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LES NOCES.

 
Aveu d’un noble cœur préservé de tout mal
Et qui n’a pas trahi le serment baptismal,
Qui paya son tribut à l’humaine nature,
Sans faire aux grands devoirs même une ombre d’injure :
Et qui n’offre au Seigneur à pardonner en lui
Que l’héroïque orgueil dont il meurt aujourd’hui.

Dès que l’apôtre eut dit la formule adorable
Qui délie à jamais le bienheureux coupable,
Et qui le rend, au prix d’un sincère remord,
Assez pur pour le ciel et joyeux de la mort,
Il se leva tranquille et sûr de la victoire ;
D’une pieuse main prit l’auguste ciboire,
Et, de l’autre, il tira du vase de vermeil
Le pain des forts brillant aux rayons du soleil.

Tout le peuple, à genoux tombé sur la bruyère,
Formait autour du prêtre un cercle de prière ;
Tous les fronts prosternés, tremblants, silencieux,
S’abaissaient ; tous les cœurs se dressaient vers les deux.
Tout s’inclinait aussi dans l’immense nature :
Les feuilles des forêts n’osaient plus un murmure ;
Les vents évanouis n’effleuraient pas le sol ;
Les oiseaux arrêtaient leur musique et leur vol ;
Les seuls parfums, montant d’un essor invisible,
Remplissaient l’air au loin de leur hymne paisible ;
Tout l’univers enfin, du bois sombre au ciel bleu,
Semblait se recueillir dans l’amour de son Dieu.

Or, tenant de ses doigts l’éblouissante hostie,
Oubliant tout autour la foule anéantie,
En ces mots, le pasteur, tourné vers les sommets,