Impuissant sur sa vie et jouet de son sort,
L’homme n’évite pas, mais peut hâter sa mort.
Pourtant les dieux sont bons et le destin est juste ;
Et je demande à Zeus, à la déesse auguste,
Qu’ils écartent de toi l’opprobre et la douleur.
Chère enfant ! tu n’as pas mérité le malheur.
Ne l’inflige donc pas à ta sœur désarmée.
Va ! tu peux, si je meurs, vivre encore, être aimée :
Un époux, et des fils, et mille soins nouveaux,
Te rendront la douceur de nos jours les plus beaux.
Nos parents ne sont plus ; Zeus même et la déesse
Ne pourraient rendre, hélas ! un frère à ma tendresse.
J’ai commencé de vivre, enfant, bien avant toi ;
Avant toi je mourrai : c’est la commune loi.
Puissent les dieux du Styx, exauçant ma prière,
M’accorder la faveur de partir la première !
Ton cœur, ô noble Ismène, est trop prompt à souffrir ;
Pour s’en aller combattre, on ne va pas mourir.