Page:Laprade - Psyché, 1857.djvu/315

Cette page n’a pas encore été corrigée

Amis, qu’en nos banquets les ivresses soient telles
Qu’Elvire ou Béatrix pourraient nous les verser.

Venez ! la table est prête où l’amitié s’épanche ;
De verdoyants rameaux parons la nappe blanche,
C’est l’autel de la joie et du rire innocent ;
C’est là, dans l’abandon des longues causeries,
Qu’entre les luths d’ébène et les coupes fleuries
Le feu sacré nous touche et que l’esprit descend.

O vin ! source d’amour, nous dirons tes louanges !
Nous sommes ouvriers pour les grandes vendanges,
Nous conduisons la bêche autour des ceps divins ;
Prends-nous à ta journée, ô ma France féconde !
Toi qui, pour le salut ou la gaîté du monde,
Fais couler tour à tour ton sang et tes bons vins.

A l’œuvre, tous à l’œuvre et préparons la fête,
Bras d’acier du soldat, bouche d’or du poëte.
A l’œuvre les marteaux, les socs, les avirons !
De froment et de miel que les pains se pétrissent ;
Et vous, sculpteurs, à qui les métaux obéissent,
Ciselez dans l’or pur la coupe où nous boirons.

Gravez sur ses contours les exploits de l’épée ;
Des géants paternels chantez-nous l’épopée.
Dites leur sang versé, leurs travaux, leurs douleurs ;
Tracez-nous le tableau de l’héroïsme antique ;
Faites-nous voir, aux flancs de l’urne pacifique,
L’âge des grands combats déroulés sous des fleurs.

A ceux donc qui sont morts, soldats ou capitaines,
Pour un bonheur promis à des races lointaines,
Ce calice doit rendre un hommage éternel ;
Qu’il fasse, amis, le tour de la cité des hommes,
Et qu’enchaînés de cœur, comme ici nous le sommes,
Tous boivent à la ronde un nectar fraternel !