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Lui-même a teint la grappe avec son doigt vermeil ;
Au feu de ses rayons toute ombre s’évapore ;
Le vin, c’est sa lumière et sa chaleur ; l’amphore
Cache en ses flancs obscurs des gouttes de soleil.

Toi, par qui, d’une lèvre où le rire étincelle,
La chanson radieuse à plus grands flots ruisselle ;
Toi, dont ma coupe pleine atteste le pouvoir,
Je t’ai vu, le carquois sonnant sur tes épaules,
Descendre, ô dieu joyeux, sur nos coteaux des Gaules,
Et tes cheveux flotter, et les rubis pleuvoir !

Comme sous le baiser frémit un sein d’amante,
Sous tes yeux printaniers la terre au loin fermente ;
Les féconds éléments s’y combinent entre eux ;
La flamme du silex, les pleurs de la rosée
Se mêlent dans le cep ; et la sève embrasée
A gonflé les bourgeons d’un esprit généreux.

Bientôt la jeune vigne au vieil orme s’enlace ;
Le pampre offre aux amours, sous son ombre, une place,
Près du Faune enivré la Nymphe y vient le soir ;
L’été voluptueux brunit l’ardente grappe ;
Puis, buvant à deux mains le doux sang qui s’échappe,
L’automne au front pourpré danse autour du pressoir.

Nous, maintenant, tirons du sommeil et des ombres
Ce soleil enfoui, trésor pour les jours sombres,
Sève de feu qui vient réchauffer nos hivers.
Dans le cœur le plus morne, à briller toute prête,
Peut-être, avec ce vin, d’une veine secrète,
La gaîté va jaillir, sur l’heure, et les beaux vers.

Partout où la sema la nature en largesse,
Cueillons la joie, amis, germe de la sagesse ;
D’une fleur au jardin et d’une étoile aux deux,