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J’ai vu vos profondeurs, et vous fûtes mon maître :
Tous mes doutes fuyaient quand vous aviez parlé.

Dieu vous donna le sens des clartés éternelles ;
Jamais, idée ou fait, vous ne jugiez en vain ;
Tandis que nous errions dans les choses mortelles,
Vos yeux, à travers tout, allaient droit au divin.

De la sphère idéale où vous viviez d’avance
Pour moi vous revenez ; et, comme aux anciens jours,
Vous m’en communiquez aujourd’hui la science ;
Vous rallumez ma foi du feu de vos discours.

Et longtemps nous restons assis près des fontaines ;
Nous allons sur la mousse et le gazon nouveau,
Méditant de savoir, dans les luttes humaines,
Réaliser le bien et contempler le beau.

Mais trop tôt, étouffant la voix dont je m’enivre,
Un bruit d’homme s’élève, et nous a séparés,
Moi pour aller mourir, et vous pour aller vivre
Dans ces mondes d’amour au sage préparés.


III

Je le sais, votre part, sans doute, est la meilleure ;
Mon esprit dort encor, le vôtre eut son réveil ;
Cette vie est mauvaise… et pourtant je vous pleure,
Vous qui ne verrez plus les fleurs ni le soleil !

Grande âme à ses amours avant l’heure arrachée,
Onde pour nous tarie avant les jours d’été,
Fort ouvrier laissant l’œuvre à peine ébauchée,
Harmonieux oiseau mort sans avoir chanté !

Peut-être en te pleurant je gémis sur moi-même,
Resté seul dans la lutte où tu viens d’expirer ;