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LAZZ

rait suspecter d’une bienveillance exagérée envers les artistes de son temps, avait pour le talent de Lazzarini une grande estime. ’..azzarini fut chargé d’exécuter, dans une calle du palais des doges, les peintures d’un arc de triomphe érigé en l’honneur de Monrosini. Parmi les autres œuvres dont il enrichit Venise, nous citerons : la Chute de la manne, h Saint-Jean-et-Saint-Paul ; le Ravissement de saint Paul, aSaint-Eustaohe ; Saint Laurent Giustiniani distribuant des aumônes, son chefd’œuvre, à l’église Saint-Pierre ; l’Adoration des mages, à Saint-Clément ; VAdoration du veau d’or, tableau excellent, à Saint-Michel de Murano ; une Sainte Cécile, àVicence, etc. Peintre de grand mérite, Lazzarini a réuni, avec autant de goût que de discernement, et dans des créations assez originales, les diverses qualités qui ont fait la supériorité des grands maîtres connus. Son dessin pur, élégant et grandiose parfois rappelle Vinci et Raphaël, mais sans servilité. Dans sa couleur, on retrouve Titien amoindri ; ses compositions s’inspirent de Carrache ; mais l’ensemble de tous ces éléments forme une peinture à part, celle de Lazzarini, qu’on ne saurait confondre avec nulle autre.

LAZZAIUM (Dominique), poète italien, né près de Macerata en 1668, mort à Padoue en 1734. Après avoir enseigné la jurisprudence et le droit canonique à Macerata, il occupa, en 1711, une chaire de littérature grecque et latine à l’université de Padoue. Il s’attacha» ramener la poésie italienne, tombée en complète décadence, vers l’imitation des grands écrivains toscans du xvie siècle, attaqua avec une grande âpreté l’enseignement des jésuites, et critiqua vivement la plupart des poëtes de son temps, ce qui lui fit beaucoup d’ennemis. Nous citerons de lui ; Oratio pro optimis studiis (Padoue, 1711) ; Utisse il douane (1720. in-S<>), tragédie imitée du grec ; la Sanese (1734), comédie ; Poésie (1730, in-8o), recueil de sonnets, de canzoni, etc. ; Osservaziani sopra la Merope di Alaffei ed altre opérette (1743, in-4o).

LAZZAIUM (Jean-André), peintre et écrivain italien, né à Pesaro en 1710, mort en 1801. Il étudia la peinture sous François Mancini, devint un peintre fort remarquable et s’attacha en même temps à des travaux d’érudition, dans lesquels il porta le goût le plus fin et le plus exercé, de sorte que le savoir de l’érudit se retrouve tout entier dans les œuvres du peintre. Lazzarini a laissé un nombre peu considérable de tableaux, remarquablement traités au point de vue du dessin, de la perspective, de la composition, mais dont le colons, en général, est faible. On regarde comme son chef-d’œuvre la Vierge avec sainte Catherine et le bienheureux Marco Fantuzzi, qu’on voit à Fualdo, près de Rimini. Ses Œuvres critiques et littéraires ont été réunies en 2 vol. (Pesaro, 1806). Elles accusent chez leur auteur une science profonde et le sens le plus exquis du vrai et du beau dans les arts. Ses Dissertations sur les diverses branches de l’art sont particulièrement estimées, et elles ont beaucoup servi à Algaroui pour écrire son Essai sur la peinture. Lazzarini enseigna gratuitement l’esthétique et la peinture, a l’Académie de Pesaro, de 1753 jusqu’à un âge très-avancé.

LAZZARONE s. m. (la-dza-ro-né — mot ital. dérivé du bas latin lazarus, ladre, lépreux, misérable). Sorte de commissionnaire napolitain qui vil dans un état de paresse et de misère : Le lazzarone qui a mangé sa polenta ne remuerait pas un sac pour tout l’or du monde. (Proudh.) Il PI. lazzaroni.

Encycl. Depuis plus de deux siècles, on désigne sous le nom de lazzaroni cette population nombreuse et insouciante qui encombrait les rues de Naples, particulièrement les larges dalles de la rue de Tolède, dormant ou se chauffant au soleil, sans domicile fixe, sans profession assurée, vivant au jour le jour dans les molles douceurs du far-niente. Les lazzaroni ne sortaient guère de leur oisiveté que pressés par la nécessité et pour se procurer le pain modeste qui suffisait à leur vie primitive. Leur métier le plus ordinaire était celui de pêcheurs ou de commissionnaires. Beaucoup d’entre eux ne se donnaient pas la peine d’acheter leur nourriture par le travail, et se bornaient à mendier. Souvent aussi, on trouvait dans cette populace endormie et sauvage le poignard complaisant du bravo. La nuit, la plupart d’entre eux couchaient en plein air, dans de grands paniers d’osier. Voici comment les caractérisait Dupaty, en 1785, dans ses Lettres sur l’Italie : « La plus grande partie du peuple ne travaille tout juste qu'autant qu’il faut pour ne pas mourir de faim. On appelle ces gens-la lazzaroni. Les lazzaroni ne font point de classe à part ; il y en a dans tous les états : ce sont tout simplement des fainéants. Au reste, s’ils travaillent moins, c’est qu’ils ont moins besoin de travailler pour vivre. Chez eux, ce n’est pas vice, c’est tempérance. Eh ! quel homme travaille sur la terre, si ce n’est pour ne plus travailler ? Quand un lazzarone a gagné pendant quelques heures de quoi vivre pendant quelques jours, il se repose ou se promène, ou se baigne : il vit. »

Ils étaient extrêmement nombreux à la fin du dernier siècle ; on en comptait jusqu’à 10,000 ; ils formaient alors une population redoutable, menaçante, malgré sa somnolence, indomptable dans les temps de révolution, mais qui n’a pas manqué d’un certain sentiment patriotique, et qui, comme il arrive quelquefois dans les classes les plus incultes, a su tourner à la défense de la liberté ou de l’indépendance nationale sa brutale énergie. Les lazzaroni ont une histoire. Tous les ans, ils choisissent un chef dit capo lazzaro. C’est à ce titre que Masaniello se mit à la tête de l’émeute de 1647, et força le vice-roi, duc d’Arcos, à le reconnaître comme gouverneur. Les lazzaroni jouèrent encore un rôle dans la campagne du général Championnet dans le royaume de Naples, en 1798. On sait que Ferdinand, roi de Naples, avait déclaré la guerre aux Français en les sommant d’évacuer l’État romain. Il s’était avancé sur Rome, à la suite d’une armée commandée par Mack et divisée en six colonnes. Après y avoir fait une entrée triomphale, le 29 novembre 1798, il avait été forcé par les revers de son général en chef, battu sur tous les points par Championnet, d’en sortir furtivement et de rentrer dans sa capitale. Dans cette extrémité, il eut l’idée insensée de donner des armes aux lazzaroni. On pouvait prévoir l’usage qu’ils en feraient. Le peuple, exaspéré des échecs essuyés par l’armée, accusait hautement la cour, criait à la trahison, et menaçait d’égorger les généraux et les ministres. Dès que les lazzaroni se furent partagé les dépouilles des arsenaux, ils se rendirent maîtres de Naples, s’emparèrent du roi et l’assassinèrent. La cour épouvantée passa en Sicile. Cependant Championnet marchait sur Naples ; il ne s’arrêta que devant la proposition d’un armistice qui lui fut faite par Mack, et qui stipula, outre une cession considérable de territoire, une contribution de 8 millions en argent. « Quand on apprit à Naples, dit M. Thiers, la nouvelle de l’armistice, le peuple se livra à la plus grande fureur, et cria plus vivement encore qu’il était trahi par les officiers de la couronne. La vue du commissaire chargé de recevoir la contribution de 8 millions porta la multitude aux derniers excès ; elle se révolta et empêcha l’exécution de l’armistice. Le tumulte fut porté à un tel degré que le prince Pignatelli, épouvanté, abandonna Naples. Cette belle capitale resta livrée aux lazzaroni. Il n’y avait plus aucune autorité reconnue, et on était menacé d’un horrible bouleversement. Enfin, après trois jours de tumulte, on parvint à choisir un chef qui avait la confiance des lazzaroni, et qui avait quelque moyen de les contenir ; c’était la prince de Moliterne. Pendant ce temps, les mêmes fureurs éclataient dans l’armée de Mack. Celui-ci fut obligé de chercher un refuge auprès des Français eux-mêmes et fut accueilli par Championnet avec une généreuse compassion. Cependant, l’expédition se poursuivit avec la même énergie. Championnet, autorisé par le refus fait à Naples d'exécuter les conditions de l’armistice, s’avança sur cette capitale, dans le but de s’en emparer. La chose était difficile ; car un peuple immense, qui, en rase campagne, eût été balayé par quelques escadrons de cavalerie, devenait très-redoutable derrière les murs d’une ville. On eut quelques combats à livrer pour approcher de la place et les lazzaroni montrèrent là plus de courage que l’armée napolitaine. L’imminence du danger avait redoublé leur fureur. Le prince de Moliterne, qui voulait les modérer, avait cessé bientôt de leur convenir, et ils avaient pris pour chef deux d’entre eux, les nommés Paggio et Michel le Fou. Ils se livrèrent dès cet instant aux plus grands excès, et commirent toute espèce de violences contre les bourgeois et les nobles accusés de jacobinisme. Le désordre fut poussé à un tel point que toutes les classes intéressées à l’ordre souhaitèrent l’entrée des Français. Les habitants firent prévenir Mack qu’ils se joindraient à lui pour livrer Naples. Le prince de Moliterne lui-même promit de s’emparer du fort Saint-Elme et de le livrer aux Français. Le 4 pluviôse (23 janvier), Championnet donna l’assaut. Les lazzaroni se défendirent courageusement ; mais les bourgeois, s’étant emparés du fort Saint-Elme et de différents postes de la ville, donnèrent entrée aux Français. Les lazzaroni, retranchés néanmoins dans les maisons, allaient se défendre de rue en rue, et incendier peut-être la ville ; mais on fit prisonnier un de leurs chefs ; on le traita avec beaucoup d’égards ; on lui promit de respecter saint Janvier et on obtint enfin qu’il fit mettre bas les armes à tous les siens. Championnet se trouva dès cet instant maître de Naples et de tout le royaume : il se hâta d’y rétablir l’ordre et de désarmer les lazzaroni. » Tel fut le dernier acte de la vie politique des lazzaroni. Ils ont gardé encore un certain renom poétique comme cela arrive souvent aux hommes qui s’affranchissent, par amour de l’indépendance des liens de la société. Depuis les cyniques de l’antiquité jusqu’aux bohémiens de nos romans et au vieux vagabond de Béranger, on a aimé à exalter cette vie paresseuse et libre qui, en délivrant l’homme de tous ses devoirs, le délivre aussi de toutes ses gênes ; il semble que l’homme, engagé de plus en plus dans les liens de la vie civile, et engrené sans retour dans le mécanisme social, se prenne à regretter parfois l’existence imprévoyante de l’état de nature, et doive un regard de sympathie, presque d’admiration, aux individus et aux populations qui ont professé, sauf à l’exagérer, le sentiment de l’indépendance individuelle. Mais ce sentiment d’indépendance, ainsi considéré, est complètement faux, et dans le milieu social de la vie moderne il n’y a de véritable indépendance que celle que donne la fortune loyalement acquise par l’activité et le travail. Toutefois, comme le positivisme de ces idées ne saurait entrer dans l’imagination des poètes, qui préféreront toujours le murmure d’un clair ruisseau au bruit assourdissant, mais productif, d’une usine, nous citerons ici sur les lazzaroni quelques vers d’Alfred de Musset, ce poète qui, comme fatigué de la vie de l’esprit et du cœur, a trop envié l’apathie de l’ignorance de l’insensibilité.

Ils parlent rarement, ils sont assis par terre,
Nus ou déguenillés, le front sur une pierre,
N’ayant ni sou ni poche et ne pensant a rien.
Ne les réveille pas ; ils t’appelleraient chien.
Ne les écrase pas ; ils te laisseraient faire.
Ne les méprise pas ; car ils te valent bien.

Aujourd’hui, les étrangers qui visitent Naples ne retrouvent plus dans les lazzaroni cette population qu’ils avaient rêvée d’après la mise en scène de l’Opéra et les chœurs de Masaniello ou de la Muette de Portici. L’unification de l’Italie et la diffusion de quelques idées progressistes au milieu de cette populace, qui vivait pour ainsi dire des miettes tombées de la table des riches, ont modifié sensiblement les habitudes des lazzaroni, et ce n’est qu’avec peine et après d’assez longues recherches qu’on finit par découvrir sur le port, ou dans quelques rues désertes de la ville, un spécimen atténué de ces races de Diogènes.

Lazzarone (lb) OU L« bie> vient en dormant, opéra en deux actes, paroles de M. de Saint-Georges, musique d’Halévy ; représenté à l’Académie de musique le 29 mars 1844. La scène se passe à Naples, entre un vieux tuteur infidèle du nom de Josué, le lazzarone Beppo, la fleuriste Baptista, reconnue pour la nièce de Josué, et l’improvisateur Mirobolante. Le sujet est trop frivole pour un grand opéra, et la musique, parfaitement appropriée d’ailleurs aux situations, aurait été mieux goûtée à l’Opéra - Comique. On remarque l’absenco de ténor dans la partition. Cette voix est remplacée par celle de contralto ; Mme Stoltz jouait le rôle de lazzarone. Nous signalerons, parmi les morceaux que renferme cet agréable ouvrage, la cavatine de Beppo : Bien n’est si doux que la paresse, et les couplets : Quand on n’a rien, chantés par Mme Stoltz ; la chanson de Baptista : Achetezmoi roses nouvelles, dite par Mmo Dorus. Les duos de Beppo et de Mirobolante offrent des^ phrases charmantes ; celui du second acte est remarquable. Les trios sont traités avec esprit et verve.

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LAZZI s. m. (la-zi — mot ital., pluriel de lazzo). Bouffonnerie, propos grossier et goguenard : Répondre par des lazzi. H faisait ce lazzi pour mieux m’engager à ne pas lui manquer de parole. (Le Sage.)

Pour attirer la foule aux lazzi qu’il répète, Le blanc Pulcinella sonnait de la trompette.

V. Hcoo.

— Théâtre. C’esticulations burlesques dont les comédiens accompagnent leur jeu : Les comédies italiennes sont pleines de lazzi.

— Rem. Ce mot ne s’emploie pas au singulier, malgré l’exemple contraire de Le Sage ; et, en effet, sa forme, qui est un pluriel italien, ne se prête pas h cet emploi. Il en résulte également que le pluriel ne doit pas prendre de s- H serait désirable que l’usage eut autorisé l’emploi du singulier italien lazzo.

— Encycl. En italien, on désigne sous lo nom de lazzi non-seulement des bouffonneries en paroles, mais les gestes grotesques, les grimaces, toute la pantomime des tréteaux. En français, ce mot n’a pas un sens aussi étendu et signifie seulement saillies bouffonnes, reparties, bons mots ; quand on qualifie de lazzi certaines plaisanteries, on veut surtout faire entendre que leur comique n’est pas exempt de grossièreté ; dans la langue littéraire, on attache assez souvent au mot une nuance de mépris. C’est ainsi que, parlant de Dupin, le honteux président de la Chambre des représentants, plus célèbre par ses calembours que par la fermeté de son attitude, V. Hugo a pu dire :

Cet homme dégradait a plaisir l’Assemblée ; Ses gros lazzi marchaient sur l’éloquence ailée Avec leurs gros souliers.

Il y a- toujours eu en France des théâtres où les lazzi ont fait l’intérêt principal-des pièces. Au xvir= siècle, la troupe de Turlupin, de Guillot-Gorju. de Gros-Guillaume était célèbre en ce genre d’arlequinades ; mais les lazzi n’en plaisaient pas moins aux gens de goût, et Molière, dans ses pièces en prose, Racine, ce qui est plus grave, dans ses Plaideurs, ne se sont pas fait faute d’en user. Les meilleurs acteurs de la troupe italienne, Dominique, Thomassin, Carlin, étaient renommés pour l’art de lancer les lazzi. C’est maintenant au Palais-Royal, aux Variétés, aux Bouffes-Parisiens que les lazzi fleurissent ; ces sortes de mots à double sens, prêtant à l’équivoque grivoise, ont fait le succès de la Mariée au mardi gras, du Chapeau de paille