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ganter les poids des atomes. En d’autres termes, les poids atomiques des gaz simples doivent être proportionnels aux densités. » (Wùrtz, Chimie moderne.)

Les densités des gaz sont rapportées à celle de l’air ; pour les ramener à celle de l’hydrogène, il suffit de multiplier les densités des gaz rapportées à celle de l’air par

—l-+- = H, U

0,0693

qui est le rapport de la densité de l’air à celle de l’hydrogène. Avec la densité de l’hydrogène pour unité, nous voyons que les densités et les poids atomiques sont représentés à peu prés par les moines nombres. Quelques exemples le prouveront.

Densité par Poids

rapport à II..atomique.

Hydrogène.’ 1 1

Oxygène....... 15,0 1G

Azote 14,0 H

Chlore 32 32

De plus, pour tous les corps simples pris à l’état de gaz ou de vapeur, on constate sinon l’égalité, au moins un rapport simple entre les densités rapportées à l’hydrogène et les poids atomiques. (Gay-Lussac.)

— Phys. Loi de Mariotte V, gaz.

— Astron. Loi de Kepler. V. planète.

Loi de Bode, V. planète.

— Théol. La loi est en opposition avec la grâce, le judaïsme en antagonisme déclaré avec la loi nouvelle. Toutefois, les premiers chrétiens ne soupçonnèrent pas cette opposition, et l’Église ne parut pas vouloir-s’y arrêter lorsqu’elle adopta les livres sacrés des Juifs et leur porta la même vénération qu’aux écrits des apôtres. Saint Paul le premier avait osé affirmer’ que lu loi, au lieu de donner la paix à l’Ame, lui apporte le trouble et la mène à la condamnation. D’après saint Paul, la loi n’a pas été donnée pour produire la justice, mais pour faire abonder le péché, pour convaincre l’homme de son impuissance et de sa corruption et le forcer à demander grâce au pied de la croix. La loi donne à 1 homme conscience de son péché en lui révélant la volonté divine ; puis, par cet inexplicable attrait’ qu’exerce sur notre nature le fruit défendu, chaque commandement, devient pour nous une invitation à l’enfreindre et une occasion de péché. La loi fait sentir à l’homme l’esclavage qui pèse sur lui et Son impuissance à s’en délivrer. Iïn face de la loi, une lutte douloureuse s’établit au fond de notre conscience, qui approuve la loi et nous ordoiïhe de l’accomplir, tandis que la puissance de la chair, plus forte que notre volonté, nous assujettit à son empire. De là cette contradiction vivante qui’ dévore l’homme et le désespère.

Telle est la théorie de saint Paul sur la loi, théorie quo les protestants acceptent avec empressement. Pour les protestants, la loi a sa vertu propre comme l’Évangile ; l’une nous fait connaître le péché, l’autre nous procure la grâce. En générât, les anciens théologiens de la Réforme reconnaissaient la distinction établie par Paul entre la loi et l’Évangile ; seulement les uns entendaient par la loi la partie morale de l’Ancien et du Nouveau Testament, c’est-à-dire la partie pratique du christianisme, tandis que les autres ne désignaient sous ce nom que la seule législation de Moïse. Cette confusion des mots donna lieu a des malentendus, d’où sortit la controverse antinomistique. Ce fut Jean Agricola qui la souleva vers le milieu du xvio siècle. Mélanchthon avait recommandé aux pasteurs évangéliques de commencer par prêcher la loi, afin n’inspirer aux pécheurs une crainte salutaire et de les amener par la terreur a confesser lejirs péchés et à s’en repentir ; puis, quand ils seraient ainsi humiliés, ce serait le moment de les relever de leur découragement et de calmer leurs angoisses en leur donnant l’assurance contenue dans l’Evangile que la grâce de Dieu, s’ils la demandent sincèrement, peut leur être donnée par le Christ. Agricola repoussa cette méthode avec beaucoup d’énergie et la signala même comme une déviation du christianisme. Il soutint que la religion chrétienne n’a rien à faire avec la loi, qui ne concerne que les magistrats civils ; que, pur conséquent, il n’appartient ni à la loi ni au Déculogue de prêcher la repentance, mais seulement à l’Évangile, qui nous raconte la passion et la mort du Pils de Dieu. Les orthodoxes, à leur tour, se récrièrent contre le3 prétentions d’Agricola et qualifièrent d’erreur pernicieuse une opinion qui, à tout prendre, semble ne reposer que sur une équivoque.

D’ordinaire les mystiques ont fait très-peu de cas de la loi. Parmi les théologiens modernes, on s’accorde à na lui reconnaître qu’une valeur temporaire et transitoire, et surtout on la considère comme spécialement appropriée aux besoins du peuple juif, auquel elle avait été donnée.

— Allus, littér. Des lois cl non du naiig,

Hémistiche resté célèbre de Caïus Gracc/ius, tragédie de Marie-Joseph Chénier, représentée au Théâtre de la République le 9 février 1792. Le" poëte l’a placé dans la bouche du tribun du peuple Caïus Graechus, à la fin de la deuxième scène du deuxième acte : Arrêtez : malheur a l’homicide 1

. Le sa : ig retombera sur sa tett perfide.

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De» lois et non du sany : ne souillez point vos mains-Romains, vous oseriez égorger des Romains ! Ah ! du sénat plutôt périssons les victimes ; Gardons l’humanité1, laissons-lui tous les crimes.

Ce cri : Des lois et non du sang ! parut une sorte d’épigramme violente à certains auditeurs, tout au moins sembla-t-il inopportun. Des protestations s’élevèrent de toutes parts et le poète fut accusé de modérantisme. Le parti de la réaction l’exploita à son profit, et le républicain’Chénier put voir qu on en faisait une parole de ralliement propre à jeter la terreur dans les âmes timides. On s’est plu à raconter que le conventionnel Albitte osa seul s’élever contre le public qui applaudissait avec transport, et que, jetant comme un forcené sa carte de représentant dans le parterre, il aurait riposté de sa place : Du sang et non des lois à cette parole : Des lois et non du sang ! C’est là, ainsi que nous l’avons déjà dit à notre article Graccuus, une pure légende. Albitte, à ces mots Du sang et non des lois, que certains spectateurs semblaient trop prompts à interpréter nu profit de leurs opinions personnelles, se leva des secondes loges où il était assis et ajouta : Le sang des criminels ! En cela, il ne disait rien de plus, lui, le représentant du peuple, que ce que disent chaque jour dans l’enceinte des tribunaux les magistrats partant au nom de la vin. dicte publique en un pays où la peine de mort n’a point été rayée encore de nos codes criminels ; mais la passion n’a d’yeux pour voir et d’oreilles pour entendre que ce qui lui plaît. Encore moins Albitte jeta-t-il sa carte de représentant dans la salle, ce qui eût été l’acte d’un fou. De la tragédie de Chénier, ces mots Des lois et non du sang ont seuls survécu. On les a cités frèquemmentdans le langage politique, soit à la tribune, soit dans le journal. Chénier en a fait l’épigraphe de sa pièce imprimée.

Loi (la), opuscule ’médical d’Hippocrate. L’auteur a surtout pour but de sauvegarder la dignité de la profession de médecin, d’en faire une profession à part, inaccessible au vulgaire ; il poursuit avec âpreté les ignorants et les charlatans. « La médecine, dit-il, est de tous les arts le plus relevé ; mais à cause de l’ignorance de ceux qui l’exercent et du peu de discernement de ceux qui jugent les médecins à la légère, elle est déjà rabaissée au-dessous de tous les autres, Voici, ce me semble, le principal motif de ce préjugé : c’est que là médecine est la seule profession dont le mauvais exercice n’est puni dans les villes que par l’ignominie ; mais l’ignorance ne blesse pas les gens qui en sont pétris ; car de pareilles gens ressemblent exactement aux figurants qu’on introduit dans les tragédies : comme ceux-ci ont le maintien, l’habit et le masque d’un acteur, mais ne sont pas des acteurs, de même il est beaucoup de médecins de nom et fort peu par les actes. »

Loi» (les), traité politique de Platon, faisant suite à sa République. 11 est divisé en douze livres.-L’illustre philosophe s’écarte en quelques points de l’idéal inaccessible qu’il s’était proposé dans son premier ouvrage ; par exemple, il ne parle plus de la communauté des femmes ni de la communauté territoriale ; il ne projette plus une régénération complète et se contente d’indiquer des réformes. Mais il maintient la violation de la liberté de conscience, en punissant l’incrédulité religieuse et, comme tous les anciens, soutient la nécessité de l’esclavage. Les douze livres des Lois peuvent se diviser en deux parties : les quatre -premiers servent d’introduction ; l’auteur y expose les principes généraux des lois, l’esprit qui doit y régner, la méthode qui doit présider à toutes les recherces que nécessite leur établissement. L’ouvrage véritable commence au cinquième livre et comprend, avec l’ordonnance extérieure de l’État et la répartition de la population, son organisation intérieure, c’est-à-dire, en premier lieu, la constitution politique et la composition du gouvernement ; en second lieu, la législation proprement dite avec le nombreux cortège de ses lois de toute espèce. Au neuvième livre, les lois sont établies sur leurs bases nécessaires et rattachées à un code pénal qui occupe les trois derniers livres et embrasse tous les grands délits politiques, civils, religieux, commerciaux et militaires.

Un des points de ressemblance du traité des Lois avec les institutions européennes, c’est que Platon y divise en classes les citoyens d’après leur fortune ; il semble présager ainsi le règne du cens. Dans la République, c’étaient la naissance.et la vertu qui servaient de base. Platon donne pour raison que la fortune étant le plus souvent le produit du travail, il y a lieu d’en tenir compte dans la constitution des sociétés. « Il serait facile, dit un des éditeurs de ce traité, M. H. Trianon, de signaler d’autres rapprochements non moins curieux. Par exemple : trois degrés de juridiction assez semblables a nos tribunaux de paix, de première instance et d’appel ; les citoyens admis h participer aux jugements en matière criminelle et même en matière civile, c’est-à-dire le jury ; une distinction entre les délits volontaires et invo.lontaires, prémédités et non prémédités ; les fautes paternelles ne retombant pas sur les enfants ; le meurtre d’un esclave, sans cause valable, puni comme le meurtre d’un citoyen.»

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M. Cousin a relevé quelques autres analogies entre notre législation et celle do Platon.

Loi* (prosopopée des), dans le Criton, célèbre passage d’un des plus célèbres dialogues de Platon. Socrate est en prison : le jour fatal approche et un de ses amis, Criton, le presse de se dérober par la fuite à une injuste condamnation. ■ Non, répond Socrate, je ne le veux, ni ne le dois.» Et il prouve que cette fuite serait un contre-sens dans sa vie, et une faiblesse inutile à soixante-onze ans ; enfin, une violation coupable de la loi de son pays, qui ordonnait que tout jugement rendu fût exécuté. C’est alors qu’il suppose, dans une admirable mouvement d’éloquence, jWein de grandeur sans déclamation, que les lois d’Athènes se présentent a lui au moment où il va quitter sa prison et l’apostrophent en ces termes :.

« Socrate, que vas-tu faire ? L’action que tu . prépares ne tend-elle pas à renverser, autant qu’il est en toi, et nous et l’État tout entier ? car quel État peut subsister quand les jugements rendus n’ont plus de force et sont iouïés aux pieds par les pàrtiouliers ?... N’est-ce pas à nous que tu dois la vie ? N’est-ce pas sous nos auspices que ton père prit pour femme celle qui t’a donné le jour ?., . »

Et elles continuèrent à lui prouver qu’il a tout reçu des lois, et qu’il leur doit le respect et l’obéissance ; car il a signé, pour ainsi dire, ce qu’on appelle aujourd hui le pacte social. « 11 était libre de quitter Athènes si les.lois de cette ville ne lui plaisaient pas. Il y est resté : c’est qu’il voulait jouir de leur bénéfice. D’ailleurs, qu’a-t-il k gagner à fuir ? Ne serait-il pas plus coupable que qui que ce.soit, s’il agissait avec une si honteuse lâcheté, lui qui parle sans cesse de vertu, de devoir, de justice ? Quel contraste entre sa conduite et sa doctrine I II se ferait tort a lui-même, il enlèverait ci son enseignement toute su valeur, par cette fuite indigne.

«0-Socrate, ajoutent les Lois dans la péroraison de leur admirable harangue, si tu fuis, tu nous auras pour ennemies pendant ta vie, et quand tu descendras chez les morts, nos sœurs, les Lois des enfers, ne te feront pas un bon accueil, car elles sauront que tu as voulu nous.détruire. Ah ! que Criton n’ait pas sur toi- plus de pouvoir que nous, et ne préfère pas ses conseils aux nôtres !■

Telle est cette magnifique prosopopée des lois, imaginée, sans doute, par Platon, mais bien digne pourtant du génie de Socrate, et tout à fait accommodée au ton à la fois simple et élevé des conversations dernières que ce sage eut avec ses amis dans sa prison.

Loi» (les), traité philosophique de Cicéron (composé l’an 701 de Rome). Comme Platon, Cicéron voulut ajouter un traité des Lois à son traité De la République. Trois livres à peu près intacts et quelques fragments des autres sont tout ce qui nous reste de cet ouvrage. Cicéron y développe surtout l’esprit dés lois romaines, comme devant être prises pour modèles ; il a adopté, comme Platon, la forme du dialogue. Il y figure lui-même avec son frère Quintus et Atlicus, leur ami commun ; les interlocuteurs discutent, un peu au hasard, divers points de philosophie et de jurisprudence. « 11 y a dé fort belles choses et d’un ordre très-élevé, dit M. Pierron, dans le premier livre, où Cicéron établit les fondements du droit et de la loi, et où il donne son opinion sur cette question du souverain bien, tant débattue par les anciens philosophes. Le premier et le second livre débutent par un préambule charmant, qui rappelle, Sans trop de désavantage, les pages analogues dans Platon. » Lactance, saint Augustin et Macrobe nous ont conservé des extraits précis, qui constatent que cet ouvrage comprenait au moins cinq livres. On suppose qu’il en contenait six, dont le premier traitait du droit naturel, le second du droit ds la religion et dés pontifes, le troisième de la distribution du pouvoir, le quatrième du droit politique, le cinquième du droit criminel et des jugements, le sixième du droit civil.

Dans son ensemble, ce traité ostremarquable, ’ en politique, par l’idée que l’auteur y développe de la pondération des pouvoirs. Quoiqu’il penche à donner l’autorité au sénat et aux chevaliers, Cicéron ne pousse pas à l’extrême les prétentions du parti aristocratique, soit par modération, soit parce désir dé popularité qui le travailla toute sa vie, 11 défend de temps à autre les droits de la démocratie, tels qu’on les comprenait à Rome. Du reste, l’insuffisance de certaines parties capitales et le manque do développement font supposer que ce traité n’était qu’une ébauche.

Loi agraire (la), discours politiques de Cicéron, prononcés la première année de son consulat (an de Rome 090). Ces discours sont au nombre de trois ; nous ne possédons que des fragments du premier ; le second est un des chefs-d’œuvre oratoires de Cicéron. P. Servilius Rullus, tribun du peuple, avait fait adopter, l’année précédente, une loi agraire qui était la terreur du sénat et des patriciens. Le principe en était excellent et à peine discutable ; niais, pour l’application, le tribun avait proposé des mesures dictatoriales et arbitraires. Cicéron saisit habilement ce défaut. Rullus voulait que l’on suspendit l’action des lois, que l’on nommât des décemvirs chargés de vérifier la situation des possesseurs de terres, d’opérer une répartition nouvelle, do faire rendre des comptes aux

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généraux, d’établir des colonies, etc. Les décemvirs devaient être exonérés dé tout contrôle de la part des patriciens. C’était trop demander à la fois. Dans son.premier discours, prononcé devant le sénat, Cicéron s’engagea à obtenir le retrait de cette loi. Dans le second, prononcé devant le peuple, il attaqua directement Rullus. Tout en paraissant se montrer favorable à la loi agraire, sans quoi il ne lui eût pas été possible de continuer, il en attaqua toute l’économie et la démolit pièce à pièce. Rollin, dans son Traité des études, a fort admiré, au point de vue oratoire, la suite d’idées et d’arguments, que ce discours-présente. C’était, en efl’at, chose difficile de, forcer le peuple à subir-une critique aussi implacable d’une loi qui lui était chère, et de ly forcer tout doucement, en. ayant l’aiv d’entrer dans ses vues. Devant ce peuple amoureux de la légalité, Cicéron n’eut qu’à faire ressortir le caractère dictatorial des mesures, proposées, et k laisser soupçonner, gratuitement peut-être, que c’était non dans l’intérêt du peuple, mais dans son intérêt personnel, pour s’enrichir lui et ses créatures, que Rullus avait mis en avant sa loi agraire.,11 est vrai que Rullus avait eu hâte de se faire nommer l’un des décemvirs. Cicéron sut tirer parti de cette imprudence : « Qui a porté la loi ? dit-il ; Rullus. Qui a empêché une grande partiédu peuple de donner ses suffrages ? Rullus. Qui a présidé aux comices ? Rullus. Qui a convoqué les tribus qu’il voulait, les ayant’tirées au sort sans surveillance ? Rullus. Qui a nommé les décemvirs a. son idée ? Le même Rullus. Qui a-t-il nommé le premier ? Encore Rullus. Certes, il aurait peine à faire approuver tout ceci à ses propres esclaves, bien loin de vous le faire approuver à vous, les maîtres de toutes les nations. » Et c’est ainsi que tantôt s’indignant, tantôt plaisantant, ’Cicéron fit perdre de vue au ’peuple l’utilité de la loi, en lui mettant sous les yeux quelques illégalités et en’provoquant ses défiances sur des points qui no touchaient qu’à l’application dès mesures proposées. La loi fut rejetée, après un troisième discours qui résuma les deux autres.

" Loi ’pontificale, en latin Dictalus papm, ouvrage qui est une sorte d’exposé’du droit des papes. Les doctrines et les tendances de l’Eglise romaine y sont résumées en Vingt-sept ■sentences, qu’il est bon de connaître. Quelle est l’origine de ces sentences ? Les uns, et à leur tête l’annaliste ultramontain Baronius (t. XVII), soutiennent qu’elles furent rédigées par Grégoire VII lui-même et adoptées par le concile qu’il réunit à Rome en 1070 ; les autres prétendent que le Dictalus papes est un extrait fait par quelqu’un des siens, un choix de propositions fondamentales prises dans ses lettres et dans ses discours. Cette dernière opinion est la plus vraisemblable ; mais on ne peut nullement admettre que ces sentences soient l’œuvre d’une époque postérieure, elles sont vraiment écrites sous la dictée du pape, du plus énergique et du plus ambitieux des’papes. Les voici : « Le pontife romain est seul avec raison appelé pontife universel, car seul il aie pouvoir de déposer les évêques et de les réconcilier avec l’Église. Dans les conciles, son légat est au-dessus de tous les évêques, et quand même il serait d’un rang inférieur, il peut prononcer contre eux la sentence de déposition. Ceux que le pape a excommuniés, nous ne devons pas même demeurer dans la même maison. Le pape seul a la faculté do faire de nouvelles lois suivant l’exigence du moment, de grouper les hommes d’une façon nouvelle, de faire d’un chapitre une abbaye, de partager en deux un diocèse trop riche, de réunir ensemble des diocèses trop pauvres. Lui seul dispose des insignes de la royauté. A lui seul les princes sont tenus de baiser les pieds. Le nom de pape est unique dans le monde ; personne quo lui ne peut le porter dans l’Église. Il peut déposer les empereurs, changer la résidence d’un évêque, et prendre au sujet d’une Église toutes les mesures disciplinaires qu’il lui plaira. Aucun concile ne porte le titre d’oecuménique sans son ordre. Les canons n’existent pas sans son autorité ; sa sentence ne peut être révoquée par nul autre que par lui. Il est élevé au-dessus de toute juridiction. Aucun tribuual.n’oserait condamner quiconque en appelle au siège apostolique. Les causes importantes de toutes les Églises doivent être remises à la décision de Rome. L’Église romaine ne s’est jamais trompée, et jamais, au dire de l’Écriture, elle ne se trompera. Tout pape ordonné suivant les règles est indubitablement placé au rang des saints par les mérites de saint Pierre. D’après l’ordre, et avec l’autorisation des papes, un inférieur peut- accuser son supérieur. Sans l’intervention d’un synode, le pape peut rétablir ou déposer les.évêques. Quiconque ne s’accorde pas avec l’Église romaine n’est pas catholique. Le pape a l’autorité de délier les sujets de leur serment de fidélité envers les mauvais princes. » Dans aucun monument, on ne voit s’affirmer plus nettement les prétentions de Rome à l’infaillibilité, a l’autorité absolue et sans contrôle, sur le spirituel et sur le temporel, sur l’Église et l’État. Le Dictatus papa nous donne l’expression franche et sans déguisement des tendances théocrutiques du xi« siècle. L’Église de Rome, qui n’a rien oublié, tient en réserve toutes ces armes rouillées, pour essayer d’en faire usage toutes les fois que les doctrines ultrumontaines parais-