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La Villa des Ancolies

ges, encore un peu nébuleuses de sommeil, je réfléchis à votre histoire et cherche une solution.

— Vraiment ?

— Eh oui ! marraine ingrate, depuis une longue heure que je réfléchis. Une heure de réflexion bien concentrée, vous imaginez-vous ce que cela représente d’efforts, surtout à jeun.

— Pauvre petite.

— Faut-il vous aimer, marraine de mon cœur, pour s’imposer une pareille tâche ! J’ai soupesé les torts de votre Fidèle, les menaces qui vous sont faites, les conseils de votre avocat et de vos amis, la petite influence que je puis avoir sur la personne de l’avocat de votre adversaire et quantité d’autres considérations qu’il me serait trop long d’énumérer. Bref, la conclusion est que votre affaire n’est pas sans issue.

— Alors, tu vas m’aider ?

— N’allons pas si vite, marraine impatiente, procédons avec ordre comme dit Monsieur Beauparlant, cadet, quand il veut se donner de l’importance devant une belle cliente. Trois solutions se présentent. Primo : régler, payer ou, encore, faire tuer votre chien, en un mot, capituler. Solution ignominieuse et inacceptable. Secundo : Plaider et gagner comme vous l’a conseillé votre avocat et, étant lui-même avocat et « maistre es-chicanes », c’est tout ce qu’il pouvait vous offrir de plus acceptable. Solution à adopter en dernier ressort, offrant ses ennuis et ses tracas. Tertio : ne pas plaider, ne pas régler, laisser vivre ce brave Fidèle et amener votre adversaire et son avocat à vous demander grâce. Solution glorieuse, victoire éclatante de l’esprit féminin sur l’orgueil de l’homme ; mais victoire qu’aucun avocat, fut-il Monsieur le Bâtonnier lui-même ou encore le défunt Cicéron ressuscité, ne pourrait vous gagner et que seule, votre petite bonne femme de