— Allus. litt. Marguerite, héroïne du Faust de Gœthe. V. Faust.
Marguerites de la Marguerite des princesses (LES), recueil des poésies de Marguerite de Valois (1547, in-8o). Elles furent trouvées
dans ses papiers après sa mort, et publiées
sous ce titre par ses amis à Lyon. Ce recueil
est volumineux et renferme un singulier mélange
d’œuvres profanes, mondaines même
et ascétiques. On y trouve quatre mystères :
la Nativité de Jésus-Christ, l’Adoration des trois Rois, la Comédie des innocents et la Comédie du désert ; deux farces : Trop, prou, peu, moins, et la Coche ou le Débat d’amour ; un poème pastoral, imité de Sannazar : les Satyres et nymphes de Diane ; des hymnes, des allégories, le Triomphe de l’agneau, la
Complainte pour un prisonnier, en faveur de
son frère captif à Madrid ; le poëme mystique
publié à part du vivant de Marguerite :
le Miroir de l’âme pécheresse, que la reine
Élisabeth traduisit elle-même en anglais, etc.
Ces poésies ont de la grâce, du naturel et
témoignent d’une heureuse facilité, mais
c’est tout leur mérite ; comme poète, Marguerite
manque complètement d’originalité, et
ses vers sont loin d’avoir la saveur de sa
prose. L’imagination n’était pas non plus sa
faculté dominante ; elle ne savait pas créer,
et l’on retrouve chez elle un reflet décoloré
de tous les poètes de son temps, italiens et
français. L’éclat de la poésie italienne qu’elle
affectionnait pâlit singulièrement dans ses
rimes ; elle remplace la verve méridionale et
le vif sentiment de l’art par un bon sens un
peu vulgaire. Un autre caractère distingue
cette production de l’Heptaméron. Ce dernier
n’avait d’autre objet que l’amusement ;
il restait complètement étranger à la pensée,
aux travaux, à la vie intellectuelle de l’époque ;
le recueil des Marguerites, au contraire,
se mêle à l’histoire du temps ; par son côté
religieux, il rappelle les commencements de
la Réforme sous François Ier ; par son côté
élégiaque, il fait songer aux malheurs de la
France après la bataille de Pavie ; comme
œuvre littéraire, il offre une peinture exacte
de la littérature de l’époque. À tous ces
points de vue, bien que moins célèbres que
l’Heptaméron, les Marguerites sont encore
curieuses a étudier.
MARGUERITE (île), île de la mer des Antilles, une des îles sous le Vent, à 3 kilom.
de la côte N. de l’État de Venezuela, dont
elle dépend ; par 110° 3′ de lat. N. et 65° 47′
de long. O. ; 60 kilom. sur 8 à 32 kilom. ;
18,000 hab. ; ch.-l., l’Assomption. L’île Marguerite se compose de deux presqu’îles unies
par un isthme long et étroit ; celle de l’est
est la plus considérable. Cette île est couverte
de rochers arides ; les vallées n’offrent,
au lieu de terre végétale, qu’une couche sablonneuse d’un pied d’épaisseur, mêlée de
madrépores. Les produits agricoles, tels que
le coton et la canne à sucre, sont peu abondants, et les habitants se livrent à la pêche de la tortue, du hareng et de la sardine. Ils fabriquent aussi des hamacs et des bas de
coton d’un beau tissu. L’île a trois ports ; le
principal est Pampatar, à l’E.-S.-E. ; le second
est Pueblo de la Mar, à 4 kilom. E.-S -E. du premier, et le troisième, Pueblo del Norte,
sur la côte N.
L’île Marguerite fut découverte par Christophe Colomb en 1498 ; Charles-Quint la céda à Villalobos en 1524. On y construisit plusieurs établissements qui furent détruits en 1662 par les Hollandais. Elle a été, pendant la guerre de l’Indépendance, le théâtre de plusieurs combats. Les troupes espagnoles, commandées par Morillo, y furent défaites avec une grande perte, près du port de Pampatar, et obligées de se retirer sur le continent.
MARGUERITE (île SAINTE-), ancienne Lero, située dans la Méditerranée, sur la côte S.-E. des Alpes-Maritimes, à 2 kilom. du continent, arrond. de Grasse et en face du golfe
de la Napoule, par 43° 31′ 9″ de lat N. et
4° 42′ 46″ de long. O. Cette île, qui fait partie des Îles Lérins, a 6 kilom. de longueur. Elle est séparée de l’Île Saint-Honorat par un canal de 1 kilom. de largeur. Les religieux de
l’Île Saint-Honorat la défrichèrent, puis elle
fut fortifiée vers 1640. Elle est habitée par
quelques familles de pêcheurs et par les soldats
qui forment la garnison. Ce qu’elle offre
de plus remarquable, c’est le fort dont nous
allons parler.
Marguerite (FORT Sainte-), situé dans l’île du même nom. Construit du temps de Richelieu,
sur une falaise assez élevée de la côte
septentrionale de l’île Sainte-Marguerite, et
face de la pointe de la Croisette et de la ville
de Cannes, ce fort fut agrandi par les Espagnols
et réparé ensuite d’après les plans de
Vauban. C’est en 1635 que les Espagnols,
voulant se rendre maîtres d’une base d’opérations
importante contre les côtes de Provence,
assiégèrent le fort Sainte-Marguerite,
dont ils s’emparèrent sans difficulté ; mais, en
1637, Richelieu força les Espagnols à évacuer
la place. Lors de l’invasion de la Provence
par les troupes du duc de Savoie, le
fort Sainte-Marguerite canonna vigoureusement
l’ennemi et l’obligea de faire un détour
par les hauteurs de Vallauris. En 1746, les
Autrichiens et les Piémontais, assistés par la
flotte anglaise, réussirent facilement à s’emparer
de l’île, qui était mal défendue ; mais, dès l’année suivante, le chevalier de Belle-Isle les forçait à capituler. Depuis cette époque, l’île n’a plus été conquise, et le fort
Sainte-Marguerite devint une prison d’État.
Ce qui attire surtout ta curiosité des touristes
dans ce fort, c’est le cachot de l’homme au
Masque de fer, qu’on y peut voir encore. Il
consiste en une grande chambre dont les
murs sont complètement nus et qu’une seule
fenêtre éclaire. « C’est peut-être le seul endroit
de l’île qui soit sombre et frais, dit
M. Mérimée ; mais le contraste de cette obscurité
avec l’éclatante lumière qui inonde la
baie et le magnifique amphithéâtre des montagnes
du Var devait encore augmenter la
tristesse du pauvre prisonnier. Le mur est
d’une solidité extraordinaire, ayant près de
12 pieds d’épaisseur ; en outre, trois fortes
grilles de fer garnissent la fenêtre et rendent
impossible toute communication avec
l’extérieur. Deux portes couvertes de clous
et d’énormes barres de fer ne s’ouvraient que
devant le gouverneur du château, et ce n’était
que par les appartements de cet officier
que l’on pouvait parvenir à la chambre du
prisonnier. Un corridor étroit, muré à chaque
extrémité, lui servait de promenade ; au
fond on avait accommodé un petit autel, où
quelquefois un prêtre lui disait la messe. À
côté de sa cellule, une autre renfermait son
domestique qui, plus heureux que lui, mourut
dans l’île, après quelques années de détention. »
Le fort Sainte-Marguerite servit
de prison à un certain nombre de personnages
plus ou moins célèbres. Après La révocation
de l’édit de Nantes, Louis XIV y fit incarcérer
plusieurs ministres protestants, coupables
de ne pas avoir voulu abjurer leur foi
et mentir à leur conscience. Plus tard, le
régent y envoya Lagrange-Chancel, qui avait
écrit une satire contre lui ; mais le poète
réussit à s’évader. Sous le premier Empire,
Napoléon fit enfermer aussi au fort Sainte-Marguerite
plusieurs prisonniers politiques,
entre autres M. de Broglie, évêque de Gand.
En 1816, les mameluks y furent exilés ; enfin,
de 1841 à 1859, le fort servit de prison
aux Arabes que la guerre avait fait tomber
entre les mains des Français ou que les tribunaux
avaient condamnés. Aujourd’hui, les
cachots voisins de celui qu’habita l’homme
au Masque de fer ont seuls conservé leur
destination ; ils servent de salles de police à
la petite garnison logée dans le fort.
MARGUERITE (sainte), vierge et martyre, morte à Antioche en 275. Elle n’est point
nommée dans les anciens martyrologes ; ce
fut au xie siècle seulement que, tout à coup,
on évoqua sa mémoire. D’après la légende,
qui ne repose sur aucun document certain, le
gouverneur d’Antioche, Olibrius, l’ayant vue,
en devint amoureux, et voulut en faire son
épouse. Marguerite lui répondit qu’elle n’aurait
jamais d’autre époux que Jésus-Christ.
Le gouverneur furieux la fit déchirer à coups
de fouet, puis jeter en prison. Le démon lui
apparut sous la forme d’un horrible dragon ;
mais Marguerite ayant fait un signe de croix,
le monstre disparut à l’instant. La prison fut
alors remplie d’une lumière céleste, et les
plaies de la sainte furent entièrement guéries. Le cruel Olibrius, peu touché de ces miracles,
ajoute la légende, soumit Marguerite
à de nouvelles tortures et finit par lui faire
trancher la tête. Les Orientaux honorent
sainte Marguerite sous le nom de sainte Pélagie
ou de sainte Marine, et les Occidentaux,
sous ceux de sainte Gemme ou de sainte Marguerite.
Sa fête se célèbre le 20 juillet.
Marguerite (sainte), vierge et martyre. Iconogr. Raphaël a consacré à cette sainte deux tableaux d’une finesse exquise : l’un qu’il peignit pour François Ier, et qui, après avoir figuré longtemps dans la galerie de Fontainebleau, est venu prendre place au Louvre ; l’autre, qui a appartenu à diverses familles de Venise, et qui se voit actuellement au musée du Belvédère, à Vienne. Dans la première de ces peintures, sainte Marguerite, figure virginale d’une extrême noblesse, tenant de la main droite une palme, et de la gauche le manteau qui couvre ses épaules, foule aux pieds un affreux dragon à la gueule béante. Le second tableau nous montre la sainte sortant de la caverne du dragon tenant un petit crucifix et abaissant son regard vers le monstre, qui se roule affreusement à ses pieds. La Sainte Marguerite du Louvre a été gravée par Phil. Thomassin, Eg. Rousselet, L. Surugue (dans le Cabinet Crosat), B. Picart, Marie Briot, C. Fiori, Gio-M. Variana, Boucher-Desnoyers (1832), P. Metzmacher (Salon de 1848), etc., la Sainte Marguerite, de Vienne, a été gravée par J. Troyen, L. Vorstermann le jeune, J. Mannl, G.-A. von Prenner (1733), J. Eissner, A. Réveil (au trait).
Quelques iconographes pensent que sainte Marguerite a été représentée victorieuse du dragon pour signifier que, par la puissance de la foi, elle a su échapper aux embûches du démon Un tableau de Ch. Du Fresnoy, qui décorait autrefois l’église Sainte-Marguerite de Paris, et que possède aujourd’hui le Louvre, nous la montre foulant aux pieds le monstre, debout et les yeux levés au ciel. Des représentations analogues ont été peintes par Palma le jeune (musée des Offices), Sustermann (musée des Offices), Adrien van der Werff (morceau capital du maître, ayant fait partie des collections Blondel de Gagny, Tolozan, Villers, Talleyrand, Baring), Dom. Feti (musée du Belvédère), Titien (musée de Madrid), Nicolas Quentin (musée de Dijon), Ambr. Franken le vieux (grisaille exécutée sur le revers d’un volet de triptyque, au musée d’Anvers), L. Cranach (volet de triptyque, au musée de Dresde), Eust. Lesueur (autrefois dans la chapelle de l’hôtel du président Turgot, au Marais), Annib. Carrache (gravé par C. Bloemaert), N. Poussin (gravé par F. Chauveau, B. Audran, Fr. Bignon), Jacques Stella (gravé par Abr. Bosse), le Guerchin (église San-Pietro-in-Vincoli, à Rome), S. Vouet (autrefois dans l’église des Minimes, à Paris, gravé par Michel Dorigny en 1639). Citons encore les estampes de B. Biscaino, Sch. a Bolswert, P.- Brébiette, Al. Claas, Nic. Hopfer (1525), Th. de Leu, du Maître à l’ancre, L. Bertelli, etc.
Un groupe de Maindron, représentant le Martyre de sainte Marguerite, a été exposé au Salon de 1838. Rutilio Manetti (commencement du xviie siècle a peint Sainte Marguerite ressuscitant une femme ; ce tableau est au musée de Madrid.
Marguerite (ÉGLISE Sainte-). En 1634, sur
les sollicitations des habitants du faubourg
Saint-Antoine, trop éloignés de l’église Saint-Paul, leur paroisse, l’archevêque de Paris
érigea en succursale une chapelle dédiée à
Sainte-Marguerite, qu’Antoine Fayet, curé
de Saint-Paul, avait fait bâtir à ses frais
pour servir de sépulture à sa famille. Cette
succursale devint une cure en 1712. En 1713
et en 1765, l’église Sainte-Marguerite fut
l’objet de travaux d’agrandissement considérables, nécessités par l’accroissement rapide de la population du quartier ; au milieu
du xviiie siècle, le nombre de ses paroissiens
dépassait quarante mille.
On remarque dans l’église de Sainte-Marguerite la curieuse chapelle des âmes du purgatoire, construite par l’architecte Louis en 1765, dans un style qu’on pourrait appeler sépulcral. Cette chapelle, éclairée seulement par une ouverture pratiquée à la voûte, est remplie de bas-reliefs, d’inscriptions et d’ornements lugubres ; derrière le maître autel en forme de tombeau antique se trouve un grand tableau de Briard, représentant le purgatoire. Cette église possède plusieurs tableaux relatifs à la vie de saint Vincent de Paul, provenant des lazaristes. et intéressants par l’exactitude des portraits historiques. On y voit aussi le tombeau d’Antoine Fayet, curé de Saint-Paul, mort en 1634 ; ce mausolée est formé d’un sarcophage de marbre noir soutenu par quatre anges en marbre blanc ; en 1737, le curé Goy, offensé de la nudité de ces anges, fit enterrer le tombeau dans le sol du chœur ; on l’exhuma vers 1850. L’église de Sainte-Marguerite renferme encore une remarquable peinture sur bois du xvie siècle, représentant une Descente de croix, et une autre Descente de croix en marbre, sculptée en bas-relief par le Lorrain et Nourrisson, élèves de Girardon, d’après les dessins de leur maître, pour l’église de Saint-Landry, dans la Cité, et donnée à l’église Sainte-Marguerite en 1817.
MARGUERITE DE CORTONE (sainte), religieuse de l’ordre de Saint-François, née à Alviano (Toscane), morte en 1297. Elle mena
d’abord une vie scandaleuse et se livra à la
plus honteuse débauche, puis se convertit, dit-on, à la vue du cadavre de son amant à moitié rongé par les vers, et s’adonna, dès lors, à toutes les pratiques de la plus ardente
dévotion. Après une épreuve de trois ans, elle entra en religion et se rendit célèbre par ses austérités. Elle fut canonisée en 1728, par Benoît XIII. L’Église l’honore le 22 février.
Marguerite de Cortone (SAINTE), tableau du Guerchin ; musée du Vatican. La sainte, vêtue d’une robe grise, les mains jointes, les yeux levés au ciel, les lèvres entr’ouvertes, prie avec une ardente ferveur et semble implorer le pardon de ses péchés. Sa tête, autour de laquelle brille une vague auréole, se détache sur un fond de muraille sombre ; à gauche s’élève une colonne de marbre rouge foncé et se déroule un fond de paysage où l’on aperçoit une église sur une colline. Au ciel sont deux petits anges, qui contemplent la sainte. Ce tableau est d’une exécution forte, d’un coloris très-harmonieux.
Une curieuse fresque, malheureusement très-altérée par le temps, exécutée sous le portique d’entrée de l’église consacrée à sainte Marguerite dans sa ville natale, nous montre cette sainte reconnaissant son ancien amant dans un cadavre. La Mort de sainte Marguerite de Cortone a été gravée par Lorenzini, d’après Lanfranc. Une figure de cette sainte a été gravée par Corn. Cort, d’après A. Tempesta.
MARGUERITE (sainte). V. plus loin Marguerite, reine d’Écosse.
MARGUERITE-THÉRÈSE D’ESPAGNE, impératrice d’Allemagne, née en 1651, morte en 1673. Elle était fille de Philippe IV, roi d’Espagne, et de Marie-Anne d’Autriche, et, par conséquent, sœur de Charles II et de Marie-Thérèse, femme de Louis XIV. Elle fut mariée, en 1666, à l’empereur Léopold Ier. Cette princesse occupe, par sa naissance et son mariage, une place importante dans l’histoire de la succession d’Espagne. On a d’elle plusieurs portraits par Velazquez ; le plus célèbre,
celui qui est connu sous le nom de Las Meninas, se trouve au musée de Madrid. V. INFANTE.
MARGUERITE DE FRANCE, reine d’Angleterre, puis de Hongrie, née en 1158. morte à Acre (Palestine) en 1196. Elle était fille du roi de France Louis VII, et elle fut fiancée, n’ayant encore que six mois, au fils aîné du roi Henri II, qui l’emmena en Angleterre. Pour s’emparer du Vexin normand donné en
dot à Marguerite, Henri II maria, en 1160, la
princesse encore dans l’enfance avec son fils,
Henri au Court-Mantel. Cette union précipitée
faillit amener la guerre entre le roi de
France et le roi d’Angleterre. En 1172, Henri,
ayant associé son fils au trône, fit couronner
la jeune Marguerite à Winchester. Cette princesse
subit une assez longue captivité, lors de la révolte de son mari contre Henri II. Devenue veuve en 1183, elle se remaria, en 1185, avec le roi de Hongrie Bêla III, qui mourut en 1196. Cette même année, elle fit un voyage dans la terre sainte et succomba dans la ville d’Acre.
MARGUERITE DE FRANCE, reine d’Angleterre, morte en 1317. Fille de Philippe III, elle épousa, en 1299, le roi d’Angleterre, Edounard I{{e}r après la conclusion du traité de Montreuil-sur-Mer qui restituait au roi de France la plupart des provinces que les Plantagenets possédaient dans notre pays. En
1307, Marguerite devint veuve et, l’année suivante,
sa nièce Isabelle épousa le nouveau roi d’Angleterre, Édouard IV.
MARGUERITE D’ANJOU, reine d’Angleterre, fille du roi René, née en 1429, morte en 1482. Mariée en 1445 à Henri VI, roi d’Angleterre,
elle prit sur son faible époux un
ascendant absolu, et ne tarda pas à être la
véritable souveraine du royaume. Marguerite
s’unit aussitôt avec le cardinal de Beaufort
et le marquis de Suffolk contre l’ancien régent Glocester, dont elle redoutait l’influence.
À la suite d’une réunion du Parlement,
le duc de Glocester fut arrêté (11 février
1447), et peu après il mourait dans sa
prison. Marguerite dirigea alors les affaires
publiques avec Suffolk, fonda le Queen’s collège
à l’université de Cambridge, établit des
manufactures de laine et de soie, et fit de
grands efforts pour développer l’industrie de
la Grande-Bretagne.
Cependant, à l’exception de Calais, Charles VII avait repris en France toutes les possessions qui étaient alors entre les mains des Anglais (1453). La nouvelle de ces échecs produisit une vive irritation en Angleterre. On en fit retomber la responsabilité sur le marquis de Suffolk et sur la reine elle-même, dont le père, le roi René, venait d’être remis en possession du Maine et de l’Anjou. L’ambitieux duc d’York, qui aspirait au trône, profita de ces circonstances pour augmenter le nombre de ses partisans, préparer la ruine de Suffolk et exciter des mouvements populaires Malgré l’appui du roi et de la reine, Suffolk, décrété d’arrestation par la Chambre des communes, fut enfermé à la Tour de Londres, d’où il ne parvint à s’échapper que pour être massacré par le peuple (1450). Cette même année eut lieu la formidable insurrection fomentée par John Cade, qui s’empara de Londres et força le roi et la reine à s’enfuir. Cette insurrection venait d’être comprimée lorsque le duc d’York chercha à renverser Somerset, qui avait succédé à Suffolk dans la direction des affaires. La lutte commença entre eux dans l’assemblée tenue à Temple-Gardens, où, pour la première fois, les partis en présence prirent pour signe de ralliement une rose rouge et une rose blanche. La reine se mit à la tête du parti de la Rose rouge, pendant que les adhérents du duc d’York formaient le parti de la Rose blanche. En 1452, le duc d’York leva l’étendard de la révolte en déclarant, toutefois, qu’il prenait les armes, non contre le roi, mais pour obtenir le renvoi de Somerset. Ayant obtenu du roi l’arrestation de ce dernier, il déposa les armes, et consentit à prêter serment de fidélité au roi ; mais, peu après, ce dernier fut frappé d’aliénation mentale. Marguerite mit au monde, sur ces entrefaites, un fils, Édouard prince de Galles (13 octobre 1453), et demanda au Parlement de lui conférer les pouvoirs nécessaires pour gouverner au nom de son mari. Mais le Parlement, au lieu d’accéder à sa demande, conféra au duc d’York le titre de protecteur du roi. Deux mois plus tard le roi, ayant recouvré la raison, prononça à l’instigation de sa femme la dissolution du Parlement et réintégra Somerset dans ses dignités. Alors la guerre civile éclata. Le 24 mai 1454, l’année royale fut battue par les troupes du duc d’York à Saint-Albans, où le roi fut blessé et où Somerset trouva la mort. Rentré en triomphateur à Londres, le duc d’York reprit son titre de protecteur et confina la reine et le roi dans le château d’Hertford. Mais, peu après, Marguerite parvint à rallier ses partisans, se rendit dans le centre de l’Angleterre, où sa beauté, son énergie provoquèrent en sa faveur la sympathie du peuple, et fit rendre à son mari l’intégrité d’un pouvoir qu’elle exerça en réalité. Elle songea alors à mettre un terme à la guerre civile et convoqua dans ce but à Londres les chefs des deux partis (1458). Un accord y fut en effet conclu, et l’on vit la reine donnant