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la littérature pendant la révolution et l’empire.

de la Révolution. C’est donc ici qu’il faut rechercher de quelle façon l’étonnant développement de la presse en notre siècle a pu affecter la littérature. Je ne prétends pas juger le journalisme en lui-même. Je ne l’envisage que dans son rapport à mon sujet.

Il se peut que dans les matières d’ordre politique ou social, le journal soit l’expression de l’opinion publique : en littérature, comme en art, comme en fait de finances et dans toute matière trop spéciale pour qu’une opinion générale se forme spontanément, les journaux sont les guides de l’opinion, les porte-parole des écoles, les agents de la réclame esthétique ou commerciale. C’est par leur intermédiaire que les professionnels agissent sur le public. On a beau dire qu’il est impossible de persuader à un individu qu’il a du plaisir quand il n’en a pas : c’est possible ; mais il n’est pas du tout impossible de lui persuader qu’il faut avoir du plaisir, sous peine d’être un imbécile. Et il est très facile de lui persuader qu’il doit lire ce livre, voir cette pièce, de l’induire à connaître, et surtout à ignorer. Combien y a-t-il de gens qui, réellement, ne font pas dépendre leur plaisir ou leur désir de la mode : et la mode, à qui la demandent-ils ? à leur journal. Le journal est le véritable héritier de la puissance des salons, pour la direction du goût littéraire.

Voici un second et plus grave effet de la même cause : le journal périodique, quotidien surtout, a singulièrement développé la légèreté, la curiosité du public ; il l’entretient dans un état d’excitation, de fièvre ; en lui présentant toujours du nouveau, il le rend plus avide de nouveauté. Il tire constamment l’âme et l’esprit au dehors ; il ne laisse pas l’homme rentrer en lui-même, élaborer une lente et solide pensée. Il se lit vite, et il déshabitue des lectures qui exigent l’attention. C’est un fait que les subtils écrivains, les graves penseurs, sont illisibles dans un journal : les unes nous impatientent et les autres nous fatiguent. Mais le journal, dit-on, s’est adapté au public, voilà tout. Voilà tout, en effet, et qui ne

    CURE de France, M. de la Place (addition : pour le Mercure, mettez M. Lacombe, libraire, avec une société de Gens de lettres, au lieu de M. de la Place. Le même M. Lacombe fait l’Avant-Coureur). — Journal de Trévoux, MM. l’abbé Aubert et Castillon. — Journal de Verdun. M. Bonamy. — Journal économique, une société de Gens de lettres. — Petites Affiches de Paris, M. l’abbé Aubert. — Petites Affiches de province, M. de Querlon. — Année littéraire, M. Fréron. — Journal de médecine, M. Roux. — Journal encyclopédique, MM. Rousseau, Castillon, à Paris, et Castillon à Bouillon, les deux frères. — Journal du commerce. M. (N). — Gazette du commerce, M. (N). — Gazette comestible, M. (N). — Avant-Coureur. . de Lacombe. — Journal des dames, MM. Mathon de la Cour et Sautreau. — Journal ecclésiastique, M. l’abbé Dinouard. — Aucun de ces journaux n’était quotidien. La Gazette de France était hebdomadaire, le Mercure mensuel. — À consulter : E. Hatin, Histoire de la presse française, 1859-61, 8 vol. in-8 ; Bibliographie hist. et crit. de la pr. française, 1806, in-8.