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Suis l’instinct qui t’invite à sortir de toi-même,
Si tu veux croître en force, en sagesse, en beauté ;
Vois le saint univers qui t’appelle et qui t’aime :
Cherche en lui ce qui manque à ta divinité.

Monte sur les sommets, fouille dans les cavernes ;
Aux astres, aux volcans, allume tes flambeaux ;
Agrandis chaque jour l’empire où tu gouvernes ;
De ton sceptre brisé réunis les lambeaux.

Dompte les éléments et rends-les tributaires ;
Mets aux chaînes Protée ; emploie à tes desseins
La nymphe des glaciers et l’esprit des cratères ;
Multiplie, ô Titan ! tes sublimes larcins.

Du vol de la pensée aide tes bras trop frêles ;
La volonté des monts sait courber les sommets ;
Fatigue tour à tour ou tes pieds ou tes ailes,
Et rampe, s’il le faut, mais ne t’assieds jamais.

Lève-toi ! Dieu maudit les races accroupies
Des stagnantes cités respirant l’air mauvais ;
Le doute et le repos aujourd’hui sont impies :
Homme, sache trouver ce qu’enfant tu rêvais.

Marche seul, si ton frère en chemin t’abandonne
Et des désirs sacrés ne sent plus l’aiguillon.
Vois là-bas, au désert, ce champ que Dieu te donne :
Au sol de l’inconnu va creuser ton sillon.

Souffre et combats ; la lutte a des palmes certaines !
C’est trop peu d’en gémir, il faut dompter le mal ;