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MUSTAPHA s. m. (mu-sta-fa). Pop. Petit garçon joufflu : Quel gros mustapha. t

— Hortic. Nom de plusieurs variétés^’œillet : Le mustapha violet.

MUSTAPHA Ier, sultan des Turcs, né à Constantinople en 1591, mort dans cette ville en 1639. Il était fils de Mohumet III et frère d’Achmet Ier, à qui il succéda en 1617. Ce prince imbécile, qui avait constamment vécu dans l’intérieur du harem, fut à peine sur le trône qu’il se fit mépriser et haïr par son administration aussi insensée que tyrannique.

Après trois mois de règne, il fut renversé par une révolte de janissaires et relégué de nouveau dans le harem en 1618. Quatre ans plus tard, son neveu et successeur Osman II ayant été renversé à son tour et mis à mort par les janissaires qu’il avait voulu anéantir, Mustapha fut, pour la seconde fois, placé sur le trône. Mais sa démence n’avait fait que s’accroître et, pour empêcher le peuple de constater son état moral, on dut l’empêcher de paraître à la prière publique du vendredi. Il abandonna la politique et les soins du gouvernement à ses ministres, nomma grand

vizir un cuisinier, Merrê Houcein, qui sa maintint longtemps en gorgeant d’or et de butin le" janissaires’et en comprimant dan3 lé sang une révolte de spahis, une insurrection d’ulémas. Quant h lui, il se borna à exhumer les vieux édits contre l’usage du vin, k enrôler dans les janissaires des enfants enlevés k des chrétiens et à des juifs, et il passait ses journées tantôt à mettre en pièces les meubles les plus préeieux’du palais, tantôt immobile, les yeux tournés vers le ciel. Merré Houcein ayant été renversé, le nouveau grand vizir, Kemankech-Ali-Pachai fit déposer le sultan Mustapha (1625), qu’on relégua au fond du sérail, où il vécut jusqu’en 1635.

À cette époque, son successeur Amurath IV donna l’ordre de l’étrangler. Sous le règne de cet indigne sultan, l’empire ottoman tomba dans une complète décadence. Les, Persans s’emparèrent-d’un grand nombre de provinces, la population décrut d’une manière effrayante et les revenus de la couronne diminuèrent de plus de 48 millions.

MUSTAPHA II, sultan des Turcs, né k Constantinople en 1664, mort dans la même ville en 1703. Il était fils de Mahomet IV et succéda k son oncle Achmed II en 1695. Mustapha, en arrivant au pouvoir, annonça l’in-tention de gouverner par lui-même. Il nomma grand vizir Mohammed-Elmas-Pacha et ca-pitan-pacha le fameux pirate algérien Houcein-Mezzomorto, qui battit à deux reprises

les Vénitiens en 1695. Quant a lui, il marcha contre les impériaux, les vainquit entre Luppa et Lug03 (1695), fit mettre k mort leur général Frédéric Viterani, rentra triomphalement à Constantinople, puis força, cette même année, Pierre le Grand k lever le siège d’Azov, battit de nouveau les impériaux, commandés par l’électeur de Saxe, Frédéric-Auguste le Fort (1696), mais perdit en 1697, contre le prince Eugène de Snvoie, la bataille de Zenta (1697) et s’enfuit à Temeswar, laissant aux mains de l’ennemi son trésor, son harem, le ■ sceau de l’empire et 400 étendards. Le délabrement des finances ottomanes, la supériorité numérique de l’armée du prince Eugène, les plaintes et les murmures du peuple, qui se prononçait contre la continuation.de la guerre, décidèrent Mustapha II à entrer en négociations avec l’Autriche, la Pologne et Venise et k signer, le 26 janvier 1099, la paix de Carlowitz, par laquelle il restait maître du banat de Ternesvar, mais cédait a l’Autriche la Transylvanie, aux Polonais Kaminieck, aux Russes Azov et aux Vénitiens |a Morée. •Bien que cette paix fût utile à l’empire, elle n’excita pas moins le mécontentement du peuple, qui d’abord l’avait sollicitée. Le sultan, dépouillé de son prestige militaire, s’attacha k faire des réformes intérieures, répara « les forteresses, fit construire des monuments d’utilité publique, fonda à Constantinople l’école militaire Taehlik, réforma la législation ’ maritime, apporta un adoucissement à la position des sujets chrétiens, restaura la Caaba, assura la sûreté des caravanes de pèlerins, soumit plusieurs Kouverneurs rebelles et fut activementsecondé par Houcein-Mezzomorto, qui mourut en 1701, et par le grand vïzir Houoein-Itioupréli, qui mourut en 1702, Il donna alors pour successeur à ce dernier Mustapha Daitabàn, qui s’était signalé par ses succès militaires contre les Autrichiens et les Arabes. Cependant les murmures du peuple et des soldats avaient amené le sultan a se retirer à Andiinople, k laisser sa capitale en proie à des désordres croissants et kabandonner les rênes du gouvernement k son nouveau grand vizir ; mais celui-ci ayant essayé d’annuler le traité de Carlowitz pouramener une nouvelle guerre et dé se débarrasser par le poison des principaux instigateurs de ce traité, le drogmnii Matirocordato, Effendi-Ramy et le mufti FeyzUIlah, le sultan le fit étrangler k la porte du sérail. Cette exécution détermina la révolte de 1703. Cinquante mille séditieux marchèrent sur Andrinople. En vain le malheureux Mustapha, abandonné par ses troupes, s’abaissa jusqu’à essayer de gagner par des concessions les chefs des révoltés, il fut contraint de remettre l’uigrette impériale k son frère Achmet III (17031 et(acheva sa vie dans l’intérieur du sérail. C’était un prince appliqué, économe, , ennemi de la mollesse et des voluptés. Sous

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son règne, lesTurcs commencèrent à traduire des ouvrages de littérature étrangère, et Mustapha contribua k l’essor que prit alors la littérature ottomane en fondant huit académies nouvelles k Constantinople.

MUSTAPHA III, sultan ottoman, fils d’Achmet III, né k Constantinople en 1717, mort dans la même ville en 1774. Lorsqu’il succéda à son cousin Osman III en 1757, il avait constamment vécu enfermé dans le sérail et sans cesse tourmenté de la crainte d’être empoisonné. D’un esprit médiocre, mais joignant k un jugement sain de bonnes intentions et de la fermeté, il-accorda sa confiance au grand vizir Raghib-Pacha qui tourna ses idées vers la paix et avec qui il s’occupa de réformes économiques, rétablit l’ordre dans les finances, réprima les abus, supprima des emplois inutiles, diminua le luxe du sérail, remit en vigueur les lois somptuaiies, etc. -En. même temps, il réprima des troubles qui avaient éclaté, dans diverses provinces, fit reconstruire Saïda, Alep, Damas k moitié détruite par un tremblement de terre, et fonda des mosquées et des bibliothèques dans plusieurs villes de l’empire. La mort de Raghib-Pacha (1763) vint lui enlever un conseiller.précieux. En 1768, il commença à se mêler a la querelle des Russes et des. Polonais, et fut sollicité par les membres de la confédération de Bar a intervenir. Sur ces entrefaites, des cavaliers moscovites ayant pénétré dans la ville turque de Balta et massacré un grand nombre d’habitants, Mustapha IILdédara la guerre k l’impératrice Catherine. Mais l’armée turque et les janissaires, amollis par l’oisiveté et par le luxe, avaient perdu leur ancienne ardeur guerrière.’La première campagne (1769) eut pour résultat de faire perdre au sultan Choczim, la Moldavie, une partie de la Valachie. Celle de 1770, qui fut en-core.plus désastreuse, fut signalée par la terrible oataille navale de Tchesmé, près de l’Ile de Scio, dans laquelle la flotte ottomane fut entièrement incendiée, par la défaite du kan de Crimée sur le Pruth et du grand.vizir Khalil prés de Kakoul, par la perte de Bender, d’Akèrman, d’Isitiaïl, de la Bessarabie, par la reddition d’Azov, par l’insurrection de Géorgie, par les velléités’d’indépendance des gouverneurs d’Égypte, de Palestine et de Bagdad. En 1771, les Russes prirent la Crimée. Néanmoins, pendant cette campagne le sultan, qui venait d’inaugurer en Turquie lesystème des armées européennes en chargeant le baron de Ton d’organiser des corps d’artilleurs, de bombardiers, de pontonniers, put tenir les Russes en échec sur le Danube et réussit à les empêcher de s’emparer de la Géorgie et de Trébizonde. L’année suivante, le sultan entama avec Catherine des ■négociations de paix qui restèrent sans résultat, reprit l’offensive en 1773 et vit alors la victoire revenir k ses drapeaux. Les Russes furent battus à Routehouk et k Karasou par Ali-Bey et près de Kaînardjé par le vainqueur de Lemnos, l’intrépide capitan-pacha Haçan-Bey, qui les rejeta au delà du Danube. Quelques mois après avoir appris ces succès, Mustapha III mourut, laissant le trône h son frère Abdoul-Hamid. Ce prince était instruit et s’était particulièrement appliqué k l’étude de la médecine et de l’astrologie. Il se montra sans cesse occupé des affaires de l’État, et s’il n’eut pas de grands talents, il fit, dû moins, preuve d’un grand zèle et d’excellentes intentions. L’incapacité de ses généraux fut la seule cause de ses revers. Sous son règne, la littérature turque atteignit un haut degré de splendeur.

MUSTAPHA IV, sultan ottoman, né k Constantinople en 1779, mort en 1808. Il était fils d’Abdoul Hamid et fut porté au trône par une révolte militaire qui en avait précipité son cousin, l’infortuné Sélim III, le 29 mai 1807. Pour plaire aux ulémas, auxquels il devait son élévation, il détruisit toutes les réformes de son prédécesseur, même l’imprimerie de Scutari ; mais, malgré quelques succès obtenus par ses armées sur les Russes et les Anglais, il fut renversé k son tour le 28 juillet 1808 par le fameux pacha de Routschouk, Mustapha Bairaklôr, qui s’était avancé jusqu’à Constantinople avec une armée de 16,000 hommes, et avait forcé, le grand vizir Tcheieby-Mustapha k Se joindre k lui. Mustapha fut.déposé et remplacé sur le trône par son frère Mahmoud II. Quatre mois plus tard, une révolte de janissaires ayant éclaté contre le nouveau sultan, celui-ci, cédant aux instances de ses ministres, fit étrangler Mustapha (14 nov. 1808). Ce prince, changeant et cruel, disparut sans laisser un regret.

. MUSTAPHA, prétendu fils de Bajazet 1er, qui vivait dans la première moitié du, xve siècle. À la fameuse bataille d’Aucyre (1401), Mustapha, fils aîné de Bajazet, combattait auprès de son père lorsque celui-ci fut fait prisonnier, et il resta, croit-on, parmi les morts. Ce qu’il y a de certain, c’est que, sous les règnes de Mohamet 1er et d’Amurat II, trente individus essayèrent de se faire passer pour le légitime héritier du trône ottoman et payèrent de la vie leurs prétentions. Le plus remarquable de ces imposteurs est celui qui fait 1 objet de cet article. En 1415, il se rendit en Valachie, s’y rit de nombreux partisans, fut vaincu eu bataille rangée par Mohamed 1er, se réfugia alors à Thessalonique, dont le gouverneur, Lascaris, refusa de le

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livrer, et fut interné par l’empereur Manuel dans l’île de Lemnos, où il resta jusqu’à la mort de Mohamed (1421). Rendu alors k la liberté par Manuel, il reconnut par une prompte ingratitude cet important service, gagna Galliuoli et la Thrace, où il fut acclamé ; mais trahi bientôt après et livré k Amurat, il trouva la mort k Andrinople sur un gibet.

MUSTAPHA, fils du sultan Mahomet II, mis k mort vers 1470. Nommé par son père souverain de la Caramanie, il se signala bientôt par sa bravoure, vainquit en 1469 un général persan, qu’il fit prisonnier, remporta’l’année suivante une nouvelle victoire sur le roi de Perse, Ouzoun Haçan, dont il tua de sa propre main le fils, Zeinel-Reyg ; remit alors le commandement des troupes au grand vizir Sadik-Ahmed, et revint a> Constantinople. S’étant épris d’une passion subite pour une des femmes du grand vizir, ’ qui en’se rendant aux bains avait laissé’tomber son voile, il força l’entrée des bains, enleva la jeune femme, s’attira pour sa conduite les plus vifs reproches de la part de son père et fut étranglé trois jours après pour avoir osé manifester son mécontentement.

MUSTAPHA, prince et littérateur ottoman, fils aîné de Soléiman 1er, étranglé’en 1553. Il était appelé k succéder.k son père et s’était attiré par ses qu’alités l’affection dii peùfile et des. soldats, lorsque l’ambitieuse Roxeâne, sultane favorite du vieux sultan, s’unit avec le grand vizir Roustem pour perdre le jeune prince. Par leurs intrigues ils parvinrent k faire croire k Soléiman que son fils voulait le détrôner et s’était assuré dans ce but l’appui du sofi de Perse. Aveuglé par la crainte, le sultan donna l’ordre à Mustapha,

3ûi se trouvait.alors dans son gouvernementAmasie, de se rendre auprès de lui. Le jeune prince s’empressa dobéir ; mais k peine étoit-ïl entré dans la tente de son père qu’il fut saisi et étranglé, sans que celui-ci, témoin caché de cette scène horrible, entendit un seul instant le cri de la nature. La mort de ce prince a fourni le sujet détrois tragédies françaises : Mustapha et Zéangir, de Belin (1705) ; Mustapha, de Chamfort (1777), et Roxelane et Mustapha, de Maisonneuve (1785). Sous le pseudonyme de MoukblUsl (le Sincère), Mustapha a laissé trois recueils de Ghazels, poésies amoureuses, un Commentaire sur les traditions de Boukhari, un Commentaire du Coran, un Traité sur les énigmes d’Aliker et de Mir Houcein, des ouvrages de grammaire, etc.

Musiopha et Zéangir, tragédie en cinq actes, par Belin (1705). Le sujet de cette pièce est historique. Soliman épousa Roxelane, qui lui donna trois fils : Sélim, Bajazet et Zéangir. La princesse complota, pour assurer le trône à l’un d’eux, la mort de Mustapha, que Soliman avait eu d’une première femme, et fit croire au sultan que son rils avait noué des intelligences avec Thamas, roi de Perse, pour ravir la couronne k son père. Elle excita si bien Soliman qu’il manda %)£ fils pour le faire périr. Zéangir, fils de Roxelane, voulut suivre la fortune de Mustapha, et le voyant étrangler se tua sur son corps. Tel est le canevas Irès-tragique qu’à suivi assez fidèlement Belin.

Le vizir Rustan, gendre de Roxelane, a surpris une lettre de Mustapha, dans laquelle ce prince ose prendre sur lui de proposer la paix au roi de Perse, en lui demandant sa fille en mariage. Cette pièce compromettante a été soumise k Soliman, qui mande son fils pour le punir. Mais Roxelane craint un retour de l’amour paternel et l’amitié qu’a vouée au jeune prince Son propre fils Zéangir, qu’elle désire élever au trône. Zéangir a une telle affection pour son frère qu’il se reproche comme un crime son amour pour la princesse Sophie, que Mustapha aime et dont il est aimé. Cette exposition remplit le premier acte. Au second, Kustan apprend au sultanl’arrestation de Mustupha, le peint sous les couleurs les plus noires, et presse le père d’ordonner la mort de son rils. Il en coûté k Soliman de se priver d’un fils, l’espoir de sa vieillesse et de l’empire ; aussi Zéangir, qui vient plaider sa cause, obtient-il facilement que le sultan écoutera la justification de l’accusé. Mustapha paraît au troisième acté, Zéangir court l’embrasser et l’introduit chez le sultan. Incertain du sort qui l’attend, Mustapha recommande k son frère la princesse Sophie, k laquelle il a engagé sa foi, et qui lui a fait suspendre les hostilités contre Thamas. Il renouvelle cet aveu avec le ton de la vérité. Le sultan n’y résiste plus ; il pardonne k son fils et ne lui impose qu’une condition*, c’est de retourner sur-le-champ k Amasie, de renoncer k la fille de l’ennemi des Ottomans et de partir sans la voir.

Jusqu’ici la pièce de Belin est très-bien conduite. La marche en est ferme et rapide, l’action bien graduée et l’intérêt croissant.

L’ordre que le Sultan donne k son fils de renoncer k celle qu’il aime établit le nœud de la pièce.-Mustaphn, pour assurer sa vie et confondre ses ennemis, obéira-t-il k son père, renoncera-t-il k Sophie, ou bien l’amour l’emportera-t-il sur tout autre intérêt ? L’ordre de son père lui semble affreux. Son frère Zéangir lui représente tout le danger auquel il s’expose s’il désobéit et le conjure de sauver sa vie. Mustapha semble se résoudre à partir. Il conjure son frère de porter

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ses adieux k Sophie, de lui faire comprendre la fatale nécessité qui les sépare. Zéangir le lui promet, quoiqu’on sente tout ce qu’il lui en coûte.k lui-même. Resté seul, Mustapha commence k craindre d’avoir un rival en son frère ; tout l’alarme et le fait trembler. Il prend le parti d’aller chez son amante éeaircir ses doutes. Il est surpris chez elle par le sultan, auquel il répète de nouveau qu’il a engagé sa foi k la princesse et qu’il l’épousera. Rustan vient envenimer le courroux de Soliman en lui annonçant que les soldats se révoltent aux cris de : «Vive Mustapha. » Soliman sort en jurant que son fils mourra. Au cinquième acte, Zéangir se prépare à partir ; il croit avoir apaisé Soliman ; il a déterminé son frère à obéir, et lui-même veut s’éloigner de Sophie. Mais on vient lui apprendre que Mustapha a été arrêté par le vizir Rustan et mis k mort. Roxelane entre en ce moment, et Zéangir l’accueille par ces mots :

Vous vouliez m’assurcr la place de mon pùro’, Il en coûte la vis et le trône à mon frère. Mais en me ravissant un ami si parfait. Madame, regardez ce que vous avez fait.

Et il se perce de son poignard.

La tragédie de Belin eut un grand succès. Si l’amour de Mustapha avait été représenté avec plus de vigueur, si le danger de Sophie avait autorisé la résistance de ce prince, les derniersactesauraient répondu aux premiers ; mais depuis la fin du troisième, l’action languit quelque peu. Le style de Belin est faible, mais.sa conception est d’un poète tragique et bien supérieure k celle de Chamfort, son imitateur. Il n’a manqué k cette pièce pour rester au répertoire que d’être mieux écrite.

Mustnpbn et Zéangir, tragédie en cinq actes, par Chamfort (1782). Chamfort a com Îiosé toute sa pièce, au denoùiuent près, avec es deux premiers actes et la moitié du troisième du Mustapha de Belin, qu’il ft imité jusqu’au moment où Soliman pardonne k Mustapha ; mais son œuvre est loin d’être aussi dramatique que la conception de Belin’, et cependant il avait médité son plan pendant douze années. La marche du premier acte est la même de scène en scène que celle de Belin. Au second acte, une même scène voit éclater et finir la rivalité des deux frères, et l’amour est immolé sains combat. D’ailleurs aucune action, ni de la part de Soliman, qui pendant un ou deux actes semble étranger k ce qui se passe, ni de. la part de Mustapha, que l’on peint comme un homme passionné et impétueux, et qui ne sait prendre aucune mesure pour son salut et celui de celle qu’il aime. Au troisième acte, Soliman a une entrevue avec Roxelane au sujet de Mustapha, qu’elle accuse, grâce k la lettre surprise, par Rustan ; puis elle va chercher cette lettré et la remet au sultan en présence de Mustapha. Soliman la lit, demande au prince s’il reconnaît son seing, et, sur l’aveu de son fils, il ordonne qu’on l’arrête.

L’auteur semble avoir gardé toutes ses forces pour peindre l’amitié fraternelle, et il y a réussi. C’est la partie louable de sa trafédie, et cette peinture est d’une grande eauté dans le quatrième acte. Lk, Chamfort a surpassé Belin pour l’effet dramatique. En outre, il a introduit une idée qui lui appartient et qui est très-heureuse, c’est le double aveu tait en même temps de l’amour des deux frères pour Azémire ; c’est ce beau mouvement de Zéangir, qui sacrifie son propre amour pour le bonheur de son frère et le fait éclater de nouveau pour partager sea périls Cette scène dramatique est aussi bien exécutée que bien conçue, et le dialogue est digne de la situation.

À la fin de cette scène, Soliman pardonne à son fils et la pièce semble terminée, mais le vizir vient lui annoncer qu’une révolte a éclaté dans le camp et dans la ville et menace et son trône, et sa vie. Cetté révolte est un triste ressort, puisque les personnages principaux n’y ont point de part, et on devine trop que c’est une ficelle pour renouer le fil de l’intrigue, aussi la pièce marche-t-elle plus que péniblement jusqu’à la fin. Chamfort s’égare en cessant de suivre les traces de Belin, et aboutit k un déiioûment inexplicable. Sur le faux avis d’une révolte, Soliman fait enfermer son fils dans l’enceinte sacrée, avec ordre de le poignarder au premier mouvement qu’on fera pour forcer l’enceinte où il est gardé. Cet ordre semble inexplicable après la scène de réconciliation ; ce qui l’est encore plus, c’est l’incident qui amène la mort de Mustapha. Zéangir, croyant k la révolte, arrive seul chercher son frère pour voler au secours de Soliman. Au bruit de ses pas, l’eunuque se figure que l’enceinte est forcée et tue Mustapha.

En somme, la-tragédie de Chamfort est mal agencée, et, de l’avis de La Harpe, no vaut pas comme plan celle de Belin sur le même sujet, mais le style est pur, clair et élégant. En outre, l’œuvre de Chamfort renferme quelques morceaux remarquables. MUSTAPHA, prétendu fils de Soléiman 1er, mis k mort en 1555. C’était un esclave qui joignait à une rare audace une ressemblance extraordinaire avec Mustapha, étrangle par ordre de Soléiman en 1553. L’ambitieuse Roxelane, voulant renverser le vieux sultan pour faire monter sur le trône son rils Bajazet, eut l’idée de se servir de cet esclave , comme d’un instrument, comptant s’en dé-