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Et, pour suivre un devoir librement accepté,
Entre eux et leur bonheur ont mis l’immensité.

Sous un ciel éclairé des lueurs du martyre,
Rosa, dans sa ferveur que la souffrance attire,
Aux autels opprimés s’enchaîne par un vœu,
Et vole, humble colombe, au secours de son Dieu.
Elle ouvre, à chaque pas, des prisons aux chaumières,
Des mains pleines d’aumône, un cœur plein de prières ;
De son âme héroïque arme ses faibles sœurs.
Ranime à ce foyer la foi des confesseurs ;
Aux soldats de son peuple offre, intrépide et calme,
Un glaive quelquefois et toujours une palme ;
Faisant aimer de tous son Dieu persécuté,
Jusque chez les bourreaux semant la vérité.
Ainsi, vers son calvaire elle a suivi, sans honte,
Le doux Crucifié qui sur la croix remonte,
Et, d’un cœur resté pur, elle épanche sur lui
Ses parfums prodigues pour la rançon d’autrui.

Et Konrad ? Fier soldat d’un drapeau qu’il relève,
Il sert le même Dieu, mais c’est avec le glaive.
Il veut payer encore une dette de sang
À son pays vaincu, mais toujours frémissant.
Depuis l’adieu cruel, tout prêt, malgré ses larmes,
Attendant le signal, et la main sur ses armes,
Il erra sur ces monts, dans cet heureux séjour
Abri de son exil, consacré par l’amour.
Maintenant, sous le casque et l’aigrette flottante,
Passant de la bataille aux rêves de la tente,
Chef austère, il berçait, dans le repos des soirs,
Ses tendres souvenirs avec ses grands espoirs.