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maie opus {Paris, 1498) ; Sermones dominicales et alii (Paris, 1515) ; Sermones de sanctis (1518) : la Récalation de la très-pieuse passion de Notre-Seigneur (Paris, in-8"). Citons encore île lui : Sermon prêché le V dimanche de carême en la ville de Bruges, l’an 1500 (in-4u), en français gothique, où sont marqués en marge, par des heml hem ! les endroitS’OÙ le prédicateur s’était arrêté pour tousser ; VExemplaire de confession avec la confession générale (Lyon, 1524) ; Traité envoyé à ptusieurs religieuses pour les instruire et exhorter à se bien gouverner (Paris, in-8°). On trouve de lui, dans un recueil de pièces in-8», une chanson qu’il chantait dans un sermon prêché à Toulouse en 1502.


MAILLARD (Sébastien), général autrichien, né à Lunéville en 1746, mort à Vienne en 1822. Il était fils d’un médecin du roi Stanislas, prit du service en Toscane, puis en Autriche, se distingua au siège de Belgrade (1789), à celui de Maastricht (17U4), fut chargé quelque temps après de diriger les travaux du canal de la Neustadt et devint successivement colonel (1797), major général (l80i) et feld-maréchal lieutenant (1812). Ce savant officier donna pendant longtemps des leçons de science militaire aux archiducs. Nous citerons de lui : Démarques sur la méthode de fortifications par Cantot ; Mécanique des voûtes ; Méthode nouvelle pour traiter la méca~ vique (Vienne, 1800, in-8°) ; Mémoire sur la théorie des machines à feu (1783, in-4<>) ; Théorie des machines mues par la force de la vapeur de l’eau (1784, iu-4").


MAILLARD (Stanislas-Marie), révolutionnaire fameux, passé depuis longtemps à l’état de légende et dont nous allons essayer de reconstituer la vraie physionomie, détigurée dans toutes les biographies, et même dans toutes les histoires de la Révolution, sans en excepter M. Thiers, historien impérial bien plus que national. C’est ainsi qu’on le représente généralement comme un ancien huissier au Châtelet, né à Paris, puis réduit, après la Révolution, à changer de nom, mourant de misère sous l’Empire (d’autres disent même sous la Restauration). Rien de tout cela n’est vrai : Maillard est né à Gournay-en-Bray (Seine-Inférieure) le 11 décembre 1763, et il est mort à Paris d’une phthisie pulmonaire, à peine âgé de trente et un ans, le 26 germinal an II (15 avril 1794). Nous avons sous les yeux son acte de naissance et son acte de baptême. Son parrain était maître François-Ignace Lemercier, docteur en médecine, ancien médecin des hôpitaux militaires et pensionné de la ville de Gournay. Sa marraine était une dame Marie Soymier, demeurant à Louviers. Quant à l’acte de décès, le voici tel qu’il est consigné sur les registres de l’état civil de Paris :

■ Ou 26 avril an II (15 avril 1794), décès de Stanislas Marie Maillard, âgé de trente et un ans, natif de liournay (Seine-Inférieure), domicilié h Paris, place de la Maison-Commune, no 57, section des Arcis, marié à Angélique Parrède, ■

Maillard était le cinquième fils d’un marchand, d’un boutiquier. Un de ses frères, plus âgé que lui de six ans, et dont les prénoms étaient Jean-Bapliste-François-Thomas, vint s’établir praticien à Paris et fut reçu huissier à cheval au Châtelet en 1778. Stanislas, venu jeune dans la capitale, travailla dans l’étude de son ainé, mais ne fut jamais lui-même huissier. Un autre Maillard figure aussi, de 1765 k 1788, dans les almanachs royaux comme huissier aux requêtes de l’hôtel ; plusieurs historiens, notamment M. Granier de Cassagnac, dans son Histoire des Girondins et des massacres de septembre, ont également confondu celui-là avec Maillard le grand révolutionnaire, sans se donner la peine de voir que ce dernier, né en 1763, ne pouvait dé■ cemineut être huissier en 1765. Enfin un troisième Maillard a été membre, puis président du département de Paris en 1702-1794. Malgré les initiales de ses prénoms, E.-J.-B., qui précèdent toujours son nom, malgré la différence des écritures, on a pris souvent la signature de celui-ci pour celle de Stanislas Maillard, dont les autographes sont cepen, dant bien connus.

" À l’époque de la Révolution, Stanislas

j avait un peu plus de vingt-cinq ans. On n’a

1 pas de détails sur son intérieur. Tout ce

qu’on sait, c’est qu’il se maria le 5 juin 1792,

J à la paroisse Saint-Sauveur.

Le premier événement auquel on le voit participer activement est la prise de la Bastille. Ce jeune homme aux, cheveux noirs, aux traits accentués, pâle et souffrant déjà d-3 la maladie de poitrine qui devait l’emporter (car, autre singularité, Maillard, le farouche Maillard était poitrinaire), ce clercda basoche était au premier rang des citoyens devant la vieille forteresse, tenant le drapeau et donnant l’exemple de la résolution. Quand une partie de la garnison demanda à capituler, on tendit une longue et « troite planche sur le fossé ; un homme s’y aventure et tombe frappé d’une balle, car le feu n’était suspendu qu en cet endroit. Maillard s’élance alors, malgré les balles, saisit le projet de capitulation, qu’on lui passe à travers un créneau, et le remet à Hulin, qui en donne lecture a haute voix. En ce moment, le petit pont-levis fut abaissé et il y eut dans l’intérieur une lutte meurtrière dont Maillard partagea tous les dangers sans re MAIL

cuier d’une semelle. Il fut un de ceux qui arrêtèrent de Launay. Sans entrer dans plus de détails, rappelons seulement qu’il figure dans tous les récits du temps parmi ceux qui jouèrent le rôle le plus décisif et le plus brillant, les Hulin, les Arné, les Élie, les Dubois, les Cholat, etc., etc.

On sait que, dans les jours qui suivirent la victoire populaire, les héros de l’insurrection devinrent la providence de la ville ; eux seuls avait une autorité morale et pouvaient être obéis. Aussi formèrent-ils un corps officieux dont Hulin fut le commandant et Maillard le capitaine, et qui rendit des services qu’on a trop oubliés. C’est ainsi qu’une agitation inquiétante s’étant produite à Montmartre parmi les milliers d’ouvriers sans travail concentrés dans les ateliers de charité, les vainqueurs de la Bastille l’apaisèrent par de fraternelles exhortations.

Aux journées d’octobre, le rôle de Maillard s’agrandit. Une armée de femmes soulevées par la cherté des subsistances, — on mourait littéralement de faim dans les faubourgs

— avaient envahi l’Hôtel de ville ; la garde . nationale était impuissante pour résister à l’étrange sédition. Maillard accourt, pénètre à grund’peine dans la maison commune et harangue les femmes, qui, l’ayant reconnu pour un des vainqueurs de la Bastille, l’écoutent avec quelque intérêt, sans toutefois que leur colère en soit apaisée. Dans un accès de furie bizarre, ces affamées voulaient mettre le feu aux archives de la ville ; Maillard se jette courageusement au milieu de la mêlée, arrache des mains de deux de ces pauvres insensées les torches incendiaires et sauve ainsi le précieux dépôt. Puis, par une inspiration soudaine, il engage toutes ces malheureuses à aller à Versailles porter leurs réclamations devant l’Assemblée nationale et devant le roi. Il prend un tambour, se place à la tête des femmes et les entraîne ainsi sur la route de Versailles’. Ramener le roi à Paris, au foyer même de la Révolution, c’était une idée populaire, et très-clairvoyante en sa naïveté. Mais si Maillard n’a été dans cette circonstance que l’interprète du sentiment de la foule, il n’en a pas moins, par son initiative et sou sang-froid, détourné l’orage de la capitale et préservé les précieuses archives de l’Hôtel de ville. On peut voir tout le détail de sa conduite dans la fameuse procédure du Châtelet sur les journées des 5 et 6 octobre.

Arrivé à Versailles, Maillard est introduit dans l’Assemblée, suivi de quinze femmes. Il expose en termes éloquents, mesurés et avec convenance la situation malheureuse du peuple de Paris, causée par la cherté du pain, demande la nomination d’une députation pour engager les gardes du corps à prendre la cocarde nationale, réclame l’éloignement du régiment de Flandre, etc. L’Assemblée accueillit ces demandes avec intérêt et nomma une députation, qui se rendit immédiatement auprès du roi. Toutes les femmes voulurent alors entrer dans l’Assemblée, mais Maillard les contint. Il revint ensuite à Paris, rumenant un assez grand nombre de femmes, et s’attacha alors à calmer les esprits par la nouvelle de l’acceptation des décrets et des mesures prises ou du moins proposées pour assurer les subsistances. Il ne prit donc aucune part à la tuite des événements qui se passèrent à Versailles ; et l’on doit reconnaître que, dans cette journée, il a joué un rôle révolutionnaire, sans doute, mais non pas un rôle anàrchique, et sous plusieurs rapports ce fut un rôle très-utile. La Commune, très-bourgeoise alors, en jugea ainsi, puisqu’elle trouva à propos de lui adresser des félicitations.

En 1790, il exerçait la modeste profession d’agent d’affaires et il avait été élu capitaine de la garde nationale. Chargé de distribuer les fourniments aux vainqueurs de la Bastille, il eut à ce sujet des altercations avec quelques-uns d’entre eux, ce qui ne manque jamais d’arriver dans des cas semblables. Une plainte fut même déposée contre lui ; mais l’affaire n’eut aucune suite, et l’on ne voit rien qui puisse faire soupçonner sa probité. Il eut aussi muille à partir avec Marat, qui l’avait accusé assez légèrement d’être un des mouchards de La Fayette, mais qui, après examen, se rétracta pleinement (v. l’A nu du peuple du 21 janvier.1791, no 347).

Maillard prit à la révolution du 10 août une part active, mais sur laquelle on n’a aucun détail précis.

Nous voici arrivés au drame sanglant de septembre, dont l’odieux a été rejeté en partie sur sa mémoire, car lui seul est nommé parmi les acteurs principaux ; les autres sont anonymes. Qu’on remarque bien que nous ne voulons rien atténuer, mais simplement examiner froidement, autant que cela est possible en un sujet si douloureux. Beaucoup d’historiens rapportent qu’au début des exécutions, au moment où la foule achevait de massacrer dans la cour de l’Abbaye les prêtres transférés de la mairie, Maillard se serait écrié : • Il n’y a plus rien à faire ici ; allons aux Carmes I •

Outre que ce fait n’est corroboré par aucun document sérieux, il parait bien invraisemblable, puisque l’horrible besogne était à peine commencée, puisque la prison était pleine et qu’on n’avait encore tué que quelques détenus amenés dans un fiacre, puisque enfin dans une heure Maillard viendra siéger

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au guichet de l’Abbaye comme juge : il y avait donc, au contraire, tout à faire, s’il est permis de répéter cette horrible expression. Il nous paraît également douteux qu’il ait participé au massacre des Carmes. Quoi qu’il en soit, ce qu’on sait de certain, c’est qu’il était devant 1 Abbaye au moment où la foule, ivro de fureur, se préparait à enfoncer les portes pour mettre a mort tous les détenus. Soit qu’il ait agi spontanément, soit qu’il se fut à l’avance concerté avec le ministre de la justice, Danton, ou avec les membres de la Commune, pour tâcher d’établir un semblant de justice dans les exécutions et arracher quelques victimes à la furie populaire, il se jeta courageusement dans le torrent, harangua la multitude, et faisant remarquer qu’il pouvait y avoir parmi les coupables quelques innocents qu’il importait de préserver, pour l’honneur du peuple, il proposa de nommer un tribunal populaire chargé de vérifier les motifs de l’incarcération de chacun des détenus et de statuer ensuite sur leur sort. Sa motion fut admise, et lui-même désigné comme président du redoutable tribunal, composé d’une douzaine de juges, et qui s’installa dans une salle basse qui n’était séparée de la rue . Sainte-Marguerite (aujourd hui rue Gozlin) que par la porte de la prison. Nous ne pouvons entrer ici dans les détails qui trouveront naturellement leur place à l’article consacré aux massacres de Septembre ; rappelons seulement que les prisonniers étaient successivement amenés devant la commission, où ils subissaient un interrogatoire : ceux qu’elle déclarait coupables étaient livrés aux tueurs, et ceux qui étaient acquittés, reconduits chez eux comme en triomphe et aux cris de vive a. nation ! C’est ainsi que quatre-vingt-neuf détenus furent massacrés et soixante dix-neuf rendus à la liberté. Six femmes eurent à comparaître devant Maillard ; toutes furent sauvées, et il est vraisemblable que Mmc de Lamballe eût été préservée également si elle avait été a l’Abbaye.

Et maintenant, il est équitable de faire remarquer que, de toutes les prisons de Paris où se portèrent les égorgeurs, c’est à l’Abbaye que l’on parvint à sauver le plus de monde ; il est incontestable que, sans l’organisation du tribunal, pas un seul prisonnier peut-être n’eût échappé au massacre.

Il n’est pas sans intérêt non plus de faire observer qu’aucun de ceux des royalistes de l’Abbaye qui ont survécu et qui ont laissé des mémoires, tels que Jourgniac Saint-Méard, la marquisse de Fosse - Landry, etc., ne charge Maillard et ne lui fait jouer le rôle odieux qui lui est attribué par la légende. Il favorisa visiblement Sombreuil, attendri peut-être par les larmes de l’illustre fille du vieux gouverneur des Invalides, et il résuma son opinion par ces nobles paroles : Innocent ou coupable, je crois qu’il ■serait indigne de la majesté du peuple de tremper ses mains dans le sang de ce vieillard.

Il sauva aussi beaucoup de Suisses du 10 août, transférés du Palais-Bourbon à l’Abbaye, et lui-même a rappelé cet épisode dans une réponse qu’il fit à des attaques de Fabre d’Eglantine : < Dans certains journaux, dit-il, voués à l’aristocratie expirante, Fabre me fait appeler le SepiembrUcur. Il se trompe grossièrement ! Il m’est aisé de prouver que, sans moi, toutes les personnes renfermées dans l’Abbaye eussent été complètement égorgées et pillées ; que sans moi encore, les deux cent trente-huit Suisses que l’infâme Pétion y fit transférer du ci-devant Palais-Bourbon, dans le moment où il était impossible de contenir la fureur du peuple, l’eussent été également. Je fus assez heureux pour obtenir leur grâce du peuple. Je les ai conduits moi-même à la maison commune, ce qui est constaté par un ordre que je sus me faire donner et que je conserve bien précieusement, etc. »

Cet écrit, publié à une époque où il pouvait être démenti, est un curieux témoignage de la conduite de Maillard dans ces terribles circonstances. Investi d’un redoutable ministère, il n’hésite pas à l’accepter, il arrache à une mort certaine une foule de malheureux, souvent au péril de sa propre vie. La main sur la conscience, " pouvait-il tenter de les sauver tous sans risquer de les perdre tous ?

Pendant les massacres, il avait eu le grand soin de faire déposer les effets des victimes dans une pièce de la prison où personne n’avait accès, de manière que ni lui ni d’autres ne pussent être accusés d’avoir rien soustruit. Le 4 et le 5, il fit inventorier ces effets par une vingtaine de citoyens qui l’avaient aidé à les sauver du pilluge. Il fit dresser procèsverbal, mettre les scellés, plaça des sentinelles à la porte et ne rendit ce dépôt que sur un ordre en bonne forme de.la municipalité. Tout cela est établi par les pièces qui sont aux Archives nationales.

Maillard prit, à ce qu’il paraît, une part assez active aux mouvements contre les girondins (31 mai-2 juin 1793). Le 4 août suivant, il reçut du comité de Sûreté générale la mission d’organiser une sorte de police révolutionnaire dont le but était de surveiller les suspects, de découvrir les fabrioateurs de faux assignats et d’assurer l’arrivage des subsistances à Paris. Qu’on n’oublie pas que ces fonctions de police étaient alors considérées comme un service patriotique. Les hommes de Maillard furent accusés de divers excès et abus d’autorité, et lui-même

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fut arrêté, mais remis en liberté vingt-cinq jours après. Ses coopérateurs, vraisemblablement calomniés, furent représentés comme de bons pères de famille et de bons citoyens dans un rapport fait par Vouland à la Convention nationale et reçurent une indemnité pour la mission qu’ils avaient remplie (Moniteur du 3 janvier 1794).

Maillard était un homme d’action, nullement un homme de parti. Néanmoins, il se rattachait aux hébertistes ; aussi fut-il attaqué violemment par les dan ton is tes et spécialement par Fabre d’Eglantine, qui l’enveloppa dans sa dénonciation contre Vincent et Konsin. Un nouveau décret d’arrestation fut rendu contre lui, puis encore rapporté. D’ailleurs, ce décret n’avait pu être mis à exécution, vu l’état maladif de Maillard. Quelque temps après, il mourut de la phthisie dont il souffrait depuis longtemps. En-réponse aux accusations de Fabre d’Eglantine, il avait publié un écrit devenu fort rare, et dont nous avons plus haut cité un passage : le Voile tombe et le calomniateur est décou'vert (brochure de 8 pages in-4°).

Telle fut la vie de ce personnage moins étrange et moins mystérieux qu’on ne l’a représenté jusqu’ici. L’histoire a peut-être le droit de le juger sévèrement, pour s’être trouvé mêlé à des actes odieux ; mais on ne doit pas oublier, comme nous l’avons dit plus haut, que, sans l’espèce de tribunal organisé et présidé par lui a l’Abbaye, le nombre des victimes eût certainement été plus considérable, et que peut-être pas un prisonnier n’eût échappé à la furie des massacreurs.


MAILLARD (Marie-Thérèse Davoux, dite Mlle), célèbre cantatrice, née à Paris en 17GB, morte dans la même ville en 1818. Elle apprit, dans son enfance, la musique sous la direction du professeur Corretta, mais elle fit peu de progrès. Un beau jour, elle s’éprit d’un amour immodéré pour la danse. Sur ses instances, sa famille la lit admettre à l’écolo de danse de l’Opéra. À douze ans, elle passait pour une merveille. Peu après, elle obtint un brillant engagement pour la Russie, se rendit àSaint-Pêteisbourg et y resta deux ans. Quelque temps après son retour à Pai is (1780), M’ie Maillard, se trouvant dans un cercle intime, fut priée de chanter. Elle s’exécuta de bonne grâce et révéla, à ses auditeurs, stupéfiés, un organe admirable. Berton, directeur de l’Opéra, présent à cette réunion, s’écria • qu’il n avait jamais rien entendu de plus beau, i et se mit presqu’aux genoux de la diva inconsciente, non moins surprise que ses auditeurs, pour la décider à entrer à 1 école de chant de l’Opéra. Après deux ans de travail assidu, M’te Maillard débuta avec un éclatant succès par le rôle de Colette du Devin de village. M™e Saiut-HuberLi la prit en affection, lui donna des conseils et, charmée des succès et de la docilité de sa protégée, elle lui céda une partie de ses plus beaux rôles dans les opéras de Gluck. M’e Maillard y fit merveille et fut déclarée inimitable. Douée d’un très-grand instinct musical, la chanteuse comprenait au vol, pour ainsi dire, les intentions du maître. Un geste, un regard, un mot suffisaient pour qu’elle donnât immédiatement., à sa phrase 1 expression voulue. Ses principales créations furent Armide et Jphigénie en Tauride. Sa voix admirable, sa beauté, sa taille imposante, son geste majestueux et en même temps sobre et vrai, son énergie, sa chaleur communicative, le charme qui s exhalait de sa personne, faisaient de M’ie Maillard la plus magnifique personnification du grand art lyrique. Son admiration pour Gluck ne la rendait cependant point exclusive ; elle voulut représenter la Didon de Piccinni, et son triomphe dans ce rôle acquit de telles proportions, qu’à la soixantième représentation la salle était aussi comble qu’à la première soirée. I/écube, de Granger de Fontenelle, et Scmiramis, composée expressément par (Jutel à son intention, mirent le comble à sa renommée.

Après trente ans de services non interrompus à l’Opéra, MH« Maillard prit sa retraite. Sa dernière création avait été le rôle de la grande Vestale dans l’ouvrage de Sponti ni.

Dans la vie privée, la cantatrice déroutait quelque peu le public par ses allures excentriques. Souvent il lui arriva de revêtir le costume masculin et d’accepter toutes les conséquences de sa transformation. Une affaire d’honneur même ne la faisait pas reculer ; car la chronique du temps rapporte qu’un officier ayant, au bois de Boulogne, et en présence de MU» Maillard, déguisée en homme, insulté une dame qu’il accusait de l’avoir trompé, la déesse d’opéra donna de la cravache à travers la figure du malotru. Un duel au pistolet s’ensuivit, et MHe Maillard blessa son adversaire, qui, apprenant le sexe de son antagoniste, quitta précipitamment Paris.

Mlle Maillard s’était, à sa sortie de l’Opéra (1813), créé un salon artistique dans lequel se pressaient toutes les célébrités de l’époqu«. Malheureusement, cette brillante position n’eut qu’une courte durée. Des revers de fortune, compliqués de chagrins domestiques, lui suscitèrent une maladie de langueur qui la conduisit au tombeau à l’âge de cinquante-deux ans.

Mlle Maillard a été une des rares indivi-