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HARMODIUS.

Va ! que le coup tenté soit heureux ou néfaste,
Ton nom restera pur comme ton âme est chaste,
Ismène ! Et l’on saura que j’avais dans le cœur
Un autre amour encor que l’amour de ma sœur ;
Qu’en punissant de mort des paroles hautaines,
J’étais moins ton vengeur que le vengeur d’Athènes ;
Que je revendiquais les droits de ma cité,
Et qu’enfin, si je meurs, c’est pour la liberté.


ARISTOGITON.

Ami, je m’associe à ta double vengeance,
Avec tous tes amours je suis d’intelligence,
Et je mourrais heureux de servir à la fois
La sœur d’Harmodius, la patrie et les lois.


ISMÈNE.

Ah ! maudits soient mes pleurs et ma lâche colère !
L’injure semblait faite à ma race, à mon père…
Mais j’aurais honte, ici, quand le sang peut couler,
Si je ne sentais pas tout dépit s’envoler.
Par la sainte pitié, par l’amour qui nous lie,
Oubliez cette offense, ainsi que je l’oublie.
Si cet homme est cruel, s’il règne injustement,
Laissons à Némésis le soin du châtiment,
Frère ! et n’aiguise pas ton courroux et tes armes
Pour un ennui qui vaut à peine quelques larmes.


HARMODIUS.

Aux hommes seuls, ma sœur, il doit appartenir