Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 11, part. 2, Molk-Napo.djvu/74

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tion, qui fut dès lors un fait acquis. Ses conquêtes sont restées debout ; le 9 thermidor n’y a pas touché ; il a seulement fait sortir la France d’une crise héroïque, mais qui n’était pas un état normal.

Maintenant, la Montagne vit-elle éclore de grandes et belles passions à son ombre ? Sans contredit. Comme le dit M. Esquiros, « il y avait de l’amour passionné dans cette fureur du bien public qui immolait tout à une idée. Il faut embrasser d’un point de vue élevé cette époque terrible et glorieuse qui réunit tous les contrastes… Parmi les hommes que la Montagne éleva, dans un jour de tempête, au gouvernement du pays, il y en a qui ont sauvé le territoire d’une invasion étrangère, détruit les factions abjectes dont le triomphe aurait amené la perte de la France, assuré le respect de la souveraineté nationale, ouvert à la pensée humaine, en mal de vérité, des routes infinies. »

Le fait n’est pas contestable. L’auteur, d’ailleurs, ne prétend pas réhabiliter tous les terroristes. « Il y a, dit-il, certains actes qui font tomber sur les hommes une responsabilité foudroyante. »

L’auteur fait l’histoire des montagnards avec la ferveur d’un homme qui croit à ceux dont il écrit la vie et dont il analyse les idées. Il n’y a là rien de bien nouveau. Depuis soixante-dix ans, la France attentive écoute raconter avec ravissement son épopée révolutionnaire. Le ton et le geste sont la seule différence qu’il y ait entre les narrateurs qui ont essayé l’entreprise. M. Esquiros est un des mieux doués d’entre eux sous le rapport du style, de la bonne foi et du savoir. Quelquefois sa prose est un peu déclamatoire et ses allures sont prophétiques. Il s’est corrigé depuis de ces légers défauts.

Il y a d’ailleurs dans son livre des remarques originales et dignes d’être recueillies. Par exemple, il constate avec beaucoup de justesse ce fait nouveau dans l’histoire, qu’en 1793 le peuple français s’est battu pour une idée plus que pour la défense du territoire. Depuis, toujours le mot de patrie a eu le privilège de remuer les foules et de les jeter à la frontière. Ce ne fut pas lui qu’on invoqua en 1793 ; ce fut le salut des principes qu’on venait de conquérir et que menaçaient l’invasion des rois. « Si les hommes de 1793, dit M. Esquiros, ont défendu la patrie avec un héroïsme qui tient du prodige, soit à la tribune, soit sur le champ de bataille, c’est que la France était à leurs yeux le sol d’une idée ; ôtez cette idée, et le territoire, malgré les intérêts qui s’y attachent, malgré le sang martial de ses enfants, le territoire eût été envahi. Dira-t-on qu’ils combattaient pro aris et focis, ces conscrits sans veste et sans souliers, qui opposaient leur poitrine nue à la mitraille ? Des autels ? Ils étaient renversés. Des foyers ? Ces hommes-là n’en avaient pas encore. »

Il est constant que la Montagne et la Gironde ont su faire lever dans les consciences un vent qui frappa l’Europe de stupeur durant vingt-cinq ans et qui ne s’éteignit que sur le champ de bataille de Waterloo. « La Montagne, s’écrie l’auteur, était le Sinaï de la loi nouvelle ; terrible et foudroyante avec des éclairs aux flancs, un peuple prosterné à ses pieds et Dieu au sommet. Au peuple français se rattachaient les destinées des autres peuples, à la Révolution était lié le renouvellement de l’esprit humain. Qui pouvait résister à cela ? Trop près des hommes et des choses pour voir la main qui poussait les événements, d’insensés agitateurs demandèrent au passé et aux ténèbres de les couvrir. Ils se plongèrent d’eux-mêmes dans la mort. D’autres chefs de la Révolution luttèrent jusqu’au bout l’épée haute. Dépositaires de la puissance, ils voulurent hâter le terme de l’enfantement de l’avenir. Ils périrent aussi dans l’action, mais leur œuvre ne périra pas. La Révolution, désormais, n’a plus de violences à craindre ; elle forcera l’entrée des esprits par la lumière et ouvrira les cœurs par l’amour. Déjà ses ennemis se sentent fléchir, et le moment vient où nous nous embrasserons tous au pied de l’arbre dont elle a jeté les racines parmi des débris tachés de sang. »

Cette emphase ne choquait point en 1847 ; aujourd’hui, elle fait sourire un peu ; les prédictions qui l’accompagnent étaient aussi prématurées. Elles témoignent, dans tous les cas, d’une chaleur d’âme et d’une foi dans l’avenir qu’on serait heureux de rencontrer plus souvent.

Montagnards (LES DERNIERS), étude historique de J. Claretie. V. derniers montagnards.


MONTAGNAREALE, bourg et commune du royaume d’Italie, dans l’île de Sicile, province de Messine, district et mandement de Patti ; 2,226 hab.


MONTAGNE s. f. (mon-ta-gne ; gn mll — du lat. montanus, de montagne ; dérivé de mons, mont, montagne). Élévation considérable de terrain ayant un ou plusieurs sommets : Grande, haute, montagne. Montagne élevée, rude, escarpée. Sommet, cime d’une montaqne. Penchant, pente, rampe, flancs, versant, pied d’une montaqne. Pays de montagnes. Toutes les îles ne sont que les sommets de vastes montagnes dont le pied et les racines sont couverts de l’élément liquide. (Buff.) Je suis surpris que les bains d’air salutaire et bienfaisant des montagnes ne soient pas un des grands remèdes de la médecine et de la morale. (J.-J. Rouss.) Les beaux travaux de M. Élie de Beaumont nous ont appris que la formation des montagnes est fort postérieure à la consolidation du globe. (Flourens.)

Je veux manger le pain de tout être qui pense,
Goûter la liberté sur la montagne immense.
        A. Barbier.

— Par anal. Grand amas d’objets ; objet d’une grosseur extraordinaire : Une montagne de livres. L’éléphant est une montagne vivante. Il est tombé des montagnes de neige. Il faut qu’un homme soit bien amoureux, s’il ne recule pas en pensant à la montagne de velours, de soie et de bijoux qu’il lui faudra user sa vie et ses jours à conquérir, pour que sa femme soit mise comme tout le monde. (A. Karr.) Il y a plus de puissance dans un grain de foi que dans des montagnes de doute et d’indifférence. (Guizot.)

— Fig. Objet long ou difficile à atteindre, à passer : La vie est une montagne qu’il faut gravir debout et descendre assis. (Mlle  de Lespinasse.) Chacun a dans la vie sa montagne à grimper. (B. de St.-P.)

— Poétiq. Montagne humide, montagne liquide, Grande vague :

Cependant sur le dos de la plaine liquide
S’élève à gros bouillons une montagne humide.
                    Racine.

|| Les saintes montagnes, Le ciel :

Levons les yeux vers les saintes montagnes.
                    Racine.

— Loc. fam. Se faire des montagnes, Faire une montagne, S’exagérer les choses, voir des difficultés où il n’y en a pas : Il se fait des montagnes de tout. Il fait des montagnes des choses les plus simples. || La montagne a enfanté une souris, De vastes projets n’ont abouti à rien : J’espère que ces grandes montagnes n’enfanteront que des souris. (Mme de. Sév.)

Que produira l’auteur après de si grands cris ?
La montagne en travail enfante une souris.
                         Boileau.

— Prov. Il n’est que les montagnes qui ne se rencontrent jamais, Se dit par menace, pour faire entendre à un homme qu’on trouvera occasion de se venger de lui ; Se dit aussi lorsqu’on rencontre quelqu’un au moment et en un lieu où l’on ne s’attendait pas du tout à le voir. || Chaque montagne a sa vallée, Toute chose a deux aspects, deux sens, deux résultats opposés. || Si la montagne ne vient pas à nous, il faut aller à elle, Si l’occasion ne se présente pas d’elle-même, il faut la faire naître.

— Géogr. Chaîne de montagnes, Suite de montagnes qui tiennent les unes aux autres. || Groupe de montagnes, Système de plusieurs chaînes reliées les unes aux autres. || Système de montagnes, Ensemble de plusieurs groupes reliés les uns aux autres. || Montagnes de glace, Masses énormes de glaces qui se trouvent principalement dans les mers polaires.

— Art. mil. Obusier, canon de montagne, pièce de montagne, Pièce d’artillerie légère destinée à la guerre de montagnes.

— Astron. Montagne de la Table, Constellation de l’hémisphère austral.

— Hydraul. Montagne d’eau, Espèce de rocher artificiel, ayant la forme d’une pyramide, d’où l’on fait sortir des jets, des bouillons et des nappes d’eau.

— Hist. Côté gauche de la Convention, où siégeaient, sur les bancs les plus élevés, les démocrates les plus exaltés : Siéger à la Montagne. || Nom donné, en 1848, à la fraction des représentants du peuple qui était restée fidèle aux traditions et aux doctrines révolutionnaires. || Nom donné au parti des démocrates les plus résolus. || Crête de la Montagne, Fraction la plus exaltée du parti de la Montagne. || Vieux de la montagne, Nom du chef des Ismaélites, dans l’Irak persique.

— Jeux. Montagnes russes, Monticules naturels ou artificiels, où l’on a pratiqué un chemin incliné, droit ou tournant, d’où l’on se procure le plaisir de descendre rapidement en traîneau.

— Pathol. Mal des montagnes, Malaise particulier qu’on éprouve sur les lieux élevés.

— Encycl. Géol. et Géogr. V. orographie.

— Hist. Les montagnards furent longtemps en minorité ; mais, avec des chefs tels que Marat, Robespierre et Danton, ils l’emportèrent presque toujours sur leurs adversaires les girondins, dans les questions importantes. Maîtres des sociétés populaires, des autorités et du peuple de Paris, ils devinrent assez puissants pour étouffer toute opposition, en proscrivant vingt-deux de leurs collègues, dans les journées des 31 mai et 2 juin 1793, et, peu après, soixante et onze autres qui avaient osé signer une protestation en faveur des premiers. Des soulèvements éclatent contre eux dans les trois quarts de la France : ils les répriment promptement. Aux menaces des puissances étrangères, ils opposent quatorze armées, mettent la Terreur à l’ordre du jour, remplissent les prisons de suspects, font tomber des milliers de têtes : nos frontières sont sauvées, et les gémissements des victimes sont couverts par les chants de triomphe. Dans les communes on élève des montagnes symboliques en l’honneur de ces hommes géants qui se montrent armés de la massue d’Hercule pour terrasser l’hydre de la contre-révolution ; mais la division se glisse parmi eux au milieu de cette lutte effroyable. Trois partis se forment : l’un, qui veut pousser la Révolution à ses dernières conséquences, le nivellement des constitutions sociales, compte dans son sein la plupart des représentants en mission et est appuyé par la Commune de Paris et les cordeliers ; l’autre, qui trouve qu’il a déjà été trop loin, reconnaît Danton pour chef ; le troisième, à la tête duquel est Robespierre appuyé par les jacobins, prétend continuer l’état de choses, sans reculer ni avancer. Celui-ci écrasa le premier à l’aide du second, qu’il écrasa à son tour ; mais les débris des partis vaincus se réunirent tout à coup, au 9 thermidor an II, pour sacrifier Robespierre. Dès lors disparurent les dénominations de Montagne et de montagnards. On a voulu les relever après la révolution de 1848, dans les Assemblées constituante et législative ; mais c’était là un pur anachronisme : notre territoire n’était plus menacé ; les mœurs de la nation étaient complètement changées, et ce n’était plus par l’appareil horrible de l’échafaud que pouvaient être vaincues les résistances de l’intérieur : à des temps nouveaux il fallait des dénominations nouvelles.

Montagnes symboliques. Du 31 mai-2 juin 1793 au 9 thermidor an II, c’est-à-dire pendant. le règne de la Montagne, on symbolisa fréquemment dans les fêtes et cérémonies publiques le triomphe de la patrie, tantôt en exposant sur le flanc d’un rocher, comme dans une arche sainte, la constitution de 1793, tantôt et le plus souvent en élevant, sur les places des villes et villages, des monticules de terre revêtus de gazon qui devenaient l’un des centres des réunions et solennités. On en éleva même aussi dans les églises, à la place de l’autel, lors de la célébration des fêtes de la Raison. Souvent des fiancés faisaient consacrer leur mariage par la municipalité au sommet de ces montagnes factices, non moins vénérées alors que les arbres de liberté et les autels de la patrie.

À la fête de la Raison célébrée à Franciade (Saint-Denis, près de Paris) le 30 brumaire an II, l’une des stations eut lieu sur une montagne en terre élevée sur la place et plantée d’arbres et d’arbustes. Des hymnes patriotiques y furent chantés ; des orateurs s’y firent entendre ; enfin, une jeune fille récita au peuple un précis de la vie de Guillaume Tell. Dans les flancs de la montagne était creusée une grotte, « image, dit le procès-verbal de la fête, de celle où J.-J. Rousseau méditait sur les lois sublimes de la nature. » Dans cette grotte étaient les bustes de Voltaire, de Rousseau, de Franklin, mêlés à ceux de Lepelletier, de Marat, de Chalier, etc.

Lors de la fête de l’Être suprême, au 30 prairial an II, une vaste montagne avait été élevée au Champ-de-Mars, où vinrent se grouper la Convention nationale, la Commune et ces bataillons de vieillards, de mères allaitant leurs enfants, de jeunes filles, d’enfants, etc., qui figuraient dans les fêtes publiques comme des symboles vivants.

La vogue des montagnes factices ne fut pas de longue durée, et ces curieux emblèmes furent naturellement rasés par le parti qui triompha après le 9 thermidor.

— Allus. hist. Montagne de Mahomet, Allusion à un trait de la vie du Prophète.

Mahomet se désignait lui-même comme le réformateur et le restaurateur de la religion pure révélée par Dieu à Abraham, mais défigurée par les juifs et les chrétiens. Il reconnaissait tous les personnages bibliques, depuis Adam jusqu’à Jésus-Christ, comme des prophètes, comme des envoyés ; mais il exigeait que ses adhérents le considérassent comme le dernier des prophètes, et qu’ils vissent dans sa mission le sceau des prophéties. De nombreux passages du Coran prouvent qu’il ne s’attribuait point le don de faire des miracles, bien que des chapitres entiers soient consacrés au récit de ses prétendues révélations. Toutefois, voici un trait de sa vie qui montre que ce n’était ni la bonne volonté ni la foi qui lui manquaient ; mais cette foi, c’est ici le cas de le dire, n’allait pas jusqu’à transporter les montagnes. Ayant assemblé un jour un grand concours de peuple, il se plaça en face d’une montagne. Il veut la faire avancer vers lui, il l’appelle, mais elle reste immobile. « Eh bien, montagne, s’écria-t-il alors, puisque tu ne veux pas venir à Mahomet, Mahomet ira à toi. » Tout le peuple le suivit, et le ton majestueux et inspiré dont il prononça ces paroles fit une telle impression sur ces esprits prévenus et crédules, qu’il lui tint lieu de prodige.

« À la façon dont M. Levrault avait insisté
pour qu’il restât à la Trélade, le vicomte
avait compris qu’il touchait au moment décisif.
En effet, le grand industriel s’était promis,
en se levant, que la journée ne s’achèverait
pas sans couronner ses espérances. Il
avait résolu, pour précipiter le dénoûment,
d’en agir avec le vicomte comme Mahomet
avec la montagne ; en d’autres termes,
il se disposait à lui jeter adroitement sa
fille et ses écus à la tête. »
                   Jules Sandeau.

« La comtesse se présenta d’un si grand
air et avec une aisance si parfaite, son maintien
était si noble, son front si calme, son regard
si imposant, que M. Talconet s’inclina
involontairement devant elle, beaucoup plus
bas qu’il n’avait l’intention de le faire.

« Puisque la montagne ne veut pas venir à moi,
je viens à la montagne, » lui dit la comtesse
avec un gracieux sourire. »
                   Charles de Bernard.

— Allus. littér. Montagne qui enfante une souris, Allusion à une fable de La Fontaine qui n’est que le développement de ce vers d’Horace : Parturient montes, nascetur ridiculus mus. V. PARTURIENT MONTES…

Une montagne en mal d’enfant
   Jetait une clameur si haute
   Que chacun, au bruit accourant,
   Crut qu’elle accoucherait sans faute
D’une cité plus grosse que Paris :
   Elle accoucha d’une souris.

Ces mots sont à l’adresse des personnes ou des choses dont les promesses pompeuses n’aboutissent qu’à un résultat ridicule.

« M. de Rémusat ne reçut le portefeuille
de l’intérieur que des mains de M. Thiers ;
il ne fut ministre que dans le cabinet du
1er mars 1840, cette montagne aux larges
flancs, dont la cime orgueilleuse prétendait
toucher la nue, et qui, après de grandes douleurs
d’enfantement, n’accoucha pas même d’une souris.  »
                  Le Dr Véron.

« Le chanteur Fioretto se passionne toujours
et, pour dire en musique à sa maîtresse
qu’il se trouve bien aise, il pousse des cris
comme si on l’égorgeait, La signora Miagolanie,
qui chante avec lui ordinairement, a
été prise de la même fièvre, qui paraît être
épidémique. Elle imite la Malibran, et on dirait
à tout moment qu’elle va enfin lui ressembler ;
elle trépigne, s’avance, s’arrache
les cheveux, pose la main sur son cœur et file
une note : la souris est gentille, mais la
montagne était trop grosse.
               A. de Musset.

« Tarquinio s’assied enfin au piano-forté.
Qu’entends-je, bon Dieu ! Les sons les plus
flûtés, les accents les plus féminins s’exhalent
de ce colosse : c’est la montagne accouchant
d’une souris. »
                   (Tablettes romaines.)

« Nous qui vivons dans une époque sans
foi et sans principes ; nous, assemblées de
petits hommes qui nous gonflons comme une
montagne pour n’accoucher que d’une souris,
nous, coureurs d’affaires, de portefeuilles, de
rubans, d’épaulettes...... nous ne comprendrons
jamais ce qu’il y avait dans cette Assemblée
constituante de convictions et de sincérité,
de désintéressement et de véritable grandeur. »
                   Cormenin.
 
Je ferai… j’ai dessein de faire…
J’aurais fait si j’avais voulu…
Je ne sais pourquoi je diffère,
Mais enfin j’y suis résolu.

Fais donc, et voyons cette affaire.
Courage ! eh quoi ! te voilà pris !
Ton feu s’éteint ? la peur te gagne !
Accouche, et qu’enfin la montagne
Enfante au moins une souris.
                    Marmontel.

— Foi qui transporte les montagnes. V. FOI.


Montagnes Rocheuses (VOYAGES AUX), du colonel Frémont (1842-1845). Les possessions occidentales de l’Union américaine que la chaîne neigeuse des Rocky Mountains sépare des immenses savanes du Mississipi, les vastes contrées de l’Orégon et de la Californie qui s’étendent entre ces montagnes et le grand Océan, n’étaient pas bien connues ; les premiers géographes du territoire indien furent les trappeurs, décrits ou poétisés par F. Cooper ; le gouvernement des États-Unis avait néanmoins dirigé quelques expéditions vers l’ouest et le sud-ouest : celles de Lewis et Clarke en 1804, du major Pike en 1810, de Nicollet en 1833 et, plus tard, de Nicollet et Frémont. C’était à ce dernier qu’était réservé l’honneur d’exécuter des reconnaissances sur les deux versants des montagnes Rocheuses, depuis le haut Mississipi jusqu’à l’Océan, rapides études entreprises surtout au point de vue militaire, mais ayant abouti à de très-utiles notions sur des pays à peine entrevus. Les expéditions de Frémont sont au nombre de trois. Dans la première (1842), il fut chargé de suivre la vallée de la rivière appelée la Platte ou la Nebraska, affluent du Missouri : ce cours d’eau est aussi long qu’un des grands fleuves de l’Europe. Une caravane américaine est munie d’un canot en caoutchouc, indispensable pour la traversée des rivières, et traîne des chariots qui se démembrent et se rajustent ; on fait halte deux heures avant la chute du jour ; les mulets et les chevaux sont laissés en liberté, et les chariots, rangés en cercle, forment une palissade au camp endormi, mais guetté par l’Indien. Un des