Page:Lanson - Histoire de la littérature française, 1920.djvu/749

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LIVRE IV

LES TEMPÉRAMENTS ET LES IDÉES (SUITE)

CHAPITRE I

LA LUTTE PHILOSOPHIQUE

1. Les défenseurs de la tradition et du passé. Rollin. Daguesseau. Faiblesse de la résistance. Diffusion de l’esprit philosophique. Le marquis de Mirabeau. Vauvenargues. — 2. La grande bataille de la seconde moitié du siècle. L’Encyclopédie. — 3. Efforts individuels. D’Alembert, Marmontel, d’Holbach, Condillac, Turgot, Condorcet.

La lutte philosophique prend, dans la seconde moitié du xviiie siècle, une intensité, une âpreté soudaines. Vers 1750, les espérances d’une restauration rationnelle de la société, qu’on avait cru toucher, se reculent indéfiniment ; à ce même moment entre en scène une nouvelle génération de penseurs impatients, audacieux, dévoués à ce qu’ils appellent la vérité, et prêts à renverser tout ce qui y fait obstacle : l’art, l’éloquence, la littérature ne sont pour eux que des instruments de propagande. Ils vont faire de la philosophie la matière de tous les livres, la préoccupation de tous les esprits. Diderot, Rousseau, Condillac, Buffon paraissent ; Voltaire, un Voltaire épanoui et libéré, revient de Prusse. Tous, directement ou indirectement, par de violentes attaques ou de sereines spéculations, concourent à jeter l’ancien édifice à bas.

1. FORCE ET DIFFUSION DE LA PHILOSOPHIE.

La défense est faible : on peut trouver aux philosophes bien des faiblesses, et leurs personnes comme leurs doctrines sont loin