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de l’ouest, elle le fut aussi du côté de l’est. À la fin du Xe siècle, selon la chronique islandaise de Snorro Sturlœson, adoptée par les historiens du Nord, un seigneur norvégien, nommé Raude, exilé d’Islande, se rendit au Groenland, déjà découvert avant lui par un marin nommé Gunbivern. Dans son second voyage, en 1496, Colomb lui-même fut fort étonné de trouver, sur la côte de la Guadeloupe, les débris d’un navire qu’il jugea avoir été construit en Europe.

Si l’on ajoute à tout ce que nous venons de rapporter le voyage, très-douteux il est vrai, des frères Zeni, à la fin du XIVe siècle, dans les pays de Drageo et d’Estotiland, où l’on a cru reconnaître la Nouvelle-Écosse et le Canada, voyage entrepris sur le rapport de quelques marins qu’une tempête avait jetés dans les mêmes pays, quelques années auparavant, on aura tout ce que l’histoire rapporte des explorations de l’Amérique faites avant la fin du XVe siècle. Nous ne parlerons pas des prétendues découvertes de Madoc-Ap-Owen, Alonso Sanchez, Cousin et autres, mis en avant par les Anglais, les Portugais, les Français, etc. ; ces hypothèses sont fondées sur des documents ou des traditions trop incertaines pour mériter confiance.

Quand on examine le caractère des antiquités américaines, l’état de civilisation des peuples indigènes, au moment de leur conquête par les Européens ; quand on réfléchit à la nature du pays et aux lois qui ont présidé à toutes les invasions, il paraît probable que l’Amérique reçut sa population à la fois par le détroit de Behring et par le Groenland, c’est-à-dire qu’elle fut colonisée par les races mongolique et scandinave. Les grands royaumes du Mexique et du Pérou, les palais et les temples de Mexico et de Cusco, au temps de Cortez et de Pizarre, les idoles de formes indiennes, les sépultures de Mitla au Mexique, avec leurs ornements grecs, les monuments de Palenque et leur structure égyptienne, tout cela rappelle évidemment l’Asie, la Chine, et l’indoustan. Les explorateurs partis de la côte orientale de l’ancien monde, et débarqués sur les rivages américains du Pacifique, au nord de la Californie, tournèrent aussitôt leurs regards et leurs pas vers le sud, vers les pays de la lumière, de la chaleur et des fruits, invincible aimant qui attire toutes les hordes envahissantes, dans le nouveau comme dans l’ancien monde. Les sommets neigeux de la chaîne septentrionales des Andes, les monts Rocheux ôtèrent aux émigrants asiatiques toute envie de les traverser, pour se jeter à l’ouest dans la vallée du Mississipi. Ils restèrent sur la côte du Pacifique, descendant toujours au sud, s’établissant au Mexique, et gagnant le Pérou par l’isthme de Panama. Dans l’Amérique méridionale, les pics inaccessibles de la Cordillière des Andes empêchèrent encore les nouveaux venus de gagner les pampas de la vallée de l’Orénoque, et d’y porter la civilisation avancée que Pizarre et Almagro rencontrèrent au Pérou. Ainsi resserrés entre le Pacifique et la grande chaîne des monts américains, les Asiatiques multiplièrent dans cet étroit espace, où l’agglomération de la population les amena forcément à la civilisation et au despotisme oriental de la Chine et de l’Inde.

Trop indolents pour être navigateurs, ces peuples laissèrent même les îles du golfe du Mexique à la merci de la race scandinave. Celle-ci, débarquée au nord-est de l’Amérique, s’étendit bientôt sur la plus vaste moitié du nouveau monde, sur tout l’espace compris entre l’Atlantique et la Cordillère nord et sud des Andes, espace immense qui, permettant aux émigrants européens de s’éparpiller à mesure qu’ils arrivaient, empêcha toute agglomération de population, particularité qui explique l’état nomade ou sauvage dans lequel on trouva toutes les tribus à l’est des Andes. Là où il y eut, parmi elles, quelques tentatives de civilisation, on retrouve de rares monuments qui portent tous le cachet des races celtiques et Scandinaves. Cela est attesté aussi bien par les momies du Kentucky, copie des momies celtiques, par les anciennes fortifications et circonvallations en terre et en pierre de la vallée de l’Ohio, que par l’organisation politique des tribus sauvages, leurs croyances religieuses et leurs instincts guerriers. Des récifs de la Floride, quelques-uns de ces nouveaux arrivés passèrent d’île en île, jusqu’à la côte est de l’Amérique méridionale, où ils menèrent dans les pampas et les llanos la même vie que leurs frères des forêts et des savanes du nord, conservant avec jalousie les traditions de liberté personnelle apportées des clans scandinaves, ne voulant pas de roi et obéissant à peine à un chef. Les Caraïbes des Antilles ne purent même oublier tout à fait, malgré les chaleurs dissolvantes d’un climat torride, les traditions nautiques de leurs belliqueux ancêtres, les pirates scandinaves.

Découverte et colonisée déjà par quelques hardis explorateurs de l’ancien monde, l’Amérique était aussi inconnue du vieux continent que si elle n’eût pas existé. Les sagas scandinaves contenaient la seule donnée, le seul indice qui pût encourager Colomb à croire à ses calculs et aux révélations de son génie. Et encore, les légendes septentrionales, s’il les connut réellement, étaient trop vagues pour qu’il lui eût été possible d’y attacher une grande importance. Les sagas disaient qu’un Norvégien, du nom de Leif, parti en 1002 de l’Islande pour le Groenland, avait été poussé dans la direction du sud, vers une plage qu’il appela Vinland, à cause des vignes sauvages qu’il y trouva. D’autres aventuriers scandinaves y abordèrent plus tard et y fondèrent des établissements qui disparurent presque aussitôt. Quoique beaucoup d’auteurs prétendent que cette Vinland n’est autre chose que le Rhode-Island, ou quelque autre point de la Nouvelle-Angleterre, sa véritable position n’est rien moins que connue. M. Bigelow, écrivain américain qui est natif de Boston, a dû penser souvent à cette singulière coïncidence de la tradition des sagas avec la production de la vigne sauvage sur les collines de Taunton et du Rhode-Island, le seul point, en effet, sur la côte nord-est de l’Amérique, où la vigne croit naturellement.

Les manuscrits de Marco Polo, les légendes du moyen âge sur le fameux pays du Cathay, n’ont pas du être beaucoup plus utiles à Colomb que les légendes islandaises. Après Michelet, qui s’écrie : « L’Amérique, plusieurs fois trouvée en vain, est cette fois manifestée et assurée au monde par l’obstination d’un grand cœur », nous pouvons donc ajouter avec Chateaubriand : « Ne disputons pas à un grand homme l’œuvre de son génie. Qui pourrait dire ce que sentit Christophe Colomb, lorsque, avant franchi l’Atlantique ; lorsque, au milieu d’un équipage révolté ; lorsque, prêt à retourner en Europe sans avoir atteint le but de son voyage, il aperçut une petite lumière sur une terre inconnue que la nuit lui cachait ! Le vol des oiseaux l’avait guidé vers l’Amérique ; la lueur du foyer d’un sauvage lui découvrit un nouvel univers. Colomb dut éprouver quelque chose de ce sentiment que l’Écriture donne au Créateur, quand, après avoir tiré la terre du néant, il vit que son ouvrage était bon : Vidit Deus quod esset bonum. Colomb créait un monde. On sait le reste : l’immortel Génois ne donna point son nom à l’Amérique ; il fut le premier Européen qui traversa, chargé de chaînes, cet océan dont il avait le premier mesuré les flots. Lorsque la gloire est de cette nature qui sert aux hommes, elle est presque toujours punie. »

Ce fut le 11 octobre 1492, jour à jamais mémorable dans l’histoire du monde, que Colomb découvrit l’île Guanahani, aujourd’hui San-Salvador, dans l’archipel des Lucayes ; puis quelques jours après, Cuba et Haïti. Pendant son second voyage, en 1493, plusieurs des Antilles, la Dominique, Marie-Galante, la Guadeloupe, Montserrat, Antigua, Porto-Rico et la Jamaïque, s’offrirent à lui, sur sa route, sans qu’il soupçonhât encore l’existence du continent. Il n’eut connaissance de ce dernier qu’en 1498, à sa troisième expédition, pendant laquelle il gouverna directement à l’ouest, parvint à l’embouchure de l’Orénoque, découvrit l’île de la Trinité, ainsi que la Côte-Ferme, et longea cette dernière jusqu’à la pointe d’Araya, d’où il se dirigea sur Haïti. Enfin, dans un quatrième et dernier voyage, en 1502 et pendant les années suivantes, il ajouta à ses nombreuses découvertes celles de la Martinique, du havre de Porto-Bello, de la côte de Costa-Rica, de celle de Honduras, et termina ainsi glorieusement sa carrière maritime.


Conquête et colonisation. Christophe Colomb avait donné un nouveau monde à l’ancien ; l’Amérique était trouvée. Il ne s’agissait plus que de la conquérir et de s’en approprier les richesses incomparables. Quelle pâture abandonnée à l’avidité européenne ! L’ambition voyait s’ouvrir devant elle un champ comme elle n’en avait jamais rêvé. Après la bataille, le pillage : les conquérants succédèrent aux navigateurs ; les matelots firent place aux soldats et aux aventuriers de Cortez, de Pizarre, de Balboa. On ne peut plus les chasser des lieux où ils ont posé leur pied avide, et chaque année voit s’agrandir la part de chaque nation européenne dans le démembrement du nouveau monde. Découvrir ne signifie plus que posséder. Voyons donc qui possédait, qui se partageait l’Amérique, avant la guerre de l’indépendance des États-Unis, et avant la cession de la Louisiane et de la Floride par la France ? Les Anglais avaient conquis et colonisé toute la côte orientale de l’Amérique du Nord, avec une partie des Antilles et de la Guyane. Toutefois il faut excepter la Nouvelle-Amsterdam, aujourd’hui New-York, et la vallée de l’Hudson, longtemps au pouvoir des Hollandais, dont les mœurs y sont encore reconnaissables. La France s’était créé un magnifique empire qui, partant du Saint-Laurent, de Québec et de Montréal, descendait le long de la vallée du Mississipi, s’épanouissait sur la côte septentrionale du golfe du Mexique, et rejoignait, par la Floride, nos îles magnifiques des Antilles et notre Sinnamari, autrefois si redoutable. Les Danois, venus les derniers à la curée du nouveau monde, eurent à peine le temps de saisir une petite île, admirablement placée sur le chemin du Mexique. À part le Brésil, les Portugais, d’ailleurs si occupés avec leur empire des Indes, se virent bientôt enlever leurs possessions américaines par l’Espagne, qui, la première arrivée sur le nouveau continent, sut s’y tailler la part du lion. Et cela pendant si longtemps, qu’aujourd’hui encore, si sa domination politique est évanouie, ses mœurs, sa langue, sa religion, règnent sur toute l’Amérique centrale et méridionale ; en sorte que si les descendants de Philippe II ne voient plus comme autrefois arriver dans leurs ports d’Europe les galions chargés de l’or américain, ils peuvent encore dire fièrement que le soleil ne se couche jamais sur les pays où s’étendent la domination morale et les souvenirs de l’Espagne.

Voici l’historique rapide des conquêtes faites par les diverses nations européennes sur le continent américain :

Espagnols et Portugais. Les terres américaines découvertes et conquises par ces deux peuples, passèrent si promptement de l’un à l’autre par le fait de la conquête ou des héritages, leurs navires se croisaient dans les eaux du nouvel hémisphère si souvent et à si peu d’intervalles, que nous sommes obligés, par les dates historiques, de mêler cette double histoire de navigation et de colonisation. Le pape lui-même n’avait pu parvenir à mettre de l’ordre dans les conquêtes du Portugal et de l’Espagne. « aézEn vain, il avait partagé gravement l’Amérique, comme le dit un historien, tracé du doigt une ligne sur le monde, donné à l’un des deux peuples l’Orient, à l’autre l’Occident. » La passion des conquêtes et l’esprit d’aventure empêchèrent Espagnols aussi bien que Portugais de respecter la ligne imaginaire d’Alexandre VI. L’inviolabilité des dieux Termes n’était plus qu’un vain mot pour les possessions des Européens en Amérique.

En 1499, Alonzo de Ojeda, accompagné d’Améric Vespuce, aborde à Maracapana, sur la Côte-Ferme, et reconnaît cette dernière jusqu’au cap de la Veda. En 1500, Vincent Yanez Pinçon atterrit au cap Saint-Augustin, reconnaît l’embouchure du fleuve des Amazones, et visite six cents lieues de côtes avant d’arriver à Haïti. Le Portugais Alvarez Cabral, jeté à l’ouest en se rendant dans l’Inde, est conduit sur les côtes du Brésil, qu’il reconnaît jusqu’à Porto-Seguro. En 1501, Améric Vespuce s’avance jusque dans l’océan Austral, où il découvre une terre que l’on croit être la Nouvelle-Géorgie de Cook. En même temps, Roderigo Bartidas et Juan de la Cosa parcourent, à partir du cap de la Vela, cent lieues de côtes inconnues où s’élevèrent bientôt Sainte-Marthe, Carthagène et Nombre de Dios. Le Portugal, de son côté, envoie au nord Gaspard Cortereal, qui découvre l’embouchure du Saint-Laurent, le Labrador, et entre dans le détroit d’Hudson. En 1505, Ovando soumet l’île d’Haïti. Porto-Rico est conquis en 1512 par Juan Ponce de Léon, qui, la même année, découvre la Floride, nom que les Espagnols donnèrent longtemps à toute la côte sud-est de l’Amérique du Nord. Mais ce ne fut qu’en 1539 que l’Espagne prit possession réelle, non-seulement de la Floride proprement dite, mais d’une grande partie de la Louisiane. À cette époque, un aventurier espagnol, De Soto, débarqua, à la baie de Tampa, sur la côte occidentale de la Floride ; et, après deux ans d’efforts, il finit par atteindre le Mississipi, en traversant les pays qui forment aujourd’hui les États d’Alabama, de Géorgie, du Mississipi et de la Louisiane. De Soto remonta le grand fleuve, et pénétra même à 200 milles au delà, dans les terres situées à l’ouest. Il revint mourir dans les marais du bas Mississipi, et ses compagnons retournèrent au Mexique. Dès 1565 ; cependant, l’Espagne renvoyait des troupes pour maintenir ses droits sur la Floride, en chasser les protestants français établis sur la rivière Saint-Jean, et fonder la ville de Saint-Augustin, la plus ancienne des cités américaines, le premier établissement permanent créé aux États-Unis. En 1516, Solis, dans un second voyage sur la côte du Brésil, pénètre le premier dans le Rio-de-la-Plata. Quatre ans après, en 1520, Magellan reconnaît le même fleuve, la Patagonie, et entre dans le grand Océan par le détroit qui porte son nom. En 1519, Cortez, parti de Cuba, se dirige vers le Mexique, découvert l’année précédente par Juan de Grijalva. En trois années, il soumet ce puissant empire, et parvient, en personne, d’un côté, sur les bords de la mer de Californie, à l’ouest, et de l’autre, en 1524, jusque dans le Honduras, à l’est. Par ses ordres, toute la côte du golfe du Mexique, depuis le Darien jusqu’à la Floride, est explorée par Christophe de Olide et d’autres capitaines ; la côte opposée, sur le grand Océan, est reconnue depuis le port de San-Miguel jusqu’à Colima. En même temps, Pedro de Alvarado conquiert le royaume de Guatemala ; Gonzalez Davila et Andrès Nino parcourent celui de Nicaragua, et reconnaissent le grand lac de ce nom, ainsi que sa jonction avec la mer des Antilles ; enfin, d’autres capitaines poussent au nord leur reconnaissance jusque dans le pays composant la Nouvelle-Galice. C’est à cette époque que se rattache le voyage de Gomez, qui, la même année, toucha à Terre-Neuve, et reconnut la côte du sud jusqu’au 40".

En 1525, François Pizarre envahit le Pérou, et en fait la conquête en 1531. En 1533, toute la région comprise entre Quito et Cusco avait été explorée, et en grande partie soumise. En 1535, Almagro découvre le Chili, et s’avance jusqu’à Coquimbo, tandis que Benalcazar, au nord, pénètre jusqu’aux bords de la mer des Antilles en traversant toute la Nouvelle-Grenade, que Quesada attaquait en même temps du côté opposé. En 1538, Pizarre, pour occuper les chefs placés sous ses ordres, les envoie dans diverses régions, et l’intérieur du continent qui s’étend à l’est des Andes ne tarde pas à être connu ; le haut Pérou est exploré à son tour jusqu’aux frontières du Grand-Chaco. Au nord, Gonzalès Pizarre, parti de Quito à la recherche de la province de Canela, arrive sur les bords du Napo, et est abandonné par Orellana, qui, continuant de suivre la même rivière, atteint l’Amazone, et descend ce fleuve jusqu’à son embouchure. Quelques années auparavant, en 1535, l’Orénoque avait été reconnu par Geronimo de Ortal, qui l’avait remonté jusqu’à l’embouchure du Meta. La rivière de la Plata n’était pas restée dans l’oubli : en 1535, Mendoza fonde sur sa rive droite la ville de Buenos-Ayres ; en même temps, Ayolas et Irala remontent le Parana, pénètrent dans le Rio-Paraguay jusqu’à la lagune Xarayes, et fondent sur ses bords la ville de l’Assomption. De leur côté, les Portugais posent les fondements de leur puissance au Brésil ; enfin, en 1542, Juan Rodriguez Cabrillo parvient au cap Mendocino par 37° 10′ lat. N., où il périt, laissant à son frère Barthélemy Ferrelo le soin de continuer l’expédition jusqu’au 45°, et de découvrir le cap Blanc.

Français. Vers la fin de 1523, François Ier chargea le Florentin Jean Verrazani d’explorer la côte nord américaine. Après une orageuse traversée de cinquante jours, Verrazani arriva près de Wilmington (Caroline du Nord). Il n’y trouva aucun havre favorable, malgré des recherches poussées à 150 milles au sud. En revenant vers le nord, il s’avança jusqu’à la Nouvelle-Écosse, et s’arrêta quelque temps dans les havres de New-York et de Newport, décrits l’un et l’autre dans la narration de son voyage. Jacques Cartier, envoyé encore par François Ier en 1533, découvrit le Saint—Laurent, et donna aux contrées arrosées par ce fleuve le nom de la Nouvelle-France, après y avoir fondé la première colonie que la France ait possédée en Amérique. En 1558, les Français s’établissent dans la baie de Rio-Janeiro, sous le commandement de Villegagnon ; mais les querelles intestines empêchent bientôt la colonie de se maintenir sur ce point important. Après la tentative de colonisation catholique de Villegagnon vient, en 1562, la tentative faite par les réformés français, d’après les avis de Coligny. L’un d’eux, Jean Ribault, muni d’une charte libérale octroyée par Charles IX, traverse l’Océan avec quelques coreligionnaires, et s’établit à Port-Royal, dans la Caroline du Sud. C’est en l’honneur de Charles IX que Jean Ribault appela ce pays la Caroline. Cette colonie ne vécut guère plus longtemps que celle de Villegagnon ; quelques-uns des réformés allèrent s’établir sur les bords du fleuve Saint-Jean en Floride. Ils y virent bientôt leur établissement naissant détruit par les Espagnols, qui massacrèrent les colons eux-mêmes. Quelque temps auparavant, nous posions solidement les bases de notre puissance au Canada, et, de 1635 à 1641, nous nous établissions à la Guadeloupe, à la Martinique, à la Tortue et à Saint-Domingue. En outre, c’est un Français, le navigateur Samuel Champlain, qui fut le premier homme blanc dont le pied foula le sol de New-York, aujourd’hui métropole du nouveau monde. Champlain découvrit dans l’État de New-York le lac qui porte son nom, et sur les rives duquel il livra bataille à une bande de Mohawks, qu’il défit, allumant ainsi contre les Français la haine vivace de la puissante confédération des six nations, haine à laquelle nous devrons plus tard la perte du Canada.

Anglais. Les Anglais, qui se trouvent en quelque sorte enserrés dans leur Île, et auxquels il est à peu près impossible de s’agrandir en Europe, devaient mettre merveilleusement à profit la découverte de Christophe Colomb. En 1497, le Vénitien Jean Cabot partit de Bristol, envoyé par Henri VII. Il découvrit au nord-ouest une terre qu’il longea pendant une distance de 400 lieues, abordant sur divers points pour en prendre possession au nom de l’Angleterre, Un an plus tard, son fils, Sébastien Cabot, parcourait la côte des États-Unis jusqu’à la baie de la Chesapeake, dans laquelle il pénétra. Ces deux expéditions sont les seuls titres que l’Angleterre devait invoquer un siècle plus tard, pour revendiquer la propriété de ce qui composa dans la suite les treize colonies. En 1585, Raleigh tentait de s’établir sur l’île Roanoke, dans la Caroline du Nord ; et dès 1606, Jacques Ier divisait en deux parties le territoire américain réclamé par l’Angleterre, et qui s’étendait du cap Fear à Terre-Neuve. La politique anglaise, et surtout le traité de Paris de 1763, ajoutèrent bientôt à ces possessions, déjà si considérables, les Bermudes, Nassau, la Guyane et les Antilles anglaises.

Hollandais, Suédois, Danois, Russes, Jésuites. Le 6 septembre 1609, un marin anglais, Henri Hudson, engagé au service de la compagnie hollandaise des Indes orientales, entra dans la baie de New-York, et remonta, jusqu’à Albany, le fleuve qui porte aujourd’hui son nom. Les Hollandais réclamèrent ce pays et y envoyèrent, en 1623, quelques familles pour en prendre possession. Ce ne fut qu’en 1664 que, les Anglais s’étant emparés de la Nouvelle-Amsterdam, aujourd’hui New-York, la domination hollandaise s’évanouit dans l’Amérique du Nord, et ne conserva qu’une partie de la Guyane dans l’Amérique méridionale. Les Suédois s’étaient établis depuis 1638 sur les deux rives de la Delaware, et principalement dans la Pensylvanie, qu’ils avaient nommée Nouvelle-Suède. Leurs voisins, les Hollandais des bords de l’Hudson, les chassèrent en 1655, Enfin, vers 1530, les jésuites jetaient au Para-