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Donnant le ton aux voix de l’homme, aux bruits champêtres,
Il conduit en chantant le grand troupeau des êtres.

Les hommes admiraient ces tableaux merveilleux ;
Et, tandis qu’à genoux ils priaient tous ces dieux,
Grave et haute, une voix — on eût dit l’antre même —
Se mit à proférer l’enseignement suprême.
Ce qu’elle remua d’ombres et de clarté,
De terreurs ou d’espoir, nul ne l’a raconté ;
Mais tant qu’elle parla, ces mortels pleins d’audace
Pâlirent en suant une sueur de glace.
Quelques fantômes vains s’effaçaient de leurs yeux,
Mais un jour effrayant creusait son vide entre eux,
Et devant sa lueur, qui chassait des chimères,
Ils voyaient s’éclipser bien des figures chères !

Quand l’oracle se tut, une invisible main
Frappa le vase ardent, qui se rompit soudain,
Et de dieux en débris la terre fut couverte.
S’élançant à grands jets de sa prison ouverte,
La flamme inonde l’antre. Éblouis, aveuglés,
Par ces vives splendeurs sentant leurs yeux brûlés,
Regrettant l’ombre antique, et fuyant la lumière,
Les hommes à grands pas sortent du sanctuaire.



III



La grève d’Eleusis entendit des sanglots
Se mêler, tout le soir, au bruit calme des flots,