Page:Lao-Tseu - Le livre de la voie et de la vertu - traduction Stanislas Julien, 1842.djvu/192

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vements violents et s’élancer sur la terre ; car il tomberait au pouvoir de l’homme et ne tarderait pas à périr. Mais (A) lorsque le poisson (que le pécheur avait pris) quitte l’élément dur (la terre) et qu’il possède l’élément mou (l’eau), personne ne peut plus se rendre maître de lui. De même, si un royaume peut conserver sa faiblesse (c’est-à-dire se montrer faible quoiqu’il soit puissant), il restera constamment en paix. Il ne doit pas se glorifier de sa puissance et de sa force (suivant E, l’expression « arme acérée du royaume » désigne la puissance, l’autorité), ni l’étaler aux yeux de tout l’empire. Autrement sa puissance s’épuiserait, sa force fléchirait, et il ne pourrait conserver ses états.


(5) Ordinairement les mots kho-i 可以 signifient « il peut, » et montrent que le verbe suivant est actif ; mais ici (voyez, à la fin de mon édition de Meng-tseu, Tractatus, etc. p. 67 et suiv.) il faut regarder le mot i (vulgo se servir) comme synonyme du mot tsiang (capere) en style moderne, lorsqu’il désigne l’accusatif, et construire comme s’il y avait : pou-kho-tsiang-houe-tchi-li-khi-chi-jin 不可將國之利器示人 « Il ne faut pas (littéralement) prenant l’arme acérée du royaume (la) montrer aux hommes, » c’est-à-dire il ne faut pas montrer aux hommes l’arme acérée du royaume.

Le commentateur Li-si-tchaï a adopté cette construction : koue-tchi-li-khi-i-pou-kho-chi-jin 國之利器不可示人 « L’arme acérée du royaume ne doit pas être montrée aux hommes ; » i-thseu-chi-jin 以此示人, comme s’il y avait tsiang-thseu-chi-jin 將此示人 (si capiens illud, ostendas hominibus, id est, si illud ostendas hominibus), si vous la montrez aux hommes, alors, etc. Cette construction se retrouve aussi dans B et plusieurs autres commentaires.