Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 10, part. 1, L-Leo.djvu/223

Cette page n’a pas encore été corrigée

LASC

empereur grec do Nicée, petit-fils du précédent ; , né en 1222, mort en 1550. Il était fils de Jean Vatace, auquel il succéda en 1255. A peine monté sur le trône, il vit la Thraee envahie par le3 Bulgares, et, pour les repousser, lit alliance avec le sultan d’Iconium. Après les avoir vaincus près d’Andrinople, il fit contre eux trois campagnes heureuses et les réduisit à accepter la paix aux conditions qu’il voulut leur imposer. Ce prince était atteint d’épilepsie, et cette maladie, qu’il attribuait à un maléfice, le rendit soupçonneux et cruel. N’ayant pu décider Marthe Paléo-Iogue, de l’illustre famille de ce nom, a donner sa fille en mariage à un de ses favoris, il la fit enfermer jusqu au cou dans un sac avec des chats, qu’on mettait en fureur en les piquant avec des aiguilles ; craignant ensuite que Michel Paléologue, frère de Marthe, ne se vengeât, il le fit mettre en prison. Mais, à l’approche de la mort, il revint sur ses égarements, rendit la liberté à Michel, et, en mourant, lui recommanda son fils Jean, âgé de neuf ans. Ce dernier fut proclamé empereur sous le nom de Jean IerV, et régna d’abord sous la tutelle du patriarche Arsène et du grand domestique Georges Muzaïon ; ce dernier ayant été tué, peu après, dans une émeute, Michel paléologuo se fit proclamer empereur et régna d’abord conjointement avec Jean ; mais il se débarrassa de ce dernier après la prise de Constantinople (1260), en lui faisant crever les yeux et en l’envoyant au loin en exil. On ignore l’époque de la mort de cet infortuné.

LASC

contre Virgile et contre Cicéron, qu’il accuse de manquer d’art ; mais cette erreur de goût s’explique jusqu’à un certain point lorsqu’on se rappelle que la littérature grecque passait, de son temps, pour la seule qui représentât dignement les tendances vers la civilisation. Érasme dit qu’il avait une grande finesse dans l’épigramme, un jugement sûr, et que, si les princes n’eussent pas réclamé la plus^ grande partie de son temps pour des ambassades, il aurait laissé plus d’ouvrages latins et pourrait être compté parmi les cicéroniens.

LÀSCAIUS (Constantin), savant grec, mort à Messine en 1493. Il descendait de la famille impériale dont il portait le nom. Ayant quitté Constantinople lors de la prise de cette ville par les Turcs, il vint se fixer à Milan, auprès de François Sforza, et donna des leçons de grec. En 1463, il passa à Rome, puis à Naples, et s’établit enfin à Messine, où il organisa une école qui devint célèbre en peu de temps et attira des élèves de toute l’Italie. On lui doit une Grammaire grecque eu trois livres, dont le premier, publié à part (Milan, 1176), est le premier ouvrage qui ait été imprimé en grec. Il traite des huit parties du discours et a été reproduit par Aide en 1494, avec traduction latine. La grammaire complète et des opuscules inédits ont été imprimés plus tard par les Aide et par Oporinus (Bâle, 1547). Mais les travaux de Lascaris n’ont guère do valeur réelle ; ils sont dill’us, et l’on ne recherche la première édition que comme rareté typographique.

LASCARIS (Jean-André), appelé aussi Jnnu* Lnscnria et Klijndacenus, savant helléniste, mort à Rome en 1535. Il appartenait à la même famille que le précédent, et quelques-uns le tiennent pour son fils ; mais c’est très-probablement une erreur. Le surnom de llhyiiUaceiiu* qu’il adopta fait supposer qu’il était né à Rhindacus, petit bourg de l’Asie Mineure, près de l’Hellespont. Vers 1454, il s’établit à la cour de Laurent de Médjcis, qui l’envoya en Asie, en Grèce et dans l’Archipel pour recueillir des manuscrits grecs et les apporter à Florence. C’est lui qui enrichit la bibliothèque des Médicis de ces admirables trésors littéraires qui font l’admiration de l’Europe, et qui sauva de la destruction maint chef-d’œuvre de l’antiquité. Il rapporta, entre autres ouvrages, les orateurs grecs du mont Alhos, les dialogues de Platon et les commentaires de Proclus. Lorsque les Médicis furent chassés de Florence, en 1194, il passa en France, fut reçu avec empressement par Charles VIII, qu’il accompagna dans ses expéditions en Italie, et se lia avec le célèbre Budé, à qui il donna des leçons de grec. Louis XII le chargea de plusieurs missions diplomatiques en Italie et le nomma, en 1503, ambassadeur à Venise, où il passa plusieurs années, profitant de ses loisirs pour éditer des auteurs grecs et pour former quelques élèves. En 1513, Léon X l’appela a Rome, le chargea d’établir au Quirinal un collège grec et fit venir quelques jeunes gens intelligents de Grèce, afin d’en faire des professeurs. Cette école, appelée Gymnasium medicum in Quirinati monte ou Caballini montis, déploya, pendant quelques années, la plus grande activité, et ce fut là que furent préparées les excellentes éditions priaceps des scolies d’Homère (1517), de celles de Sophocle (15is), et des Questions homériques de Porphyre (1518). bous ^inspiration de Budé, François !«■• fit revenir Lascaris à Paris, et les deux savants furent chargés de mettre en ordre la bibliothèque du roi ; étant retourné à Venise, il copia, dans la bibliothèque de Saint-Marc, quelques livres de Diodore de Sicile, dont il fit hommage à François I=r, puis il regagna Rome, et Clément VII 1 envoya, en 1524, en ambassade auprès de Charles-Quint. Après un court et dernier séjour à Paris, il vint mourir de la goutte à Rome. Les services rendus à la science par Jean Lascaris ne sauraient être assez appréciés. Budé, Brixius, Érasme sont d’accord pour reconnaître la profondeur de son érudition. Parmi ses publications, celles qui méritent une mention spéciale sont : des ëpigrammes grecques (Florence, U84) ; un Traité sur la forme des lettres grecques (1527, in-8<>) ; la traduction de quelques chapitres de Polybe sur i’Art militaire. Ses épigrammes grecques et latines ont aussi paru à Bàle (1537). On lui a beaucoup reproché celles

Lascaris OU les Grecs on XVO siècle, par

Villemain (1825, in-8»). Cet ouvrage n’est ni un roman ni un livre d’histoire : c’est une étude dans le genre du Voyage du jeune Anacharsis. Il ne faut donc pas y chercher l’intérêt fugitif de quelque aventure romanesque, mais le plaisir plus durable qu’on trouve à d’ingénieuses pensées, revêtues des plus belles formes du langage. L’empire grec descendant tout entier au tombeau avec son dernier empereur, les Turcs étendant leur barbarie sur tout l’Orient, les beaux-arts et les lettres conserves par des mains pures et fidèles, transplantés en Italie et refleurissant bientôt sous cet heureux climat, Florence et la cour des Médicis, la société tourmentée par le besoin d’une érudition moins fausse, d’une philosophie meilleure, de mœurs plus élégantes ; l’émigration des brillants débris de la civilisation grecque, enfin la découverte de l’imprimerie, qui vient lutter contre la barbarie des Turcs, tel est le grand tableau que M. Villemain a voulu nous offrir dans Lascaris. Allié à la famille impériale, élevé dans la culture des lettres grecques, Jean’ André Lascaris est le plus célèbre entre les Grecs qui se réfugièrent en Italie ; c’est ce qui l’a fait choisir par M. Villemain pouf le héros de son livre. Mais il ne l’a pas placé seul sur la scène : autour de lui, il a groupé savamment d’autres noms moins fameux, à la vérité, mais à qui la société doit une éternelle reconnaissance ; tels sont Gémiste Plétho, disciple enthousiaste de Platon ; Marc Théodore, évêque d’Éphèse ; Nicéphore de Charidée, etc.

Arrivés d’abord en Sicile, les nobles exilés d’Athènes et de Constantinople sont accueillis par de jeunes Italiens que l’amour de la science a conduits au pied du mont Etna, et parmi lesquels on distingue le jeune Médicis et Bembo. Cependant ils ne sont point au terme de leurs maux : le peuple italien ne les regarde que comme des schismatiques dangereux ; martyrs à Constantinople, ils étaient excommuniés à Rome, et ne furent sauvés de la fureur des Siciliens que par le courage de Médicis et de ses jeunes compagnons. Ils se réfugient auprès d’Alphonse, roi d’Aragon et de Sicile, qui cherche à les retenir à sa cour ; mais, effarouchés par l’appareil militaire qui environne ce soldat érudit, Us vont chercher à Florence un asile plus sûr et plus paisible. Là, ils retrouvent, non la patrie, mais ces soins délicats qui adoucissent le supplice de l’exil. Cependant, ils emploient vainement tous les moyens pour exciter l’Europe contre les Turcs. À l’enthousiasme qu’avait excité leur présence succèdent l’indifférence et l’oubli. Ils se dispersent, découragés ; les uns vont mourir dans leur patrie, les autres chez quelques petits princes qui cultivaient les lettres. Tel fut le sort de ces hommes qui contribuèrent le plus à tirer l’Europe des ténèbres de l’ignorance, et aujourd’hui à peine leurs noms sont-ils connus ! M. Villemain en explique la raison : ■ Ils répandirent autour d’eux l’admiration et le

goût des arts ; ils agitèrent l’esprit humain ; ils sauvèrent la plus belle moitié des monuments antiques ; mais eux-mêmes ils n’ont pas créé de monuments. Ainsi, leur souvenir a disparu dans la gloire des grands hommes formés à leur exemple, et la grandeur même de leurs services en a plus rapidement fait perdre lu trace. » C’est donc surtout une œuvre de justice qu’a voulu accomplir M. Villemain en écrivant Lascaris.

LASCARIS (Paul), grand maître dé l’ordre de Malte, né à Castellar en 1560, mort en 1C57. Il appartenait à la famille des comtes de Vintimiile, descendant, par les femmes, des Lascaris, empereurs de Nicée. Entré, en 1584, dans l’ordre de Malte, il était devenu bailli de Manosque, lorsqu’il fut élu grand maître en 1636. Il accrut considérablement les fortifications de Malte, de façon à rendre cette île presque imprenable, et augmenta en même temps la marine de l’ordre. Les galères s’emparèrent du renégat marseillais Ibrahim Rais, connu aussi sous le nom de Bécasse, puis d’un bâtiment turc, sur lequel se trouvaient une femme et un fils d’Ibrahim, sultan des Turcs. Ce souverain envoya alors une flotte nombreuse attaquer 111e ; mais elle fut repoussée avec perte, et les musulmans se portèrent sur Candie, qu’ils enlevèrent aux Vénitiens. Ce fut au grand maître Lascaris que l’ordre de Malte dut l’acquisition de l’île de Saint-Christophe en Amérique, ainsi que la fondation, à La Valette, d’une bibliothèque où devaient être réunis les livres des chevajiers morts dans l’île.

LASCARIS (Paul-Louis), diplomate français, de la famille du précédent, né dans la Provence en 1774, mort en 1815. Il -venait d’être reçu chevalier profès de l’ordre de Malte, lorsque cette lie fut conquise, en 1798,

LASC

par Bonaparte. Lascaris suivit le général en Égypte et prit part à toute la campagne. Après la rupture du traité d’Amiens, en 1803, Bonaparte, ayant résolu d’attaquer par terre les colonies anglaises de l’Inde, chargea Lascaris d’aller en Orient faire les études nécessaire à l’exécution de ce projet, et notamment de reconnaître et explorer tout le désert, les endroits où se trouvaient de l’eau et des passages, jusqu’aux frontières de l’Inde. Lascaris se rendit à Alep, où il apprit la langue arabe, se mit en relation avec les Arabes du désert et épousa une Géorgienne, parente de Soliman- Pacha. En 1810, il alla visiter successivement les tribus arabes de la Mésopotamie et les rives de l’Euphrate, et, après avoir couru mille dangers, il revint, en 1814, a Constantinople, où il apprit les revers et la chute de Napoléon. Lascaris se rendit alors au Caire, où il mourut quelques mois plus tard. Ses manuscrits tombèrent entre les mains du consul anglais, -qui ne voulut jamais ni s’en dessaisir ni les publier. Les seuls renseignements que l’on possède sur la mission de Lascaris consistent dans les notes qu’il avait laissées à son drogman Fatalla, auquel Lamartine les acheta pendant son voyage en Orient. Elles ont été publiées sous ce titre -. Récit de FaUdla Sayegliir, demeurant à Lata/cié, sur son séjour chez les Arabes errants du grand désert, rapporté et traduit par les soins de Lamartine (Paris, 1835, in-B°) ;

LASC

219

LASCARIS (Augustin), marquis de ViNTimillk, écrivain italien, de la famille du précédent, né à Turin en 1776, mort en 1838. Élevé à la cour de Turin, il fut d’abord premier page de la reine, puis devint aide de camp du roi. Sa femme étant devenue, en 1810, dame d’honneur de l’impératrice Marie-Louise, Lascaris la suivit à Paris, où il cultiva les lettres et les arts. En 1814, il retourna en Sardaigne, devint alors gênerai dans l’état-major, fut ensuite président de l’Académie des sciences de Turin, de la Société royale d’agriculture, et fut appelé, en 1831, à siéger au conseil d’État. Nous citerons parmi ses écrits : Capelli di puglia di Toscana (Turin, 1819, in-8o) ; Regtonamento sopra la litografia (Turin, 1820) ; Sul gelso del Filippine (1832) ; Breoi discorsi (1837) ; Del acero campestre (1837), etc.

LAS CASAS (Barthélémy de), célèbre prélat et dominicain espagnol, né il Séville en 1474, mort à Madrid en 1566.11 suivit, a 1 âge de dix-neuf ans, son père, qui accompagna Christophe Colomb à son second voyage en Amérique, puis revint en Espagne, où il entra dans l’ordre des dominicains. De retour à. Hispaniola (Haïti) en 1502, pour travailler à la conversion des indigènes, il fut ordonne prêtre et devint curé à Cuba. Regardant comme une injustice de réduire les Indiens en servitude, il renonça à la portion d Indiens qui lui était échue lors du partage qu’on en avait fait entre les conquérants, déclarant qu’il pleurerait toujours la faute dont il s’était rendu coupable en exerçant pendant un moment, sur ses frères, cette domination impie. Dès lors, il fut le patron déchiré des Indiens, et il eut souvent le bonheur d’arrêter les excès de ses compatriotes. Afin de mettre un terme aux atrocités auxquelles donnait lieu le repartimiento ou répartition des Indiens opérée entre les Espagnols, il repassa en Espagne, où il réussit à déterminer le cardinal Ximènès à envoyer sur les lieux une commission, composée de trois moines de l’ordre des hiéronymites, pour faire une enquête sur les faits et les abus dénoncés. La mollesse avec laquelle procéda cette commission ne satisfit nullement le zèle de Las Casas, qui revint encore une fois en Espagne solliciter l’adoption de mesures plus énergiques pour la protection des indigènes. Le gouvernement adopta enfin les idées qu’il avait conçues pour prévenir l’extermination complète de cette race, condamnée aux plus rudes travaux. Mais l’impossibilité de luire faire aux colonies aucun progrès, si les colons espagnols ne pouvaient pas forcer les Américains au travail, était une objection insurmontable à l’exécution du plan de Las Casas. Pour écarter cet obstacle, il proposa d’acheter, dans les établissements des Portugais à la côte d’Afrique, un nombre sulflsant Se noirs et de les transporter en Amérique, où on les emploierait, comme esclaves, au travail des mines et à la culture du sol. Le vénérable abbé Grégoire a essayé de réfuter ce fait dans un mémoire intitulé Apologie de Las Casas. Il prétend que les Espagnols achetaient des esclaves nègres aux Portugais longtemps avant la découverte du nouveau monde, et qu’ils en amenèrent avec eux dès le commencement de leur établissement à Saint-Domingue. Mais un mémoire de Las Casas, adressé au grand chancelier des Indes et inséré dans la collection manuscrite de Munoz, prouve que, le premier, il obtint un ordre royal autorisant le transport des nègres en Amérique, transport qui n’avait lieu, jusque-là, que par contrebande.

Voyant que, malgré tous ses ell’orts, les Indiens continuaient à être traités avec la plus cruelle barbarie et désespérant de voir s’adoucir leur sort dans les établissements formés par les Espagnols, Las Casas sollicita du gouvernement la concession du territoire qui s’étend le long de la côte, depuis le golfe de Paria jusqu’à la frontière occidentale de cette province, aujourd’hui connue sous la

nom de Sainte-Marthe. Il proposa d’y établir une colonie formée de cultivateurs, d artisans et d’ecclésiastiques. Il s’engagea à civiliser, dans l’espace de deux ans, dix mille Indiens, et à les instruire assez bien dans lea arts utiles pour pouvoir tirer de leurs travaux et de leur industrie 15,000 ducats de revenu pour la couronne de Castille. Il promettait aussi qu’en dix ans sa colonie aurait fait assez de progrès pour rendre au gouvernement 60,000 ducats par an. Il stipula qu aucun navigateur ou soldat ne pourrait s’y établir, et qu’aucun Espagnol n’y mettrait le pied sans sa permission. Il alla même jusqu à vouloir que les gens qu’il emmènerait eussent un habillement particulier, différent de celui des Espagnols, afin qu’ils ne parussent point, aux Indiens de ces districts, de la même race d’hommes qui avaient apporté tant de calamités à l’Amérique. Par ce plan, on voit que les idées de Las Casas, sur la manière de civiliser et de traiter les Indiens, étaient fort rapprochées de celles que les jésuites ont mises en pratique au Paraguay. Le gouvernement espagnol approuva ce plan, mais en restreignant le territoire accordé à Las Casas à 300 milles le long de la côte de Cumana. En 1520, il mettait à la voile pour l’Amérique. Mais son entreprise échoua ; et le chagrin qu’il en éprouva le porta à se réfugier dans un couvent de domicains, k Santo-Domingo (Haïti). Il s’y consacra à l’œuvre des missions, et commença alors son Sistoria gênerai de las Indias. En 1539, Las Casas se rendit de nouveau en Espagne, spécialement chargé d’une mission pour son ordre et aussi avec l’intention d’essayer, de nouveau, d’obtenir aide et appui pour les malheureux Indiens. Charles-Quint rayant fait appeler, il lui déclara que la dépopulation de l’Amérique ne s’arrêterait Que lorsque les habitants seraient libres, et qu on les traiterait en sujets et non en esclaves. Il ne se contenta pas des discours éloquents qu’il prononça sur ce sujet ; il composa, à cette occasion, son traité célèbre sur la Destruction de l’Amérique, dans’lequel il rapporte, avec les circonstances les plus horribles, les terribles effets de la domination espagnole. C’est alors qu’il fut appelé à l’évêché de Chiapa (Mexique), situé dans un pays pauvre et habité par des sauvages non encore convertis au christianisme. En 1544, il s’embarqua, une cinquième fois, pour l’Amérique. Ayant refusé la communion aux. Espagnols qui, après la publication des lois nouvelles, s’obstinaient à traiter les Indiens en esclaves, il s’attira, non-seulement la colère des planteurs, mais encore le désaveu formel de l’Église. Abandonné de tous, Las Casas retourna, trois ans plus tard, dans un couvent de son ordre, en Espagne, où, a peu de temps de là, il reparut dans la lice pour défendre les droits de l’humanité contre le chroniqueur Juan Gines de Sepulveda. Il passa les derniers temps de son existence a terminer différents ouvrages, notamment son Eistoria gênerai de las Indias.. Outre des traités de théologie et de morale, on lui doit encore : Dremssima relacion de la destrucaon de las Indias (Séville, 1552, in-4o), traduite en latin sous le titre de Narratio regionum Indicarum (Francfort, 1598, in-4»), et, en français, sous celui de Tyrannies et cruautés des Espagnols (Anvers, 1679, in-4o). Les œuvres de Las Casas, réunies à Séville (1552, 5 part. in-4<>), ont été traduites en français (Paris, 1822,2 vol. in-8o).

Terminons par le jugement suivant, porte par Prescott sur le célèbre èvêque :

« On peut juger du caractère de Las Casas par sa vie entière. C’était un de ces hommes doués d’une organisation rare, à qui sont révélées les grandes vérités morales, ventes immuables et éternelles comme les astres, mais qui, aujourd’hui familières à tout le monde, ne se dévoilaient alors qu’aux esprits d’élite, tant les ténèbres étaient épaisses autour d’eux. C’était un réformateur, et il eut les vertus, il commit les fautes d’un réformateur. Il était inspiré par une grande et glorieuse idée. C’est la clef de toutes ses pensées, de toutes ses paroles, de tous ses écrits, de tous les actes de sa longue carrière. C est ce qui lui donna le courage de faire entendre des reproches aux princes, de braver les menaces d’une populace irritée, de traverser les mers, les montagnes, les déserts, de renoncer à d’anciennes amitiés et d’affronter des inimitiés nouvelles, la calomnie, l’insulte et la persécution. C’est ce qui lui fit aussi dédaigner les obstacles, ce qui l’habitua à trop compter sur l’appui des autres, à se laisser entraîner aux invectives personnelles, à tomber dans de grossières exagérations, k surcharger les couleurs de ses tableaux... Son grand défaut, comme historien. est d’avoir écrit l’histoire sous l’influence d une idée dominante, exclusive. Il ne cesse de plaider la cause des indigènes persécutés ; son zèle colore tous les objets qui passent sous ses yeux et le rend trop crédule au récit d’événements dont il na pas été le témoin oculaire... Las Casas, malgré tous ses défauts, est un des grands écrivains de l’Espagne : grand par les importantes vérités qu’il découvrit le premier, grand par le courage avec lequel il les proclama. »

LAS CASES (Emmanuel - Augustin - Dieudonné-Marin-Joseph, comte du), historien

fiançais, né au château de Las Cases, près de Revel (Haute-Garonne), en 176C, mort en 1842. Issu d’une famille d’origine espagnole,