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des caractères. C’est un véritable poète comique et celui qui, en Espagne, se rapproche le plus de Molière. On la rabaisserait si, vis-à-vis de ses pièces, on voulait traiter la question d’origine comme étant la plus importante. Quand Molière a touché un sujet, se préoccupe-t-on de savoir s’il s’est inspiré de telle invention du théâtre italien ? Il a donné la dernière touche ; il a rendu vivant, parfait ce qui n’était qu une ébauche. Ii en est de même de Moreto ; ses chefs-d’œuvre sont, non pas des imitations, mais des perfectionnements d’œuvres étrangères. Quoiqu’il n’ait eu sans doute qu’une carrière dramatique assez courte, la liste de ses pièces est encore assez nombreuse. Ses meilleures comédies de caractère sont : Dédain pour dédain, que Molière a imitée à son tour dans la Princesse d’Elide ; la Nièce et la tante, imitée par Thomas Corneille, qui n’a même pas nommé l’original, suivant son habitude ; un joli imbroglio sur ce proverbe espagnol : De dehors viendra gui de chez nous nous chassera, et une peinture de fat très-réussie, le Joli don Diego. Sans avoir, dans la comédie de cape et d’épée, la souplesse d’imagination, la fertilité d’intrigue de Calderon, il lutte heureusement avec lui dans toute une série de jolies pièces : Trompa adetante, No puede se guardar una muger, El marques de Cigarral, Los empenos de seis horas. Dans cette dernière, les Embarras de six heures, il s’est restreint, comme le sujet le comportait du reste, à une unité de temps fort rare dans le théâtre espagnol. El valiente justiciero, où il met en scène le roi don Pèdre de la façon la plus dramatique, est un des chefs-d’œuvre de la scène historique en Espagne. Son théâtre, comme celui de Calderon, porte l’empreinte d’une certaine fatalité grandiose. Ces deux grands postes ont cherché à jeter les hommes et les événements sur la scène sans souci de ce qu’on appelle la moralité théâtrale ; peu leur importe que le vice triomphe et que la vertu gémisse ; ils ont voulu peindre des hommes vivants, émouvoir avec des faits empreints de la plus grande réalité.

On a vu plus haut que Moreto abandonna tout à coup le monde et le théâtre, s’arrêtant au milieu de son plus grand triomphe. À sa mort, arrivée en 1669, on trouva dans son testament qu’il demandait à être inhumé dans le champ réservé aux suppliciés, partie infâme du cimetière, surtout en Espagne. Des biographes, Ramon de Loaisa entre autres, ont vu dans cette retraite inexplicable et dans ce vœu bizarre le fait d’une conscience profondément troublée. Quelque temps avant qu’il entrât dans les ordres, une aventure mystérieuse avait ému tout le monde littéraire. Un de ses amis intimes, Elisio de Medinilla, jeune poëte tolédain que Lope pleura dans une de ses élégies, fut trouvé mort, tué en duel ou assassiné ; les blessures provenaient d’une arme empoisonnée. L’assassin ne fut jamais découvert. Chose étrange, Moreto fit allusion à ce fait deux fois dans deux de ses comédies, et dans l’une d’elles il alla même jusqu’à indiquer l’épée qui servit au meurtre et qui sortait, dit-il, de chez Toro, le fameux armurier de Tolède, ce que le meurtrier seul pouvait savoir. On est parti de là pour conjecturer qu’il avait assassiné son ami, et l’on expliquerait alors tout le reste de sa vie par les remords qui le poursuivirent. Si c’était vrai, cette aventure serait la plus tragique de ses pièces.

MOKETO (Fulvio-Pellegrino), érudit italien. V. MOKATO.

MORETON s. m. (mo-re-ton). Ornith. Nom vulgaire du canard milouin.

MORETON-CHABIULLANT (Jacques-Henri ou), général français, né vers 1750, mort en 1793. Il prit part à la guerre pour l’indépendance de l’Amérique, au siège de Gibraltar (1783) et fut nommé, en 1785, colonel d’un régiment d’infanterie. Se trouvant un jour au spectacle, il voulut en faire sortir un procureur qui se trouvait auprès de lui, le saisit par les cheveux et le fit jeter dehors par des soldats. Cet acte de brutale violence tut dénoncé au parlement par la victime, et le ministre de la guerre destitua Moreton de son grade de colonel. Ce dernier avait vainement cherché à faire révoquer cette décision lorsque la Révolution éclata ; il se prononça en faveur des idées nouvelles, harangua la multitude au Palais-Royal, fit partie du club des Jacobins, fut nommé maréchal de camp en 1791. Il reçut alors un commandement dans l’armée de Dumouriez, organisa à Bruxelles un club de sans-culottes, puis passa à Douai comme commandant de place et y mourut. Sa brutalité et.la violence de son caractère lui avaient fait un grand nombre d’ennemis.

MOUETTA, bourg du royaume d’Italie, province de Cuneo, district et k 16 kilom. N.-E. de Saluées, au confluent du P6 et de la Vraita, chef-lieu de mandement ; 3,274 hab. Église de la Vierge, but’d’un pèlerinage fréquenté.

MORETTE s. m. (mo-rè-te). Hortic. Variété d’anémone.

MORETTI (Cristofano), peintre italien, né à Crémone. Il vivait au xvo siècle. Un des premiers, il renonça à l’emploi des stucs en relief et des dorures et fut un des réformateurs de la peintura en Loinbardie, surtout au point de vue du dessin et dû la perspec MORE

tive. Parmi ses ouvrages, on cite : une Passion, qu’il exécuta au palais ducal de Milan ; une Madone entourée de saints, à San-Lorenzo ; divers sujets de passion, dans la cathédrale de Crémone.

MOUEÏTI (Gaetano), astronome italien, né à Bologne, mort dans la même ville en 1697. Il entra dans l’ordre des théatins et s’adonna à l’astronomie. On lui doit deux ouvrages, jadis estimés : Tavole dell’ ore planetarie perpétue (Bologne, 1681, in-4o) ; Firmamentum nooissime demtdalum (Bologne, 1695, in-J°).

MORETTI (Joseph), savant italien, né à Pavie en 1783, mort dans la même ville en 1853. Il devint, à vingt ans, répétiteur de chimie à l’université de sa ville natale, enseigna’ la chimie et l’histoire naturelle à Udine en 1807, puis successivement à Vicence et à Milan. En 1832^ il obtint la chaire de botanique à l’université de Pavie. Outre la traduction avec notes du Dictionnaire de chimie de Klaproth et Wolf, ainsi que d’autres ouvrages de Trauinann et de Davy. Moretti a laissé : Prodrome d’une monographie du genre morus (il a donné son nom au morus morettiana) ; De quibusdam planlis Italis ; plusieurs travaux épars dans les écrits périodiques d’Italie, et surtout une œuvre de longue haleine, le seul de ses ouvrages qui soit connu hors d’Italie, la Bibliothèque agricole (Biodoteca agraria).

MORETTIE s. f. (mo-rè-ti). Bot. Plante de la haute Égypte, de la famille des crucifères.

MORETTO DA BRESC1A (Alessandro Buon- vrciK’o, dit le), peintre de l’école vénitienne, né à Rovato, près de Brescia, vers 1490, mort à Brescia vers 1560. Moretto, d’abord élève de son père, passa successivement dans l’atelier de Floriano Terramola et dans celui du Titien. Le grand coloriste de Venise fut le modèle qu’il se donna à son début. Les figures que le Louvre possède, Saint Bernardin de Sienne et saint Louis de Sicile ; Saiiit Bonaventure et saint Antoine de Padoue, rappellent par leur coloris la manière du maître. On peut placer ces tableaux entre 1515 et 1520. C’est probablement à cette même époque qu’il dut peindre ces Portraits dont parlent les biographes, ses contemporains, et qui ne sont pas venus jusqu’à nous. Vers 1525, Moretto habitait sans doute Rome et y admirait Raphaël au Vatican. C’est à cette date que Moretto changea sa manière et se mit à imiter le rival de Michel-Ange. La Chute de saint Pau(, à Santa-Maria-San-Celso de Milan, et le Prophète Élie, de la cathédrale de Brescia, sont les deux morceaux les plus saillants de cette seconde phase de son talent. Un peu plus tard, le coloriste reparut dans la Vénus pleurant’la mort d’Adonis et Jésus dans les limbes, de la galerie de Florence. On voit au musée du Louvre deux tableaux de Moretto : Saint Bernardin de Sienne et saint Louis de Sicile, Saint Bonaventure et saint Antoine de Padoue.

M ore tu m (le), petit poëme de Virgile. Le titre est le nom d’un mets campagnard, composé de fromage et d’herbes pilées, dont la composition esuninutieusement décrite par le poète. Ce poëme offre une peinture tout à fait réelle de la vie agreste. Un paysan se lève avant le jour ; c’est en hiver ; il cherche à tâtons son foyer, tire quelques charbons de la cendre et allume sa lampe ; puis, mettant sajnain devant la flamme pour que le courant d’air ne l’éteigne pas, il grimpe au grenier, prend un boisseau de blé et court à sa meule. La lumière est placée sur une planche, contre la paroi, et, le creux de la meule nettoyé, le paysan se met à broyer le grain, changeant de main quand il est fatigué ; il fredonne des chansons rustiques, qu’il interrompt de temps à autre pour appeler sa servante encore endormie. Elle arrive enfin ; c’est une eselave africaine à peau foncée, aux cheveux crépus, aux lèvres épaisses. Pendant qu’elle chauffe le four, son maître tamise la farine, fait la pâte et donne la forme aux pains. Il court ensuite au jardin, où il cultive des légumes succulents qu’il vend à la ville ; il cueille de l’ail, de la rue, de la coriandre, les jette dans un mortier, avec du sel et du fromage, et broie le tout. La sueur coule de son front tandis que l’odeur lui pique le nez et lui fait jaillir les larmes des yeux. Enfin, il ajoute encore de l’huile et du vinaigre, mélange avec soin, retire la masse avec ses doigts et, la roulant dans ses mains calleuses, eu fait une boule. Au même instant, les pains sont cuits, la servante les sort du four, et le paysan, après avoir pris sa provision, passe ses bottes, met son bonnet, attelie les bœufs au joug et s’en va aux champs tracer des sillons.

. Cette petite pièce, pleine de bonhomie et de naïveté dans tous les détails, est une des meilleures de Virgile ; on sait s’il excelle dans la description, et le sujet y prête beaucoup. C’est un véritable.tableau de genre.

MOREC1L, bourg de France (Somme), cheflieu de canton, arrond. et a 16 kilora. N.-E. de Montdidier, sur la rive droite de l’Avre ; pop. aggl., 3,022 hab. — pop. tôt., 3,078 hab. Bonneterie, briqueterie, scieries mécaniques et autres usines. De l’ancien château fort il subsiste un pavillon flanqué d’une tourelle octogonale, que surmonte nu campanile, et quatre bastilles en brique et pierre, placées duigonalement en regard les unes des autres. L’église, en grande partie du xive siècle,

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offre un magnifique portail, composé de deux porches du style ogival, accolés, et dont l’un est surmonté d’une grosse tour carrée. De remarquables sculptures décorent les vous-sures de ces porches. Sous le chœur s’étendent des caveaux, dont l’un renfermait, avant la Révolution, les sépultures des Créqui.

MOREY, peintre espagnol, né à Palma (île Majorque) en 1696, mort en 1750. Sauf un séjour de quelques années à Valladolid, où il étudia la peinture, cet artiste passa toute sa vie dans son ils natale, où il exécuta de nombreux tableaux. En général, ses tableaux sont d’un dessin roide et dépourvus de perspective. Toutefois, on a de lui quelques fresques remarquables par la hardiesse de l’exécution et la facilité de la brosse. On regarde comme son chef-d’œuvre un Christ au sépulcre entouré d’anges, qui se trouve à Sainte-Eulalie de Palma, où, sous le nom de Vélum templi, il est l’objet d’une certaine vénération.

MOREY (Pierre), un des complices de Fieschi, né à Chapaigne (Côte-d’Or), décapité à Paris le 19 février 1836. D’abord ouvrier bourrelier, puis soldat, il vint s’établir comme sellier-bourrelier àJJarîs. La part qu’il prit à la révolution de 1830 lui valut la décoration de Juillet. Peu après, il se lit affilier à là Société des droits de l’homme. Vers 1834, Morey entra en relation avec Fieschi, qui s’était présenté à lui comme un condamné politique, et le nourrit pendant quelques mois. Arrêté comme complice de ce dernier après l’explosion de la machine infernale (28 juillet 1835), il fut traduit avec Fieschi, Pépin, Boireau et Bescher devant la cour des pairs, dénia toute participation à l’attentat et fut condamné à la peine de mort. Morey conserva jusqu’à la fin son impassible énergie. V. Fieschi.

MOREY (Matthieu-Prosper), architecte français, né à Nancy en 1805. Élève de Leelère et de l’École des beaux-arts, il remporta le premier grand prix d’architecture en 1831 et se rendit alors à Rome d’où il fit plusieurs envois, notamment une fort belle Étude du forum de Trajan (1835), qui a figure k l’Exposition universelle de 1855. De retour à Paris, M. Morey fut nommé successivement attaché au conseil des bâtiments civils, inspecteur des travauxpublics et architecte expert près des tribunaux. Vers 1852, il est allé se fixer à Nancy, où il fut nommé architecte de la ville et du département. Au Salon de 1S58, il a envoyé les Dessins de l’église Suint-Vincent-et-Saint-Fiacre, à Nancy. M. Morey a publié : Charpente de la cathédrale de Messine (1842, in-fol., s pi.).

MOREZ, ville de France (Jura), chef-lieu de canton, arrond. et à 28 kilom. N.-E. de Saint-Claude, au fond d’une gorge, près de la frontière suisse ; pop. aggl., 4,975 hab.pop. tôt., 5,178 hab. Ce bourg a une certaine importance industrielle. On y fabrique annuellement 30,000 tourne-broches, 400,000 douzaines de verres de lunettes, 100,000 horloges ordinaires et un grand nombre de grosses horloges, de la clouterie, des pointes de Paris, des caisses d’horlogo en bois, etc. Forges, moulins, scieries. École d.’horlogerie. Église moderne. Fontaine monumentale sur la place d’Armes.

MORFA s. m. (mor-fa). Entom. Hyraénoptère du genre dorthésie, qui ravage les orangers et lès citronniers.

MORFASSO, bourg et commune du royaume d’Italie, province de Plaisance, district de Fiorenzuola, mandement de Lusainano : 3,414 hab.

MORFÉE ou MORPHÉE S. f. (mor-fé). Agric. Maladie de certaines plantes, caractérisée par la couleur noire fuligineuse dont elles sont couvertes.

— Encycl. La morfée, appelée aussi morphée ou fumagine, est une production de nature assez complexe, qui forme sur les feuilles des végétaux des taches noires semblables k celles que produirait la suie ou une couche épaisse de fumée. On l’a regardée comme une excrétion végéto-animale, et c’en est une, en effet, car elle est composée de champignons microscopiques et des excréments où sécrétions de certains insectes.’Elle peut se montrer partout où il y a des pucerons ou d’autres insectes qui sucent les plantes. On ne connaît jusqu’à présent qu’un petit nombre des champignons qui forment ces taches. « La fumagine, comme le iniell.it, dit M. Léveillé, est très-nuisible aux végétaux, parce qu’elle recouvre les stomates de la surface supérieure des feuilles ; aussi les voyonsnous tomber. Elle fait périr un grand nombre d’oliviers dans les Canaries ; en Corse, elle frappe particulièrement les" myrtes, les cistes, les bruyères arborescentes ysur nos promenades publiques, elle salit les tilleuls, les érables faux-platanes ; dans les serres, les citronniers et les orangers en sont presque constamment couverts. C’est une véritable lèpre qui enlaidit tout ce qu’elle touche. »

Quelquefois, la morfée ne s’étend que sur les feuilles et ne produit d’autre effet que de rendre la végétation languissante. Souvent aussi, elle s’accumule d’année en année sur les rameaux, les branches et les tiges ; elle y forme des couches superposées, qui les recouvrent et obstruent tous lès organes respiratoires, en sorte que le végétal meurt

comme asphyxié. La morfée no se montre jamais que sur les feuilles envahies déjà par

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les insectes ; on peut donc la prévenir en détruisant ces mêmes insectes ; mais quand une fois elle a envahi un végétal, elle ne peut être enlevée que par des pluies assez abondantes ou par des lavages ;.on sent que ce dernier moyen n’est applicable qu’en petit.

Quand un végétal est couvert de pucerons, il faut enlever les plantes qui se trouvent dessous ; sinon, elles se couvriraient de fnmagine, à mesure que leurs feuilles seraient salies par les déjections de ces pucerons, qui s’étendent comme une espèce de vernis sur leur face supérieure. « Nous avons réuni sous la même dénomination, ajoute M. Léveillé, les espèces d’antennaires que l’on rencontre sur les cistes et les bruyères arborescentes, ; sur les pins, leur organisation est beaucoup plus distincte ; les filaments qui les composent s<mt plus gros, rameux, formés de cellules articulées bout à bout et qui se séparent difficilement ; ils recouvrent les feuilles, les rameaux, etc. »

MORFIL s. m. (mor-fil — de l’anc. espagnol atmafil, que l’on trouvé dans un texte de l’an 930. C’est un mot arabe, comme l’indique l’article al. On reconnaît aussi très-facilement dans la finale l’arabe/»/, éléphant. Quant au préf. ma, Diez croit y voir 1 arabe liai, dent ; mais le mot devrait être nafil ou alnafil. Pihan croit qu’il est pour mâlfil, do mal, richesse, la richesse en ivoire). Comm. Dents d’éléphant qui ne sont pas encore travaillées : un tire beaucoup de morfil des. côtes de Guinée. (Acad.) il Etoffe de laine qui sert à faire les petits sacs dans lesquels on enferme les graines de colza ou d’çeillette pour en extraire l’huile.

— Techn. Parties d’acier très-ténues qui restent adhérentes au tranchant d’une lame, après qu’on l’a repassée à la meule, et qu’il faut enlever pour que l’instrument coupe bien : Oter le morfil d’un rasoir. Faire tomber le morfil d’un couteau.

MORFILÉ, ÉE (mor-fi-lé) part, passé du v. Mortiler : Cartes morfiléiïs.

— Encycl. La tricherie des cartes morfilêes a une très-grande analogie avec celle de3 cartes pointées (v. pointe) ; seulement, à la différence de cette dernière qui se prépare d’avance, elle se fait à l’instant même et sous les yeux de la dupe. Voici en quoi elle consiste. Chaque fois qu’il lui vient en main une carte qu’il croit lui être plus tard favorable, l’escroc la inarque en rabattant sur le bord, avec son ongle, un morfil très-léger qu’il reconnaîtra ensuite au toucher. « Ceux d’entre les grecs, ’dit à ce propos Robert Houdin, qui ont cette tricherie pour spécialité, possèdent une extrême délicatesse de toucher qu’ils entretiennent en portant des gants tout le temps qu’ils n’emploient pas à jouer. Quelques-uns vont même jusqu’à se frotter le bout des doigts sur de la pierre ponce, ou les trempent dans, certains acides qui donnent à 1’épiderme une sensibilité extrême. »

MORFILER v. a. ou tr. (mor-ti-lé — rad. morfil). Jeux. Faire sur la tranche des cartes, avec l’ongle, une légère aspérité, au moyen de laquelle les filous peuvent ensuite les reconnaître.

MORFLAT s. m. (mor-fla). Econ. rur. Maladie du ver à soie.

— Encycl. Sous les noms de morflat, mort-. /lof, mort-blanc, tripe, etc., on désigne una maladie des vers à soie, qui s’annonce par le dévoiement, et finit toujours par la mort de l’animal, dont le corps devient alors flasque, noir et fétide, et ne tarde pas à tomber en putréfaction. Cette maladie n’a, comme la’muscardine, que des symptômes incertains : la chenille succombe sans avoir rien perdu de son embonpoint, de sa taille et de la blancheur de sa peau. On reconnaît cependant les vers malades à leur immobilité : étendus sur là litière, ils ne conservent d’autre signe de vie que le mouvement de systole et de diastole de leur vaisseau dorsal. Si on disséqua ces vers, soit pendant leur maladie, soit après leur mort, et qu’on examine partie cuUèrement leur estomac, ou reconnaît que le grand relâchement de cet organe trouble leurs fonctions digestives. Quelques individus, plus robustes ou moins malades, parviennent à ébaucher un cocon imparfait, qui devient réellement leur tombeau, et qu’ils salissent par l’épanchement d’un liquide brun et fétide dont ils sont gorgés ;, on les appelle fondus. D’autres montent sur les rameaux, mais ils y meurent sans avoir filé, et on les y trouve suspendus par une patte, la tête et la queue en bas. Tous ces vers ont reçu la nom de capélans (qui en patois signifie prêtres), à cause de la couleur noire qu’ils prennent quand ils sont morts. On attribue généralement la maladie des morflals, soit aux feuillus mouillées qu’on donne à manger aux vers, soit à l’air vicié des chambres où on les tient renfermés, soit enfin à une forte humidité jointe à la chaleur accablante d’une atmosphère sans mouvement. Les moyens préservatifs sont ici l’unique ressource ; il faut assainir l’atmosphère, la sécher et la mettre en mouvement par des courants d’air,

MORFONDEMENT s. m. (mor-fon-de-man

— rad. morfondre). Action de se dissoudre, de se résoudre en eau : Un pleurésis, c’est un MORFO-NDEMENT. (Montaigne.) Il Vieux mot.

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