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eléger fa. la Constituante. Il y fit partie du comité de législation, vota avec les républicains modérés, fit au gouvernement du président de la République une opposition qui ne parut pas assez vigoureuse aux électeurs de l’Isère, et ne fut pas réélu a l’Assemblée législative. Quelque temps après, M. Marion devint président de chambre à !a cour de Grenoble.

— Son fils, M. Joseph-Édouard Marion, né à Grenoble en 1820, se fit recevoir avocat, puis fut successivement agent de change à Marseille et à Paris. Ayant vendu sa charge en 1801, il retourna dans l’Isère, où il s’occupa d’agronomie et devint membre du conseil général. Lors des élections de 1869 pour le Corps législatif, M. Marion se porta candidat de l’opposition démocratique dans la quatrième circonscription de l’Isère, et fut-élu député. Il alla siéger à gauche et protesta contre le long ajournement assigné à la nouvelle Chambre. Lors de la validation des pouvoirs, son élection fut vivement attaquée, en raison de sa situation, qui n’avait pas été parfaitement liquidée lorsqu’il s’était démis de ses fonctions d’agent de change, et la majorité se prononça pour l’invalidation. Mais ses électeurs ie réélurent en février 1870. Il revint alors au Corps législatif où il vota avec l’opposition jusqu’à là fin de l’Empire. Depuis lors il est rentré dans la vie privée.

MARIONITE s. f, (ma-ri-o-m-te). Miner. Carbonate de zinc anhydre, qui se trouve dans le comté Marion (Arkansas), et qui renferme 73,25 pour 100 d’oxyde de zinc. On rencontre un minéral de même composition à Comillas, près de Santander, en Espagne.

MARION-LAREUCHB s. m. (ma-ri-on-lareu-ehe). Ornith. Nom vulgaire du rougegorge.

MARIONNETTE s. f. (ma-ri-o-nè-te — rad. Marion, dimin. fa m. de Marie, n. pr.). Petite figure d’homme ou de femme, en bois ou en carton, que l’on fait mouvoir avec la main ou avec des fils : Faire jouer les marionnettes. Aimer à voir les marionnettes. Bonaparte adorait les marionnettes. (Ch. Nod.)

— Fig. Personne légère, frivole, sans caractère, qui cède facilement aux impulsions étrangères : Lecteurs gui n’êtes point dans le secret des meneurs p/iitosophiqves, défiez-vous du rôle de marionnettes ou ils veulent vous faire jouer, (Fourier.) Grandes marionnettes, prenez exempte sur les petites, et cachez un peu mieux les ficelles, (A. d’Houdetot.) Vico ne voit que l’homme, marionnette aux mains de Dieu, se mouvant dans un cercle tracé par lui. (T. Delord.)

— Hist. relig. Nom donné aux cordicoles, ou partisans de la dévotion au Sacré-Cœur, établie par Marie Alacoque et Marie des Vallées.

— Techn. Bobine mobile placée sur le bord de l’établi du cardeur. Il Bobine sur laquelle le fil se dévide. Il Nom des montants qui supportent la bobine du rouet a filer : La bobine est soutenue par les deux marionnettes, dont chacune porte à sa partie supérieure un morceau de cuir percé d’un trou dans le milieu, et qui tient à la marionnette par deux petits tenons. (Alcan.)

— s. f. pi. Théâtre où l’on fait jouer les marionnettes : Aller aux marionnettes.

— Art milit. Nom d’une ancienne batterie de caisse qui annonçait l’exécution des châtiments militaires.

— Mar, Réunion de poulies servant aux manœuvres.

— Encycl, M. Magnin, qui a fait de l’histoire des marionnettes une étude approfondie, conjecture qu’on en trouve I origine dans ces figurines de bois appelées Marie di ligna par lesquelles on remplaça à Venise, au xive siècle, les jeunes filles qui avaient fait jusque-là l’ornement de lu fête annuelle. De petites statues de la Vierge portaient chez nous autrefois le nom de muriettes ; une des rues de Paris où l’on vendait ces menus objets de dévotion s’appelait rue des Mariettes et même rue des Marionnettes. Mais la première mention qu’on rencontre du mot marionnette ayant une acception scénique est fournie par les Sérées de Guillaume Boucher, publiées en 1584 et en 1608. On lit dans la dix-huitième sérée, qui traite des boiteux, boiteuses et aveugles : «... Et luy veut dire qu’on trouvoit aux badineries, bastelleries et marionnettes Tabary, Jehan des Vignes et Franc-à-Tripe, toujours boiteux, et le badin es farce de France, bossu ; faisant tous ces contrefaicts quelques tours de champicerie sur les théâtres. «

Les anciens n’ont pas été sans connaître des sortes de poupées articulées ayant quelques rapports avec nos marionnettes. En Égypte, dans les fêtes d’Osiris, on promenait de petits spécimens de statuaire mobile ; la Grèce eut aussi les siens. Dans les pompes religieuses et quelquefois dans les triomphes, les Romains portaient, soit en avant, soit à la suite du défilé, entre autres ridicules et formidables marionnettes, des lamiie, assez semblables aux gargouilles de nos anciennes processions ; puis s’avançait le mangeur d’enfants (Manducus), monstre à tête humaine, type colossal du mâche-croùte lyonnais et du croquemitaine parisien.

Le rôle des marionnettes fut donc d’abord

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sérieux ; elles servaient aux pompes des religions ; mais elles ne tardèrent pas à recevoir leur destination véritable, qui est l’amusement des petits et des grands enfants. Les artisans dionysiaques tiraient de bonnes recettes de leurs théâtres ambulants. À un.des assistants qui lui demandait à quoi il estimait avoir le plus d’obligations, un névrospaste syracusain répondit : « Je me réjouis surtout de ce qu’il y a des sots dans le monde j car ce sont eux qui me font vivre en accourant en foule au spectacle de mes pantins. » Les Athéniens s’éprirent d’un tel engouement pour les marionnettes, après la décadence du drame, que les archontes autorisèrent la production des acteurs de bois sur le théâtre de Bacchus. Athénée nous l’apprend, non sans un certain mépris, en décrivant son banquet des sophistes, et nous fait connaître le nom du névrospaste Pothin.

Dans toutes les contrées de l’Italie où l’on a fouillé des tombeaux d’enfants, on a, comme en Égypte et on Grèce, rencontré, parmi d’autres jouets, des statuettes mobiles d’os, d’ivoire, de bois et de terre cuite. Nos musées conservent beaucoup de spécimens de ces jouets. Feu Charles Lenormand avait rapporté de Thèbes, en Égypte, une figurine en ivoire trouvée à Gournah, dans le tombeau d’un enfant : le bras, la jambe et la cuisse qui subsistent portent des traces d’articulation.

Malgré les répugnances du spiritualisme chrétien pour les exhibitions plastiques, le moyen âge nous présente ses crucifix et ses personnages de la passion mus par des ressorts. On montrait au monastère de Boxley, dans le comté de Kent, un crucifix dont la tête et les yeux étaient mobiles. Il y a quelques siècles à peine qu’a Jérusalem, au Saint-Sépulcre, avaient lieu des cérémonies où la statuaire mobile jouait son rôle. En Espagne, on se servait très-anciennement de marionnettes pour jouer des mystères, la passion surtout. Elles sont clairement désignées par un article du synode d’Orihuela qui défend d’user, pour les représentations sacrées, de ces petites figures mobiles : Jmagunculis fictilibus, mobili quadam agitaiione composais, quas titeres vulgari sermone appellamus,

La manière de faire mouvoir les marionnettes^ l’appareil destiné à cacher l’opérateur ont bien peu changé. Le névrospaste Pothin en fut probablement l’inventeur.

On dressait sur l’orchestre une charpente à quatre pans, itrjua -Hxpàfwvov, que l’on couvrait de draperies et dont le plafond était assez élevé pour que, placé dans le haut de cette sorte à’episcenium improvisé, le maître du jeu pût diriger, sans être vu, les mouvements de. ses comédiens. C’est l’appareil ainsi décrit qui dut, dans de moindres proportions toutefois, être adopté en Grèce et en Italie par tous les joueurs de marionnettes ambulants. Cette disposition s’est, à peu de chose près, perpétuée jusqu’à nos jours, et l’on peut la reconnaître dans les baraques quadrangulaires de nos marionnettes en plein vent. Comme chez nous, le névrospaste antique, « âme et intelligence unique do son spectacle, > dit M. Magnin, devait occuper lo centre db ce postscenium étroit, sorto de petit retranchement que lus lialicns nomment castello, les Espagnols castilto, et uou.s castellet, probablement par suite de l’ancienne dénomination latine. Les Chiaiais, chez qui oqt dû se perpétuer quelques-unes dos traditions grecques, emploient un appareil plus simple encore. Monté sur une petite estrade, l’artiste ambulant est couvert jusqu’aux épaules d’un tissu d’indienne bleue qui, serrée à la cheville et s’élargissant en montant, le fait ressembler à une statue en gaine ou a un cône renversé. Une boîte posée sur ses épaules s’élève en avant et au-dessus de sa tête en forme de théâtre. Sa main, cachée sous les vêtements de ses poupées, présente aux spectateurs les personnages à mi-corps et les fait agir à sa volonté. Quand il a fini, il enferme sa troupe et son fourreau d’indienne dans la botte, et emporte le tout sous son bras. En Espagne, du temps de Cervantes, ] ! fallait qu’un titerero, ou joueur de marionnettes ambulant, fût pourvu d’une charrette et d’un mulet pour transporter son bagage théâtral de village en village, personnel et matériel réunis.

On trouve les théâtres populaires de marionnnettes établis en France à la fin du xvie siècle, sans que rien autorise à considérer leur introduction comme étant, alors récente, ni que rien permette de dire quels personnages y étaient représentés avant cette époque. Lesm(irio»)ie^ej>duxvoet du xvi»siècle ont du, suivant la loi constante de tous les genres de parodies, emprunter les noms, les caractères et les costumes plus ou moins grotesques des comiques nationaux les plus en vogue de leur temps. Et jamais littérature ne fut plus féconde en types susceptibles de ce genre de représentations, que celle qui part du monde allégorique des romans satiriques et moraux du moyen âge, pour jeter son dernier éclat dans ce compendium, dans cette somme philosophique et burlesque qu’on appelle le Gargantua et le Pantagruel. Comment citer, dans l’œuvre de Villon, le célèbre monologue du franc-archer de Bagnolet sans que la pensée se figure, dans les gestes ridicules du personnage qui s’acharne contre l’espovantailde Chennevière, l’action d’un pantin luttant contre une poupée ? Mais nous ne

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pouvons former à cet égard que des hypo1thèses.

À la fin du xvio siècle, le théâtre comique était illustré chez nous par Jehan des Vignes, Franc-à-Tripe, Tabary, qui fut peut-être un aïeul de Tabarin. Les marionnettes durent revêtir l’accoutrement de ces personnages. Jehan.des Vignes, entre autres, sous le nom altéré de Jean de la Ville, devint un bonhomme de bois, haut de 0™,03 à om, ii, composé de plusieurs morceaux qui s’emboîtent et se démontent, et que nos joueurs de gobelets escamotent. C’est le pantin appelé encore Godenot.

C’est à une époque un peu plus récente et seulementaprès que les improvisateurs venus d’Italie, et fixés en France sous Henri IV, eurent naturalisé chez nous divers types étrangers, qu’apparurent sur la scène de nos marionnettes les types plus ou moins nationaux d’Arlequin, de Pierrot, de Pantalon, de la mère Gigogne et de Polichinelle.

Les plus anciens directeurs de fantoches dont les noms soient parvenus jusqu’à nous sont les deux Brioché. Jean Brioché ou Briocci exerçait, dès le commencement du règne de Louis XIV, la double profession d’arracheur de dents et de joueur de marionnettes au bas du pont Neuf, en compagnie de son illustre singe Fagotin.

Eu 1669, Brioché fut appelé à l’honneur d’amuser à Saint-Germain-en-Laye le dauphin et sa petite cour. On lit, en effet, dans les registres : > A Brioché, joueur de marionnettes, pour le séjour qu’il a fait à Saint-Germain-en-Laye pendant les mois de septembre,

octobre et novembre 1669, pour divertir les enfants de France, l,3G5 livres. » Il y avait été précédé par un autre maître de marionnettes, François Daitelin, qui avait obtenu dès 1057 une permission du lieutenant civil pour montrer ses poupées à la foire de Saint-Germain. Antoine Hamilton, dans une lettre adressée à la fille de Jacques II, décrivant la fête patronale de Saint-Germainen-Laye, raconte qu’il trouva tous les habitants de Saint-Germain et du Pec sortant du spectacle :

... Blanchisseuses et soubrettes, Ou dimanche dans leurs habits,

Avec les laquais leurs amis

  • (Car blanchisseuses sont coquettes),

Venoient de voir, ajuste prix,

La troupe des marionnettes. Pour trois sols et quelques deniers On leur fit voir, non sans machine, L'Enlèvement de Proserpine.

C’est le second Brioché, François ou Fanchon comme l’appelait familièrement le peuple de Paris, successeur de Jean Brioché et plus célèbre encore que son père, que Boileau a immortalisé dans l’épître adressée à Racine (1677) :

Et non loin de la place ou Brioché préside...

Cette place était située à l’extrémité nord de la rue Guénégaud, alors nouvellement bâtie. Les marionnettes y jouaient dans un endroit nommé le Château-Gaillard. En 1676, un théâtre de marionnettes, importé d’Italie, s’ouvrit au Marais, sous le nom de théâtre des Pygmées, par une pièce en cinq actes intitulée au programme : les Pygmées, tragicomédie en cinq actes, ornée de musique, de machines, de changements de théâtre, représentée en leur hôtel royal, au Marais-du-Temple. Mais ce sont les foires de Saint-Germain et de Saint-Laurent qui ont été, surtout à partir de 1G97, la vraie patrie des marionnettes. Le premier indice que l’on trouve de jeux de théâtre à la foire Saint-Germain est une sentence rendue lo 5 février 1593 par le lieutenant civil, sur la plainte des maîtres de la Passion, et qui permet aune troupe de comédiens de province de continuer leurs représentations dans le préau de la foire, où ils s’étaient éiablis, il la charge do payer nuxdits maîtres deux ôcus par an. M ; iis il n’est pas douteux que de tels spectacles n’existassent bien antérieurement.

Scanon adressait au prince Gaston d’Orléans, en 1613, des stances où sont décrits les divertissements variés de la foire Saint-Germain, et il y fait une mention expresse des marionnettes. Ce genre de spectacle était si goûté, qu’il a été facile de retrouver les noms des principaux directeurs de marionnettes, les titres des pièces qu’ils jouaient : quelquesunes d’entre elles eurent assez de célébrité pour faire courir tout Paris, et l’on s’informait d’elles avec autant de soin que s’il se fût agi d’une pièce en.vogue. Ce qui augmentait le plaisir, c’était la liberté relative que la police et la censure laissaient uuxmarioit’ nettes, de gré ou de force. Il était moins aisé de prendre des précautions contre elles que contre les acteurs ordinaires des théâtres, et les impresarii profitaient de cette latitude pour larder le dialogue d’allusions et de lazzi politiques ou autres. Maintes fois, tel théâtre de marionnettes fut impitoyablement fermé : il renaissait à deux pas de là, sous le nom d’un autre directeur, et la guerre continuait. Cadet de Beaupré, Fourré, Oudinot et le fameux Nicolet se firent une réputation comme directeurs de marionnettes.

Au xvmo siècle, les marionnettes étaient fort en faveur dans le grand monde. Malézieu, de l’Académie française, ne dédaigna pas d’écrire des comédies demarionrettes, qui se jouèrent chez la duchesse du Maine. Bien MARI

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tôt la mode des marionnettes de société devint générale. Voltaire ne manquait pas de faire venir à Cirey les joueurs de marionnettes qui passaient dans le pays. La passion de François de Nantes et de Nodier pour ce genre de spectacle est connue. De nos jours un grand écrivain, Mm« Sand, se montre passionnée pour ce divertissement, et possède un théâtre de marionnettes dans son château de Nohant.

La vogue des marionnettes, un moment effacée par celle des ombres chinoises, a repris quelque faveur, grâce aux puppazzi. Les puppazzi sont des marionnettes qui sont mues h l’aide des doigts, au lieu d’être mues à l’aide de fils ; nous leur consacrerons un article spécial. Il n’y a plus de théâtre de marionnettes qu’au Luxembourg et aux Tuileries, et leur auditoire se compose presque exclusivement d’enfants.

En Angleterre, au xvie siècle, les ntarioiinettes avaient un double répertoire religieux et profane. Elles jouaient de grandes pièces, des tragédies, telles que Jules César. Les infortunées poupées eurent à souffrir, comme leurs confrères les acteurs de chair et d’os, la persécution des puritains, devant qui cependant elles finirent seules par trouver grâce. Au xvno siècle, les marionnettes anglaises eurent encore une autre épreuve à subir, celle de la concurrence des burattini. Au xviiic siècle, le fameux type de Punch y apparut et domina depuis leur modeste scène. C’est le Polichinelle italien accommodé-au goût violent et un peu féroce do l’Angleterre. C’est le Polichinelle devenu classique, qui tue sa femme, qui tue le juge, qui tue le diable et la mort. Punch est resté depuis cette époque, en même temps, un des principaux ministres de la satire anglaise. En Allemagne, le spectacle des marionnettes se résume principalement dans les types de Hanswûrst

(Jean Saucisse) et de Kasperle. C’est toujours le type naïf, satirique, brutal qui fait le fond de tous ces personnages, que lo peuple affectionne comme une vive expression de ses instincts. La légende do Faust a été aussi souvent exploitée dans les théâtres de marionnettes en Allemagne. C’est à ce spectacle que Gœthe, qui a écrit d’ailleurs des pièces pour les poupées de bois, puisa l’idée de son drame. En Hollande, les marionnettes populaires sont Jean Pickeihœring (hareng saur) et Jean Klaassen. Le Polichinelle turc se nomme Caragueuz ou Caragheuz. Le lecteur trouvera, à chacun de ces noms, les particularités qui les distinguent, et que nous ne pourrions rapporter ici sans allonger démesurément cet article.

Marionnettes (les), comédie de L. Picard, en cinq actes et en prose (1800). Dans cette pièce, qui a eu un succès très-légitime, Picard a exposé d’une manière neuve et piquante, avec sa verve et son originalité habituelles, cette vieille vérité, que le caractère de la plupart des hommes, leurs principes, leurs mœurs et leurs procédés varient au gré des circonstances. Comme, dans le grand monde, un vernis de bienséance et de politesse cache jusqu’à un certain point la bassesse et la sottise, ce n’est pas là que Picard a cherché ses personnages. Il les a choisis dans la classe inférieure, où l’on sait moins dissimuler ses impressions.

Un maître d’école et un directeur de marionnettes, deux vieux amis, sont en scène, et dissertent comme Sénèque sur le mépris des richesses. Le maître d’école se propose d’épouser une de ses anciennes élèves, fille d’un jardinier’du voisinage ; mais il lui faut l’agrément du parrain d’Agathe, M. Dorville, riche banquier, qui le. trouve un peu trop gringalet et reconduit. Là-deasus le banquier perd tout son avoir confié à un négociant de Hambourg, etMarcellin, le maîtrod’école, hérite d’une fortune colossale que lui lègue un mystérieux cousin d’Amérique. Le banquier étant obligé de vendre ses terres, Marcollin les achète et, maintenant qu’il est riche, abandonnant toute idée d’union avec Agathe, jette les youx surMm* de Saint-Far, sœur de Dorville. La jeune jardinière, qui so croit sûre du cœur de son amant, vient le complimenter de sa nouvelle position ; mais elle n en reçoit qu’un accueil froid et dédaigneux. Mm0 de Saint-Far triomphe, mais une rivale se présente ; c’est la sœur d’un certain Valberg, protégé du banquier Dorville, qui, n’ayant plus rien à tirer de celui-ci, a transporté au nouveau propriétaire du château ses soumissions et ses bassesses. Sa sœur est jolie et se croit sûre du succès ; il est temps que le directeur de marionnettes vienne au secours de Marcellin, comiquement embarrassé au milieu de ses trois femmes.

L’imprésario ambulant, révolté des hauteurs du parvenu, qui le traite, comme dit Henri Heine, un peu familionnairemrnt, entreprend de lui jouer un bon tour et de le ramener à des sentiments meilleurs. D’accord avec le notaire du village, tabellion honnête, mais imbécile, il montre à Marcellin une lettre du fameux cousin d’Amérique, dans laquelle celui-ci témoignait des sentiments affectueux en faveur d’Agathe, qui était un peu sa parente, en même temps qu’un granit déplaisir d’avoir Marcellin pour fiéwaer. Il part de là pour lui insinuer (juo par un testament subséquent, qui vient d’être retrouvé, il a été déshérité au profit d’Agathe. À cette nouvelle, que tout le monde croit -vraie, les