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Mêle ainsi dans son corps, peint suivant le vieux rite,
Ce qui vit ou végète avec ce qui gravite.
Autour, l’herbe est épaisse et les bois sont touffus ;
Les grands valions sont pleins de murmures confus.
Là, taureaux et brebis, loups, hydres, sphinx énormes,
Hommes de divers sang, monstres de toutes formes,
Dans l’herbe, dans les blés, dans les marais épars,
Semblent depuis mille ans paître sous ses regards.
Au loin la mer blanchit sous les pas de la houle.
Au-dessus, dans l’éther, comme un sable qui roule,
Des milliers d’astres d’or luisent sur chaque lieu
Du cercle universel dont Pan est le milieu.
Lui, qui fait obéir cet empire à sa flûte,
Des éléments discords apaise ainsi la lutte.
Roi fort et pacifique, harmonieux pasteur,
Modérant la vitesse et pressant la lenteur,
Donnant le ton aux voix de l’homme, aux bruits champêtres,
Il conduit en chantant le grand troupeau des êtres.
Les hommes admiraient ces tableaux merveilleux ;
Et tandis qu’à genoux ils priaient tous ces dieux,
Grave et haute, une voix — on eût dit l’antre même —
Se mit à proférer renseignement suprême.
Ce qu’elle remua p"ombres et de clarté,
De terreurs ou d’espoir, nul ne l’a raconté ;
Mais tant qu’elle parla, ces mortels pleins d’audace
Pâlirent en suant une sueur de glace.
Quelques fantômes vains s’effaçaient de leurs yeux :
Mais un jour effrayant creusait son vide en eux ;
Et devant sa lueur, qui chassait des chimères,
Ils voyaient s’éclipser bien des figures chères !

Quand l’oracle se tut, une invisible main
Frappa le vase ardent, qui se rompit soudain,