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pas être central, il devait en résulter pour ces petits corps une rotation autour de leur axe et des mouvements latéraux, et nos connaissances actuelles en mécanique ne contredisent pas cette conclusion. Une fois admis, ces mouvements latéraux doivent nécessairement devenir de plus en plus compliqués et, comme les chocs successifs de nouveaux atomes sur une couche qui éprouve déjà le mouvement latéral, produisent sans cesse une force vive nouvelle, il est permis de croire que le mouvement s’opère avec une intensité progressive. Les mouvements latéraux, combinés avec la rotation des atomes, peuvent facilement amener des mouvements de rétrogradation. Si, dans une couche ainsi bouleversée, les atomes les plus lourds, c’est-à-dire les plus grands, conservent toujours un mouvement plus rapide dans la direction de haut en bas, il en résultera finalement qu’ils se trouveront dans la partie inférieure de la couche, tandis que les atomes les plus légers seront réunis dans la partie supérieure (22).

La base de toute cette théorie, l’idée de la chute plus rapide des grands atomes, fut attaquée par Aristote, et il semble que cela détermina Épicure, tout en conservant le reste de l’édifice philosophique de Démocrite, à imaginer, pour les atomes, ses déviations non motivées de la ligne droite. Aristote enseignait en effet que, s’il pouvait y avoir un espace vide, ce qui lui semblait impossible, tous les corps devaient y tomber avec une égale rapidité, les différences de vitesse dans la chute provenant de la différence de densité du milieu à traverser, l’eau ou l’air. Or, dans le vide, il n’y a aucune espèce de milieu ; par conséquent la chute des corps doit y être uniforme. Sur ce point, comme dans sa théorie de la gravitation vers le centre du monde, Aristote se trouvait parfaitement d’accord avec les résultats obtenus par la science moderne. Mais ses déductions ne sont qu’accidentellement rationnelles ; elles sont mêlées de subtilités tout à fait semblables à celles qui lui servent à prouver l’impossibilité d’un mouvement quelconque dans le