession de la République.

— Lors de l’attentat du 2 décembre 1851, Montalembert protesta, mais avec assez de tiédeur pour être compris dans la deuxième commission consultative et choisi comme candidat du gouvernement pour le département du Doubs. On a dit que, dans.cette première période du régime impérial, il avait été seul au Corps législatif à représenter l’opposition. Ce n’est pas l’opposition qu’il faut dire, mais simplement les exigences de la secte cléricale, qui jamais ne trouve qu’on aille assez loin dans ta réaction ni que !e gouvernement en fasse assez pour elle. L’opposition de M. de Montalembert était précisément dirigée en ce sens. Pour le reste, il approuvait hautement toutes les mesures dictatoriales, la suppression de la constitution, — les transportions > l’anéantissement des libertés publiques, etc.

En mars 1854, il écrivit à M. Dupin une lettre politique à laquelle on donna une publicité qu’il n’avait pas cherchée, et.qui motiva contre lui dos poursuites que l’Assemblée autorisa, mais qui n’aboutirent qu’à une ordonnance de non-lieu... ■

Non réélu en 1857, il vécut dès lors dans la retraite, occupé à ses travaux de publiciste et d’historien. Un article, publié le 25 octobre 1858 dans le Correspondant (revue placée sous son inspirntion) et intitulé : Un débat sur l’Inde au parlement anglais , le fit condamner en police correctionnelle, le 24 novembre, à 3,000 francs d’amende et six mois de prison, pour excitation à la haine et au mépris du gouvernement, attaque aux droits et à l’autorité que l’empereur tient de la constitution, outrage au suffrage universel, etc. À l’occasion de l’anniversaire du 10 décembre, le chef de l’État remit au condamné la double peine de l’amende et de la prison ; mais M. de Montalembert n’accepta point cette grâce et, de plus, dans une lettre rendue publique, contesta à Louis-Napoléon le droit de lui faire remise d’une peine quin’était pas définitive. Le jugement fut confirmé en cour d’appel quant a l’amende, mais la peine de la prison fut réduite.à trois mois. On nouveau décret inséré ’au, Moniteur fit remise de la peine au délinquant. Néanmoins, M. de Montalembert s’obstina a ne pas vouvoir bénéficier de la bienveillance qu’on lui témoignait.

En 1852, il avait été admis à l’Académie française en remplacement de Droz. Son discours de réception fut pour lui une occusion nouvelle de manifester ses inimitiés cléricales et aristocratiques contre la Révolution française. M. Guizot, plébéien, protestant et universitaire, s’associa dans sa réponse à ces

anathèmos puérils. La haine de la démocratie fait de ces rapprochements, et nous en avons vu de nombreux exemples a notre é-poque.

La dernière période de la vie de M. de Montalembert, laquelle s’étund de 1857 à 1870, fut employée par lui à écrire des ouvrages et des articles dans le Correspondant. Devenu lé chef des catholiques dits libéraux, puni qui comptait parmi ses membres les plus influents le Père Lacordaire, le Père Gratry, l’évêque d’Orléans Dupaiiloup, Foisset, le prince Albert de BrogUe, il se lit surtout remarquer pat la, vivaéité avec laquelle il attaqua h infantes reprises le chef réconnu des catholiques ultramontaiiis, M. Veuillot, qu’il accusait de

conduire l’Église a sa perte. Ce dernier lui "répondit avec sa verve mordante, et les joutes de ces deux champions de l’autel furent fré" quemment pour le public un spectacle aussi piquant qu instructif. ■ M. de Montalembert se croit libéral, il est simplement orateur, » écrivait un jour M. Veuillot. C’était définir l’hoinine en deux mots. Aux approchés, de la réunion du concile convoqué pour le mois de décembre 1809, M. de Montalembert Se joignit aux adversaires de l’infaillibilité du pape, envoya, en août 1869, une lettré de felicitation aux catholiques de Coblentz, qui s’étaient prononcés en ce sens, et approuva vivement l’attitude que prirent et les écrits que publièrent contre la suprématie absolue du pape MM. Maret, Dupanloup et Gratry.

Un avocat ayant relevé des contradictions entre ses opinions actuelles et ses anciens discours à k Chambre des pairs, il lui répondit, le 28 février 1870 (douze jours avant sa mort), par une lettre fort curieuse dont nous nous bornerons à cftér’ le passage suivant : «Vous ne trouverez, j’ose le croire, pas plus dans mes discours de- 1847 que dans nies autres discours ou écrits, un mot, un seul mot conforme aux doctrines ou’aux prétentions des uliramontains d’aujourd’hui, et cela par une excellente raison, c’est que personne n’avait imaginé de les soutenir ou de les soulever depuis mon entrée dans la vie publique jusqu’à l’avéuement du second Empire. lamais, grâce au ciel, je n’ai pense, dit ou écrit rien de favorable à l’infaillibilité personnelle

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et séparée du papa, telle qu’on veut nous l’imposer, ni k la théocratie.ou à la dictature, de 1 Église, que j’ai réprouvée de mon mieux dans 1 Histoire des moines d’Occident, ni enfin à cet absolutisme de Borne, dont le discours que vous me citez contestait l’existence même au moyen âge, tandis qu’il forme aujourd’hui le symbole, et |e programme de la faction dominante parmi nous... Qu’est-ce qui pouvait nous faire soupçonner, en 1847, que le pontificat libéral du Pie IX, acclamé par tous les libéraux des deux mondes, deviendrait lfÇ pontificat représenté et personnifie, par VÛnion et la Civilla ? Au milieu dès cris unanimes que poussait alors le clergé en faveur de" la liberté comme en Belgique ; de la-liberté en tout et pour tons, qu’est-ce qui pouvait nous faire deviner, l’incroyable volte-face de presque tout’ce même clergé en 1852 ? Qu’est-çè qui pouvait prévoir l’enthousiasme de la plupart des docteurs ultrùmontains pour la’renaissance du césarisme, les harangues de

Mgr Parisis, les. mandements de MB* de Saliniset surtôutie triomphe permanent de ces théologiens laïques de l’absolutisme, qui ont commencé par faire litière de toutes nos IL bettes, de tous nbs principes-, -dei toutes- nos idées d’autrefois, devant Napoléort III, pour venir ensuite immoler la justice et la vérité, la raison et l’histoire en holocauste à l’idole qu’ils se s’ont érigée an’ Vatican’ ? »

— Cette lettre pmduisitla plus vive sensation parmi les catholiques et une grande irritation au Vatican. Quelques jours après, M. de Moritalambert succombait aux suites’ d’un abeè3 dont-il souffrait depuis longtemps. C’était mourir k1 temps ; cor, cinq mois plus tard fil eût assisté au triomphé définitif des idées de M. Veuillot ; « le théologien laïque de l’absolutisme, » qui venait de lui lancer une dernière ruade.. ;

À la nouvelle de la mort de M. de Montalembert, M. de Mérode ; son beau-frère, voulut faire célébrer à Rome un.service funèbre pour le repos de son âme, à l’église d’AraÛceli. Mais Pie IX, dont la colère contre le Célèbre orateur était alors k son comble, interdit la célébration de ce service. Toutefois, cédant à des conseils judicieux, il revint sur sa détermination et désigna un prélat (de son choix pour procéder a la cérémonie dans une autre église..

Voici la liste des principaux écrits de M. de Montalembert : Du catholicisme cl du vandalisme dans l’art (Paris, . 1829, l vol. in-so) ; ; c’est un livre consacré à la défense des monuments du moyen âge, dédié à V. Hugo et visiblement destiné a mettre le romantismedans les intérêts du parti-catholique. ; Vie de sainte Elisabeth de Hongrie, duchesse de Thuringe (Paris, 1830, in-8°), dont il existe de nombreuses éditions ; Du devoir des catholiques dans la question de la liberté d’enseignement (1844, in-S°) ; l’rois discours prononces.à la Chambre des pairs (.1844), dont il a été parlé, précédemment ; Saint Anselme, fragment del’introduction à l’histoire de saint Bernard ' (Paris, 1844, in-8°) ; Quelques conseils aux catholiques sur la direction à donner à la polémique actuelle et sur quelques dangers à éviter (Paris, 1849, in-8°} ; Des intérêts catholiques au xix ? siècle (Paris, 1852, in-8»)’ ; De l’avejtir politique de l Angleterre (Paris, 1855, in-8») ; Pie IX et lord Palmerslon (Paris, 1856, in-8°) ; Histoire des ■moines. d’Occident, depuis saint Benoit jusqu’à)^spiiit^Mernard, ^ (Paris,1860 et suiv. , i vol. lin-rSÙ), ouvrageT auquel nous avons consacré un article spécial (v. moines d’Occident [histoire des]) ; Une.tialion en deuil, la Pologne en 186 l{Paris, 1801, in-8«) ; le Père Locordfiire (Par’i^, . 1862, in-8<>) ; l’Église libre dans l’État libre (Paris, 1863, in ;8°) ; le Pape et la Polot/ne.(Paris, 1804, in-8P) ; la Confiscation des biens de la famille d’Orléans (1871, in-8"). On doit, en outre, à M. de Montalembert, un grand nombre d’articles’publiés dans des journaux et recueils périodiques, notamment Y Avenir, la lleuue des Deux-Mondes, Y Encyclopédie catholique et surtout le Correspondant. Une édition complète de ses œuvres, commencée en 1861 (t.,1er à VIII, in-8°), n’est pas encore terminée. Comme traducteur, il a enrichi notre langue d’un livre célèbre du poète Miekiowicz, Tes Pèlerins polonais, dont il a été question plus haut.

Nous ne croyons pouvoir mieux terminer celte notice que par les appréciations’ suivantes : ■.,

«... Ce que M. de Montalembert représente avant tout, c’est lui-même. Chez lui, la personnalité écrase l’opinion. Obéir à l’humeur, satisfaire la passion, donner carrière au talent, en un mot déployer et mettre en relief l’exigeante importance d’un individu, voilà le capital de sa théorie ; le reste est accessoire. Une sensibilité nerveuse.lui tient lieu.de conscience... S’il faut, un sacrifice, il ne le consent pas, il l’exige, "Sa superbe indifférence a vu passer à ses pieds la destinée ’des partis ; il les a gratifiés.d’un sourire :.suivant les temps, il a pris à celui-ci une idée, à celui-là un regret, à l’autre une rancune, et ces dépouilles successives ont nourri les caprices, flatté l’indépendance, servi la renommée do ce moi éclectique et grand seigneur qui "survit à toutes les ruines, s’affranchit" des victoires comme des défaites et croirait sa liberté perdue s’il. s’eng»geait envers lui-même... Domination monacale, aristocratie féodale, les deux formes les plus impopulaires d’uné société condamnée, M. de Montalembert les.résu’me et les combine en sa

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personne. À ce titré, il est le représentait lo plus parfait de l’ancien régime. Il est aussi le puis original ;car’ ce chevalier’du-passé, demi-abbé, demi-châtelain, a été, parmi les siens, le plus hardi à dérober aux temps modernes leurs changeantes couleurs et les apparences de leurs idées... Placé trèSTJeune en face de difficiles problèmes, doué d’une âu-’i ardente, d’un de ces talents disproportionnés où la passion prédomino et qui seinblent destinés il ne jamais mûrir, partout où sa parole a passé, elle a enflammé, irrité, divisé ; nulle part elle n’a répandu le bienfait des esprits vraiment-supérieurs, la luiniéré-ot l’a paix. Qu’il en eût conscience ou non, son rôle a été dans l’Église et dans l’État ; sauf quelques exceptions, un rôle de discorde. L’isolement a-puni- l’ègoïsme. M. de MontalemberJ. a vu dans 1/Église -et. dans l’État’ toute direction élevéédes esprits et des choses lui échapper, les. grands faits.s’accomplir sans lui, contre lui et, malgré lui, lors même qu’il semblait yconcourir. Il s’est consolé de son peu de puissance, comme un dieu mythologique, par le don des métamorphoses. !. (Ch. AuRKirriN.) ., De son : côté, voici comment Sainte-Beuve app.récie l’orateur, :., .

—, .’..À la : tribune, M. de Montalembert arrive aux effetSjSans.grands elïprtç et comme par suite ’d’un’, développement continu. Il y est d’une : parfaite, "aisance.,11a uéu de gestes, mais il ppssçde^la.pius essentiélle^des partie ? qui concourent à l’àqtipn : il’a la tibia ;, une voix d’un, co’ùrànt pur et d’une longue haleine, d’un, timbre* net et clair, ’ d’un^accent distinct et vibrant, très-propre a marquer les intentions généreuses ou. ironiques du discours. Fils d’une, mère anglaise, on croirait sentir dans sa voix, à travers ht’dôûéèiir apparenté, une certaine accentuation montante qui ne messièd pas, qui fait tbihbèr certaines paroles de plus haut et lès fait porter plus loin... Jamais, sous prétexte d’avoir mis son humilité une fois pour toutes aux pieds du snint-siége, un talent d’orateur né s’est passé plus en sûreté déconscience ses facultés altières, piquantes et ironiques... M. de Montalembert improvise-t-il ou réeite-t-il en partie ? a-t-il- écrit des portions de discours a l’avance où ne les a-t-ii que préparées ? Ce sont des questions qui tiennent au secret de chacun et sur lesquelles il serait difficile de se prononcer par conjecture. Si j’en crois de bons renseignements, M. de Montalembert, dans son

procédé de composition oratoire, a passé par les différentes phases qui sont familières aux gens du métier. Au début, il a commencé simplement par écrire ses discours et par les lire, puis par les réciter... Enhardi bientôt, il-s’est mis ù’ parier sur de simples notes et, Si je ne me trompe, aujourd’hui (1850) il combine ensemble ces diverses manières, en y ajoutant ce que la pure.improvisation ne nlanque jamais de lui fournir. Le tout est enveloppé dans une sorte de circulation vive, qui ne laisse apercevoir aucun intervalle et qui fait que les jets du mpineht, les pensées méditées ou, notées, les morceaux tout faits so rejoignent, s’enchaînent" avec souplesse et se meuvent comme lès membres d’un même Corps, i " ’ ' -’"-■’

« M. de Montalembert, dit M. Ed. Scherer, à fait preuve en politique de ’la mêmémobilitè généreuse et passionnée que dans les choses religieuses. C’était unénature d’àrliste, de poète, de catholique r, uniaalique. Comme orateur, il, avait la vo’ix.la chaleur,

. le, naturel, je ne.siûç quoi, nédistingué et de

. chunnant... Comme, écrivain, M. de Monialembert nélaissera pas de tracés profondes.

—Ses principaux ouvrages appartiennent à l’hugiographie, et quelque talent que l’auteur ait su.mettre dans son Histoire de sainte Élisabeth’et dans ses Moines d’Occident, l’agrément du style ne compense pas le manque

, absolu et.voulu de critique. *

Enfin, le polémiste etl’homme de parti sont appréciés de la manière suivante par M. llippolyte Castille : "

« M. de Montalembert est prompt it accuser ses adversaires de mauvaises pussicuis. Je dis ses adversaires, je devrais plutôt dire les per 1 sonhes qui "ne partagent ’ pas ’ ses opinions. Homme d’àudacé et d’entreprise, il accuse toujours. Il se hâté de qualifier, de peur qu’on iiele qualifié. C’ê^tu’ri Veuillot bien nê, riche, de bonne compagnie et de langage honnête. Mais bon gré, mal gré, la griffe perce sdtls le velours. Pauvre et prolétaire, dépourvu des broderies de la pairie, des palmés de l’Académie, dés habitudes du monde.et deTapuise ’ ment que donne aux sens une grande fortune qui vous prend au berceau, de quelle double râtelée ce catholique militant n’eût-il pas aboyé aux gens 1 Ou en frémit, rien que d’y

, songer. *’ ' "■

’ •.A*l’entendre, les personnes qui pensent qu’il y. a de bonnes choses dans l’Université, qui estiment que là papauté ayant eu de beaux siècles sans pouvoir temporel en pourrait voir refleurir dé semblables, que le règne de l’aristocratie efet’passé en France ét-qu’un grand nom n’est’plus’qu’une élégance de hasard, tous ces gens-là sont dévores de haine... Il y a en lui quelque chîise d’hybride qui contribue peut-être plus qu’on iiè, pense h la sirtg-uta’rité de sa physionomie politique. Malgré la lucidité de son intelligence, l’élégance littéraire

  • , de sa phrase, je ne Sais quoi d’indéfinissable

s’oppose à ce qu’il prenne placée an premier rang des orateurs et des écrivains français. On dirait qu’il manqua de virilité. Il y a en