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Et des pas retentir, et des voix désolées
Se plaindre en chœur dans l’ombre ou gémir isolées.


LE CHŒUR.

Ah ! la terre est déserte et le ciel dépeuplé !
Quel est ce dieu secret dont l’oracle a parlé ?
Pourquoi s’enferme-t-il en des lieux invisibles ?
Les nôtres se montraient sous des formes sensibles,
Et les hommes ravis adoraient sans efforts
Les esprits immortels vêtus de ces beaux corps !
Mais toi, dieu solitaire au delà des nuages,
Qui saura pour l’autel nous tailler tes images,
De quelles fleurs te ceindre, et de quels traits t’armer ;
Et, si nul ne te voit, qui donc pourra t’aimer ?

Ô Grèce ! si ces dieux n’étaient rien que tes rêves !
Quel doigt sculpta si bien les contours de tes grèves ?
Est-ce pour y loger une ombre et de vains noms
Que tes fils ont bâti les sacrés Parthénons ?
Adore un dieu plus fort, si l’homme l’imagine,
Que ceux qui t’ont donné Platée et Salamine !
Pour l’immortel souper qu’attend Léonidas,
Trouve un autre Elysée ouvert à tes soldats !
Quand on aura brisé les images des temples,
De quels dieux nos héros suivront-ils les exemples ?
Les autels vont crouler, les vertus avec eux…
Ah ! s’il est temps encor, rendez-nous nos faux dieux !


UN STATUAIRE.

N’allez plus, ô nochers, pour des œuvres sans gloire,
Ravir à l’Orient son or et son ivoire !