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De toute chose, enfin, ou divine, ou mortelle…
De ce cristal bleuâtre où rougit le vin vieux !

À table ! avant d’ouvrir la solennelle amphore,
Que d’habits éclatants l’amitié se décore ;
Dans le plaisir des yeux naît le charme du cœur.
Le vin vaut mieux quand l’urne est de fleurs couronnée
Qu’en nos festins, surtout, daigne la Muse ornée
Des plus aimables dieux nous amener le chœur.

À nos graves discours que le rire entrecoupe,
Qu’Aphrodite et Pallas vident la même coupe ;
Le sage admet aussi des amours enjouées.
Amenons au banquet, charmantes entre mille,
Daphné, Glycère aux yeux d’émeraude, et Camille,
Mais que leurs noirs cheveux restent toujours noués.

Glycère chantera quelque folle élégie ;
Du toit joyeux, pourtant, chassons bien loin l’orgie,
Poètes ! nous avons la Ménade en horreur.
Des soupers effrénés les Muses sont absentes ;
Amis, ne faisons pas fuir les Grâces décentes !
Car, après sa gaité, le vin a sa fureur.

Dans l’excès de la coupe où nous trouvons la verve,
L’esprit s’appesantit, le corps même s’énerve ;
Un stupide sommeil gonfle la lèvre en feu.
Des hautes voluptés, nous que la soif altère,
Fils de la Muse, au vin rendons un culte austère,
Buvons-le chastement sous le regard d’un dieu.

Le poète aime mieux l’extase que l’ivresse ;
Un sévère échanson à sa table se dresse,