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C’est lui, dans tes splendeurs, qui m’apparaît ce soir,
C’est sa voix que j’entends sur ton glacier sublime.


II


Tu portes, ô mon âme ! un sommet tout pareil,
Un sommet virginal plus haut que tous nuages,
Et qui toujours reflète un peu du vrai soleil,
Quand ta plaine assombrie est en proie aux orages.

Tu n’as que trop, aussi, d’infimes régions.
Noirs marais dont chacun cache une hydre rampante ;
Chemins à tous venant où la fange serpente,
Et qu’en troupeaux impurs foulent les passions.

Oui, ta vallée ouverte est basse, humide, obscure,
Ô cœur par les désirs, par l’ennui fréquenté !
Mais vous savez, mon Dieu, si l’humaine souillure
Jusqu’au sacré sommet a jamais remonté.

Parfois une vapeur sort d’en bas et le cache :
Je ne vois plus briller sa neige à l’horizon ;
Mais elle reste vierge, ô divine raison !
Ta splendeur reluira sur ce glacier sans tache

Nul impur voyageur du pied ne l’a terni.
À l’homme inférieur par moments invisible