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«  ailes. » Elle est demi-nue, et sa blancheur laiteuse fait ressortir la peau bronzée d’une brune aux cheveux d’ébène, à l’œil passionnément noir, qui couvrira certainement l’enchère. Derrière ce groupe s’avancent curieusement les têtes de quelques jeunes filles espiègles et désireuses, de celles qui chuchotent leur secret à l’oreille des Vénus de marbre. » Voici encore une femme d’un âge mûr, assise sur un fauteuil, et qui jette à l’Amour un regard de connaisseuse ; et, de cet autre côté, deux vieilles qui n’hésitent pas à entrer en lice, et qui apportent de l’argent à défaut de jeunesse. Cette composition, imitée de la Marchande d’Amours, de Pompéi, est arrangée avec goût : les figures sont traitées avec une exquise délicatesse ; le coloris est un peu pâle, mais la gamme en est des plus harmonieuses. M. Picou n’a rien fait de mieux dans le genre néo-grec.

Amour et Psyché (l’)} tableau de Fr. Gérard, musée du Louvre. Cette peinture traduit, sous la forme la plus chaste et la plus attrayante, l’allégorie quelque peu voluptueuse par laquelle les Grées avaient exprimé les premières émotions de l’âme qui s’éveille au souffle de la passion. Psyché, presque entièrement nue, Psyché, presque entièrement nue, est assise sur un tertre de gazon, pressant ses bras sur son sein. Un papillon, symbole de l’âme, voltige au-dessus de sa tête, et l’Amour, debout devant elle, se penche timidement et la baise au front. Il y a une grâce exquise dans l’attitude de ces deux adolescents que la pudeur tend à éloigner l’un de l’autre, mais que rapproche un sentiment puissant, irrésistible. La physionomie de Psyché exprime une joie ingénue, un étonnement naïf, et son bel amoureux n’a rien de l’effronterie du Cupidon de la Fable. Cette composition, exposée au Salon de 1797, fut très-admirée par les uns, et vivement critiquée par les autres. Après être restée trois ans dans l’atelier du peintre, que n’avait pas encore visité la fortune, elle fut achetée à frais communs, au prix de 6,000 fr., par l’architecte Fontaine et Le Breton, secrétaire de l’Institut. Elle passa ensuite dans la collection du général Rapp, puis dans celle de Louis XVIII, qui la paya 22,100 fr., en 1822. Bien que Gérard ait mis à la peindre le soin le plus minutieux, et qu’il se soit attaché à imiter la pureté et l’élégance des formes antiques, on ne peut nier que certaines parties ne laissent à désirer sous le rapport de la correction. À l’époque où elle parut, le sculpteur Giraut, classique enthousiaste, faisant remarquer la portion du corps au-dessous de la poitrine trop mollement accusée dans Psyché, demanda malignement si 'les côtes y étaient peintes en long ou en large. Quoi qu’il en soit, ce tableau est resté une production fort remarquable de l’époque et l’une des mieux réussies de Gérard. Elle a été gravée par Godefroi et lithographiée par Aubry le Comte.

Amour et Psyché (l’), tableau de David. À demi couché sur un lit de forme antique, à côté de Psyché endormie, le dieu volage écarte doucement le bras de son amie posé sur sa jambe. Il veut s’éloigner. L’expression maligne de son visage contraste avec l’air de douce béatitude qui rayonne sur les traits de la crédule Psyché. Au-dessus des deux amants voltige le papillon symbolique. Ce tableau, exposé au Salon de 1823, valut à l’auteur alors en exil, les plus vives louanges, et lui attira les critiques les plus acerbes. « On peut le regarder, selon M. Delécluze, comme le dernier des ouvrages de David qui aient eu de l’influence sur l’esprit des jeunes artistes qui, en ce moment, s’apprêtaient à faire une révolution dans l’art de la peinture. » Chose singulière, ce furent les admirateurs fanatiques de l’Enlèvement des Sabines et des Horaces qui blâmèrent ce tableau. L’accent de vérité que le peintre a cherché à donner aux formes de ses personnages, à l’expression de leur visage, la chaleur inusitée du coloris, semblèrent à ces partisans exclusifs du haut style des concessions faites aux doctrines nouvelles. Tant d’indignation à propos d’une composition où nous ne voyons que deux figures académiques dessinées avec une correction irréprochable, peut donner la mesure des colères qui allaient fondre sur les œuvres des romantiques. Le tableau de David a été gravé par Potrelle ; il faisait alors partie de la collection du comte de Sommariva.

Amour et Psyché (l’). Sous ce titre commun, on admire au musée du Louvre deux groupes ravissants d’Antonio Canova. Dans le premier, Psyché parée des grâces naïves de la première jeunesse, la tête légèrement penchée, tient avec précaution entre ses doigts délicats un papillon, son emblème ou celui de l’âme, qu’elle pose sur la main gauche de l’Amour. Celui-ci, enlaçant de son bras droit le corps de sa jeune amie, appuie légèrement la tête sur son épaule et regarde avec un plaisir mêlé d’attendrissement l’insecte brillant qu’elle lui confie, et que bientôt il se fera un jeu de tourmenter. « Rien de plus gracieux, dit M. de Clarac, rien de plus innocent et de plus simple que la pose de ces deux jolies figures : elles se font valoir l’une l’autre, leurs contours charmants s’unissent sans se confondre, et, de tout côté, ce groupe offre les formes les plus coulantes et les plus moelleuses, ainsi qu’un heureux concours de lignes. »

Dans le second groupe, Psyché, abandonnée, persécutée, éperdue, invoque la mort, qu’éloigne la cruelle Vénus ; auprès d’elle est le vase dans lequel on l’avait condamnée à aller puiser de l’eau du Styx.L’Amour l’aperçoit ; la beauté, la douleur de celle qu’il a délaissée raniment son ardeur ; il dirige son vol vers elle, et, la soutenant au moment où elle va se précipiter dans un abîme, il la serre dans ses bras et la relève en lui prodiguant mille caresses.

Avant d’être placé au musée, ce groupe, auquel on peut adresser les mêmes éloges qu’au précédent, faisait l’ornement du château de Compiègne ; il date de 1793.

Amour dominateur (l’), statue en marbre, l’une des dernières productions de F. Rude ; musée de Dijon. Ce chef-d’œuvre a été exposé au salon de 1857, dix-huit mois après la mort du célèbre sculpteur. Rude a expliqué lui-même, dans une lettre citée au livret de cette exposition, de quelle manière il a compris ce vieux sujet de l’Amour : « Je place l’esprit au milieu de la matière ; cette petite figure allégorique que nous appelons Amour, et que les Grecs regardaient comme le plus ancien de tous les dieux, ce génie féconde toute la création. Je figure l’eau tout autour de la terre ; les oiseaux représenteront l’air ; le feu sera le flambeau. Je tâcherai de décorer, sans prétention ni confusion, l’Eau et la Terre : des poissons, des coquillages pour celle-ci ; sur le promontoire, des fleurs, de petits reptiles, enfants de la Terre. Un serpent, faisant le tour de la plinthe, terminera cette composition par la représentation de l’éternité. » L’artiste a été fidèle à ce programme et l’a rendu avec l’habileté d’un praticien rompu à toutes les finesses du métier. La composition est d’une simplicité magistrale ; les accessoires n’enlèvent rien à l’attrait de la figure principale. Le jeune dieu, agitant son flambeau sacré, est assis dans une attitude pleine de fierté. Son carquois et son arc, attributs de sa puissance, reposent à terre. À ses pieds s’ébattent amoureusement deux colombes. Son corps, modelé avec une grande science de l’anatomie, a toute la souplesse de la nature vivante : les formes joignent à une vigueur juvénile une élégance et une délicatesse idéales. La tête a une expression superbe. Il semble que Rude, en créant cette admirable figure, se soit inspiré de ces belles paroles de Pierre Leroux : « L’amour est la plus grande chose qui ait un nom dans la vie humaine, et la plus intelligible en son mystère infini…Toute beauté vient de lui et le reflète. C’est lui qui, embrassant l’univers dans une éternelle étreinte, le fait voir beau et palpitant, et l’emplit de germes qu’il fait éclore. L’amour, en un mot, c’est la puissance féconde, dominatrice du monde ; c’est la vie. »

Amour (Représentations diverses de l’). La personnification de l’Amour, une des créations les plus gracieuses de la mythologie, semble avoir été imaginée tout exprès pour inspirer les œuvres les plus délicates de la peinture et de la sculpture. Les anciens comptaient parmi les chefs-d’œuvre de Praxitèle un Cupidon bandant l’arc, qui appartenait à la ville de Thespies. Il existe plusieurs copies antiques de cette ravissante figure. Les plus connues sont : celle qui est retournée au Vatican après avoir figuré au musée du Louvre, sous le premier empire, et celle du musée degli Studj, à Naples. Dans cette dernière galerie, on peut admirer encore un groupe antique, d’une bizarrerie charmante, représentant un Amour agaçant un dauphin. L'Amour endormi, du Vatican, est aussi une des plus gracieuses productions de l’antiquité qu’ait épargnées le temps. L’image de ce petit dieu malin se reproduit sans cesse sur les murailles des édifices de Pompéi. Nous nous contenterons de citer les Amours dansants, jouant de divers instruments et donnant à manger à l’aigle de Jupiter, qui décorent le temple d’Auguste ; l’Amour se plaignant à sa mère du mépris de Diane, une des plus jolies peintures de la Maison du poëte ; l’Amour cherchant à s’emparer du panier que porte une jeune fille, dans la Maison de la muraille noire ; l’Amour désarmé et fait prisonnier par deux jeunes filles, composition ingénieuse à laquelle la Maison de l’Amour puni doit son nom ; des Amours pêchant à la ligne, des Marchands et des Marchandes d’Amours, allégories très-transparentes, fréquemment employées par les décorateurs de Pompéi, et dont les plus beaux spécimens figurent au musée degli Studj, etc.

« On ne sait, dit l’Encyclopédie, pourquoi la plupart des peintres et des sculpteurs représentèrent l’Amour comme un enfant. Ce n’en était pas un que l’amant de Psyché. Sur les pierres gravées les plus anciennes, il paraît comme un jeune garçon ou un adolescent, avec de grandes ailes d’aigle, telles qu’en donnait à tous les dieux la plus haute antiquité. » Phrygillus, Solon et Tryphon lui donnèrent les premiers une forme plus enfantine et des ailes plus courtes ; c’est dans cette forme qu’il est représenté sur une infinité de pierres gravées, de bas-reliefs et de peintures antiques. Les attributs qu’on lui prête sont extrêmement variés. Tantôt, pour désigner sa puissance, on lui prête la foudre de Jupiter ou bien les armes d’Hercule, la massue, la peau du lion ; tantôt on le figure jouant de la flûte ou échangeant son arc contre une lyre, par allusion aux charmes de la volupté ; ailleurs on le montre portant un thyrse, et tenant une coupe qu’il est sur le point de vider, en vertu de l’adage bien connu : Sine Baccho friget Venus. Ailleurs encore, il guide avec des cordes la voile d’une nacelle, allégorie quelque peu obscure où Gori reconnaît le passage des âmes aux champs Élysées, et Winckelmann, avec plus de raison, ce semble, l’application de l’expression grecque erôtoploein, naviguer sur la mer de l’Amour : navigation féconde en naufrages, en scènes de deuil, ainsi qu’a voulu sans doute l’indiquer cet autre artiste qui a représenté l’Amour renversant un flambeau allumé.

Les peintres de la Renaissance, en introduisant dans leurs compositions tout l’attirail mythologique, renouvelé des Grecs et des Romains, n’eurent garde d’oublier l’Amour. Nous le retrouvons dans trois tableaux de cette époque, qui appartiennent au Louvre, et d’abord, dans le Parnasse, de Mantegna, où il est occupé à lancer des traits qui excitent la jalousie de Vulcain. Lorenzo Costa nous le montre couronnant Isabelle d’Este, marquise de Mantoue, pour laquelle le Pérugin fit cette autre peinture où, au milieu d’une prairie consacrée à Vénus, on voit la Chasteté mettant en déroute des Amours qui entraînent à leur suite des femmes enchaînées par des cordons de soie. Les plus grands maîtres de l’école italienne font intervenir Cupidon dans leurs allégories moitié païennes, moitié chrétiennes. L’Amour profane et l’Amour divin, de la galerie Borghèse, comptent parmi les chefs-d’œuvre du Titien. Le sévère Caravage a peint l’Amour endormi (palais Pitti) ; le Corrége, l’Amour cherchant à se faire un arc de la massue d’Hercule (gravé par Van de Steen) ; Jules Romain, des Amours montés sur des dauphins (gravé par Adamo Ghisi de Mantoue). C’est dans l’école bolonaise surtout qu’il faut chercherles peintres de l’Amour : Annibal Carrache, qui a peint presque autant de sujets mythologiques que de sujets religieux, déploya une élégance et une grâce exquises dans les allégories de l’Amour vertueux et de l’Amour déréglé, qu’il exécuta dans la galerie du palais Farnèse ; Augustin, son frère, illustra par son pinceau et plus souvent encore par son burin, les fables dont le héros est Cupidon ; on dit même qu’il éprouva vers la fin de sa vie les plus vifs remords à l’idée des estampes lascives qu’il avait faites dans sa jeunesse, et, à dire vrai, l’Amour céleste, l’Amour terrestre et l’Amour vénal, qu’il peignit peu de temps avant de mourir, dans le palais du duc de Parme, attestent une imagination très-calme. Le Dominiquin et le Guide suivirent les traditions des Carrache, leurs maîtres. Du premier, le Louvre possède un Amour triomphant, assis sur un char auquel sont attelées deux colombes. Nommons enfin l’Albane, qui a si bien mérité d’être appelé l’Anacréon de la peinture, car de son atelier s’est envolé un essaim innombrable de jolis petits Amours, d’Amorini, comme disent les Italiens. » La nature, dit Lanzi, l’avait formé pour ce genre de sujets ; la lecture des poëtes, l’y disposa encore davantage, et la fortune même acheva de l’y attacher, car ayant eu en partage une femme et douze enfants d’une rare beauté, il avait toujours à sa disposition les plus beaux modèles pour ses études. » Il serait trop long de citer tous les tableaux où il a mis en scène des Amours, tantôt formant des rondes sur le vert tapis des prés, tantôt tressant des guirlandes, tantôt s’exerçant à tirer de l’arc contre un cœur suspendu en l’air, en guise de cible. Les célèbres allégories des Quatre-Saisons, de la galerie Borghèse, sont peuplées de ces gracieuses figures d’enfants. Ici, ils aident Vulcain à forger des dards ; là ils tendent des pièges aux oiseaux ; ailleurs, ils volent dans les airs, ils nagent ou pèchent dans la mer, ils cueillent des fleurs pour en former des couronnes.

Les peintres flamands du commencement du XVIe siècle rapportèrent d’Italie le culte des Amours. Rubens affectionnait particulièrement ces petits culs nus, qui lui fournissaient une excellente occasion d’exercer son talent de coloriste ; il en a mis dans toutes ses compositions allégoriques ; il leur a même consacré des toiles spéciales, entre autres cette piquante Fête de Vénus à Cythère, qu’on voit au musée de Vienne. Rembrandt s’est lui-même essayé à la représentation de l’Amour, témoin son tableau du Louvre, où il nous montre le petit dieu assis sur les genoux de Vénus : mais le marmot, malgré ses ailes, semble échappé de quelque taudis d’Amsterdam, et la mère est une grosse femme du peuple, vêtue à la mode hollandaise. L’illustre Van Ryn traitait la mythologie avec autant de sans façon que la Bible et l’Évangile.

En France, les Cupidons enfantés à Fontainebleau par le Primatice et par son ami dell’Abate, ont eu une postérité qui s’est accrue et multipliée à l’infini jusqu’à nos jours. Est-il besoin de rappeler les charmantes fantaisies dont le pieux Le Sueur avait décoré l’hôtel Lambert, et qui, depuis, ont été placées au Louvre : la Naissance de l’Amour, Vénus présentant l’Amour à Jupiter, l’Amour réprimandé par sa mère, l’Amour recevant les présents des dieux, l’Amour ordonnant à Mercure d’annoncer son pouvoir à l’univers, l’Amour dérobant la foudre de Jupiter ? Vers la fin du grand siècle, les peintres de portraits adoptèrent l’habitude de placer des Amours dans leurs tableaux ; Largillière excellait à peindre ces enfants aux formes rebondies, au minois mutin. Sous la Régence, monsieur de Cupidon devint décidément le héros à la mode : Le Moyne, Natoire, Charles Coypel, et un peu plus tard Carle Van Loo et Boucher furent ses peintres officiels. Carle Van Loo, coloriste délicat, quoiqu’un peu lâché, dépensa beaucoup de talent à varier le sujet de ses compositions ; il finit par aboutir aux plus plates et aux plus ridicules conceptions, telles que : l’Ainé des Amours faisant faire l’exercice à ses cadets, un des derniers tableaux qu’il a exposés. Le vrai maître du genre est Boucher ; il gaspilla dans ses innombrables ouvrages des qualités qui auraient pu le conduire à mieux, une imagination féconde, une facilité d’exécution qui tenait du prodige, un dessin toujours gracieux, sinon toujours correct, un coloris clair et séduisant jusque dans ses mensonges. « Cet homme est la ruine de tous les jeunes élèves en peinture, écrivait Diderot en 1763. À peine savent-ils manier le pinceau et tenir la palette, qu’ils se tourmentent à enchaîner des guirlandes d’enfants, à peindre des visages joufflus et à se jeter dans toutes sortes d’extravagances qui ne sont rachetées ni par la chaleur, ni par l’originalité, ni par la gentillesse, ni par la magie de leur modèle ; ils n’en ont que les défauts. » Il n’est pas jusqu’au grave Joseph-Marie Vien, l’un des précurseurs de ta réforme académique, qui n’ait été gagné par la contagion : il exposa, en 1763, une Marchande à la toilette, imitée de la Marchande d’Amours de Pompéi ; c’est une esclave romaine ayant près d’elle un panier d’osier rempli d’Amorini ; celui qu’elle tient par ses deux ailes bleues fait un geste indécent dont la signification a été précisée par Diderot en des termes trop transparents pour être reproduits ici. Michel Van Loo, Lagrenée, Baudouin, Fragonard, furent les imitateurs et les continuateurs de Carle Van Loo et de Boucher, dans le genre érotique ; Prud’hon, qui s’y exerça également, déploya une grâce et une naïveté inconnues avant lui. Chassés pour quelque temps de la peinture par les Romains de David, les Amours ont fini par trouver un asile dans l’atelier de l’école contemporaine des néo-Grecs. L’Amour à l’encan et la Moisson d’Amours, de M. Picou, l’Amour et son troupeau, de M. Hamon, et les jolis madrigaux du même artiste, Ma sœur n’y est pas, Ce n’est pas moi, la Comédie humaine, ont obtenu un succès que justifiaient le charme des détails, la finesse et les agréments du coloris. Mais ces premiers tableaux sont restés ses chefs d’œuvre. Depuis, leur puérilité spirituelle a fait place à l’afféterie ; la fantaisie a tourné à l’érudition ; Cupidon a perdu sa malice enfantine. « Hélas ! s’est écrié M. Paul de Saint-Victor, l’enfant vieillit et il vieillit sans grandir ; sa grâce s’étiole, sa gentillesse se grime, son atticisme grimace. De grec qu’il était, il s’est fait helléniste. Ce n’est plus qu’un vieux marmot qui poursuit les papillons de Cythère, un Dictionnaire d’antiquités sous le bras. J’aime mieux les Amours de Boucher avec leurs grâces minaudières et leurs faciles simagrées. Ceux-là, du moins, n’ont pas fait leurs classes ; ils sont artificiels de naissance. À qui voudrait reprendre leur anatomie chiffonnée et leurs pirouettes de ballet, ils pourraient répondre comme Henriette dans les Femmes savantes :

Excusez-moi, monsieur, je ne sais pas le grec.

AMOUR (le Sakhalian des Mandchoux ; le Hoen-Thoung-Kiang des Chinois), grand fleuve de la Chine, dans la Mandchourie, affl. de l’océan Pacifique. 3,500 kil. de cours, navigable dans toute son étendue.

AMOUR (Territoire de l’), grande division administrative de l’empire russe, dans la Sibérie orientale, créée en 1858 ; comprend une partie du bassin septentrional du fleuve de ce nom. Ce pays est destiné à devenir le centre d’un grand commerce avec l’Amérique, la Chine et le Japon. Le territoire se divise en deux provinces, dont la plus petite est d’une étendue plus considérable que la France.

AMOUR (SAINT-), ch.-lieu de cant. (Jura) ; arrond. de Lons-le-Saulnier ; pop. aggl. 1,732 hab. — pop. tot. 2,343 hab. Commerce de marbrerie, poterie, tannerie ; restes d’un ancien château dont les fortifications étaient jadis considérables.

AMOURACHANT (a-mou-ra-chan) part. prés. du v. Amouracher.

AMOURACHÉ, ÉE (a-mou-ra-ché) part. pass. du v. Amouracher.

AMOURACHER v. a. ou tr. (a-mou-ra-chè — rad. amour). Engager dans un fol amour, une folle passion : Je ne sais qui a pu l’amouracher de cette petite sotte. Si les filles voulaient dire la vérité, on serait bien étonné de ce qui les amourache. (Balz.)

S’amouracher, v. pr. S’éprendre d’une folle passion pour une personne ou pour une chose : Il s’amouracha d’une femme indigne de lui. Il vint à s’amouracher de madame de Villars, laquelle, comme estant de la race pudique de France, lui fit assez froid pour le commencement. (Sully.) Il s’est amouraché des sciences occultes. (Acad.) Madame Paul s’est amourachée d’un grand benêt de vingt-cinq ans ; elle l’épouse ; c’est un garçon brutal, qui la battra comme plâtre. (Mme de Sév.) C’était une de ces idoles passagères dont Paris a besoin, et dont il s’amourache pour quelques jours. (Balz.)

amourette s. f. (a-mou-rè-te — rad. amour). Fam. Amour passager ; caprice : Avoir des amourettes en tête. Je vois bien qu’il y a là-dessous quelque amourette. (Mol.) Une amourette est bien peu de chose. (G. Sand.) Ce n’est pas une amourette, monsieur ; c’est une passion. (E. Augier.) Il eut des amourettes, il fit quelques fredaines. (Ste-Beuve.)