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Mais il donne sans perdre, et de sa propre essence
Tire éternellement les rayons qu’il nous lance ;
Ce n’est pas un flambeau prêt à s’évaporer ;
Il n’a rien de mortel, et je puis l’adorer !
Non, ce torrent de vie animant tout l’espace,
Ce n’est pas dans l’azur un globe en feu qui passe ;
Sa lumière qui luit et qui crée en tout lieu,
C’est ton regard lui-même et ton verbe, ô mon Dieu !

« Répands, répands, ô toi par qui le printemps règne !
Cet or fluide et tiède où la terre se baigne,
Dont tout être vivant s’imprègne et se nourrit ;
Enveloppe-nous tous, ô radieux esprit !
C’est ton heure, ô soleil ! les plantes et les âmes
S’ouvrent de toutes parts pour absorber tes flammes ;
Toute écorce est gonflée et toute sève bout ;
Mêlée à tes rayons, la vie entre partout.
Ô vie ! ô douce vie ! oh ! qu’il est heureux d’être
Quand de ses longs baisers le soleil nous pénètre !
Au sein des prés fumants, sous cet azur serein,
Des choses qu’il est doux d’aspirer le trop plein,
Et ce double courant d’haleine ardente et pure
Qu’avec le Créateur échange la nature !
Souffle amoureux, parfums de la terre exhalés,
Passez en moi, mon cœur s’élance où vous allez !
Chaste fluidité de l’eau qui s’évapore,
Frémissement de l’air et du rameau sonore,
Embrasement des pics par la neige blanchis,
Rayonnement des flots dans mes yeux réfléchis,
Âme avec qui je sens mon âme correspondre,
Nature, viens à moi t’unir et te confondre !
Je te dois, ô désert chaque jour visité,