Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/230

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Des mutuels instincts cet accord merveilleux,
Le babil des oiseaux et ses propres réponses,
Les nids faits, sous ses yeux, dans les blés ou les ronces,
Les sources et les fleurs devinant ses désirs,
C’étaient là d’Hermia l’enfance et ses plaisirs.

Pour les bois, de ses sœurs elle fuyait les rondes,
Et ces groupes joyeux de jeunes têtes blondes
Qui se roulent dans l’herbe, au pied des grands noyers,
Et de leurs cris, le soir, égayent les foyers ;
Préférant pour amis, dans son humeur sauvage,
Les hôtes du désert aux enfants du village.
De l’arracher une heure à sa chère forêt,
Les baisers de sa mère eurent seuls le secret.

Pour être ainsi rebelle aux amitiés humaines,
Et régner dans les bois comme en ses vrais domaines,
Dans le sein d’une femme avant d’être enfermé,
De quels esprits divins le sien fut-il formé ?
S’était-il exhalé du souffle des fontaines ?
Avait-il voyagé dans les eaux souterraines,
Dans les grottes en prisme amassé les cristaux,
Condensé les vapeurs des liquides métaux ?
Sous l’écorce avait-il circulé dans la sève
Que la lune à son gré fait descendre ou soulève,
Et connu le bonheur des bourgeons entr’ouverts,
Et l’éveil du printemps, et, dans les noirs hivers,
Ces rêves dont la terre, en ses veines plus lentes,
Dans un tiède sommeil berce l’âme des plantes ?
Fleur offrant son calice à la soif de l’été,
Sous un rayon avide avait-il palpité ?
En poussière enlevée à l’or des étamines,