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Si jamais une vierge aux allures hautaines
Du beau sceptre de l’art ne vint douer Athènes ;
Si devant toi jamais ils n’ont paru tous deux,
Aux confins du réel agrandis à tes yeux,
Lui, flamboyant d’éclairs que sa droite balance,
Elle, portant l’égide et le casque et la lance ;
Pourquoi ne peut-on voir ton Zeus et ta Pallas,
Sans tomber à genoux, ô divin Phidias ?

Vous, que nul dieu n’ira visiter dans vos veilles,
Mortels pour qui l’Olympe a perdu ses merveilles,
Dans l’atmosphère humaine en vain vous glanerez
Pour unir en faisceau des rayons séparés ;
Les éléments du beau, réunis par contrainte,
Manqueront sous vos doigts de la céleste empreinte ;
Peut-être atteindrez-vous un fini glacial,
Mais jamais la beauté, mais jamais l’idéal !


LE CHŒUR.


Une voix chante, ô Mer ! et gronde sous tes lames,
Une flamme en jaillit, le soir, au choc des rames.
Un caprice inconnu règne au fond de tes eaux,
Tu berces tour à tour ou brises les vaisseaux ;
Ton immense regard s’assombrit ou s’éclaire,
On dirait que tu sens l’amour et la colère.
La Terre et toi luttez ; tu bats son vieux rempart ;
Vous avez toutes deux votre existence à part.
Sous tes grands bras d’athlète ou tes beaux seins de femme,
Corps mobile et sans borne, oh ! n’as-tu pas une âme ?
Mille esclaves, ô Mer ! peuplent tes flots sacrés,
En toi la vie abonde à ses mille degrés,
Et comme chez un roi, dans tes profonds domaines,
Des trésors inouïs bravent les mains humaines.