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Dont s’abreuve, ignorant toute crainte insensée,
La paisible nature aux bras de Dieu bercée.

Pour toi, la terre parle et tu comprends chacun
De ses signes profonds, bruit, couleur ou parfum.
Tu sais lire, au milieu des spectacles champêtres,
Ce langage sacré dont les mots sont les êtres,
Ce merveilleux symbole à notre âge voilé ;
Et c’est l’amour tout seul qui te l’a révélé !

Aussi, pour vous chérir oiseaux et fleurs s’unissent ;
À votre voix, les eaux et les vents obéissent :
Car, avec la pensée, hôte encore inconnu,
Dans votre corps nouveau, Dieu lui-même est venu ;
Et pourtant, Hermia, dans l’âme d’une femme,
Des cygnes et des lis vous avez gardé l’âme !

Les oiseaux ses amis et les forêts ses sœurs
Ont tous de sa puissance éprouvé les douceurs.
Près des grands feux assis, les pasteurs dans leurs veilles,
En secouant le front, parlent de ses merveilles.

Sur la bruyère, un soir, dans les genévriers,
Pensive, elle écoutait les airs des chevriers.
Enivrés de bourgeons et de sève nouvelle,
Ses folâtres chevreaux bondissaient autour d’elle,
Se cherchaient, se fuyaient, l’un par l’autre assaillis,
De grâce et de fierté luttaient dans les taillis ;
Quand d’un bouquet de chêne heurté dans cette lutte
Tombe un nid qu’une branche entraîne dans sa chute,
Et la mère accourant l’abritait de son corps,