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L’aile ouverte et le col dans ses bras enlacé,
De deux guerriers jumeaux il rend Sparte féconde,
Par ce même baiser qui donne Hélène au monde.
Autre part, pour aimer et pour créer encor,
Sur une fleur captive il pleut en gouttes d’or.
Ailleurs son bras soutient, sans que leur poids l’entraîne,
L’effort de tous les dieux suspendus à sa chaîne.
Là, sa foudre aux Titans défend l’abord des cieux ;
Là, taureau, sur sa croupe il porte en des flots bleus,
Vers un monde à peupler dont elle sera mère,
Europe aux pieds d’argent que baise l’onde amère.
Ainsi, dans ses projets pour l’amour ou l’effroi,
Tout élément concourt à servir le dieu-roi.

Plus loin l’ardent Phœbus, le prince au triple empire,
Archer qui tient aussi les rênes et la lyre,
Devant qui meurt toute ombre et pâlit tout flambeau,
Apollon, le dieu seul, sans rival, le dieu beau,
Séchant sous ses traits d’or un limoneux refuge,
Perce l’impur Python, noir enfant du déluge.
Instruit par son oracle, un couple abandonné
Sème les cailloux vils dont un grand peuple est né.
Déjà, sous le regard de l’éternel poète,
L’univers réveillé prend des habits de fête,
Et les hommes groupés autour du dieu vainqueur
Pour la première fois savent chanter en chœur.
La lyre enlève aux monts et bâtit les murailles
Des villes qui germaient dans leurs fortes entrailles ;
Les sauvages tribus accourant à sa voix,
S’approchent en dansant au bord des sombres bois.
Tout fleurit sous tes pas ! Tu fais croître et transformes,
Ô dieu de l’harmonie ! ô roi des belles formes !