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tout du passage du Phédon (p. Steph. 97, C-99 D), où Socrate se plaint si amèrement de ce qu’Anaxagore n’avait fait, dans sa cosmogonie, aucun emploi de la raison, dont on pouvait tant espérer, mais avait tout expliqué par des causes matérielles.

40 [page 46]. La téléologie est avant tout d’origine morale. Il est vrai que la téléologie platonicienne est moins grossièrement anthropomorphique ; celle d’Aristote nous montre un progrès nouveau et important ; mais ces trois téléologies successives ont le même caractère moral et sont également incompatibles avec l’étude réelle de la nature. Pour Socrate, tout ce qui existe a été créé au profit de l’homme. Platon admet une finalité inhérente aux choses, une fin qui leur est propre. Aristote identifie la fin avec l’essence intelligible de la chose. De la sorte, tous les êtres de la nature sont doués d’une activité spontanée, inintelligible comme phénomène naturel mais ayant au contraire son type unique dans la conscience de l’homme qui forme et façonne la matière. Il y a encore beaucoup d’autres notions morales qu’Aristote a introduites dans l’étude de la nature au grand préjudice des progrès de cette étude : telles sont la classification de tous les êtres, l’hypothèse du haut et du bas, de la droite et de la gauche, du mouvement naturel et du mouvement violent, etc.

41 [page 53]. Il ne s’agit pas ici de l’anecdote plus ou moins apocryphe de Zopyre, ni d’autres semblables, d’après lesquelles Socrate, du moins dans sa jeunesse, aurait été irascible et libertin (voir Zeller, 2e édition, II, p. 54, où du reste les récits d’Aristoxène paraissent rejetés d’une façon un peu trop absolue) ; mais nous nous en tenons à ce que disent Platon et Xénophon, particulièrement aux détails fournis par le Banquet. Nous n’affirmons donc pas qu’à toutes les époques de sa vie, Socrate n’ait pas dompté son naturel passionné ; nous voulons seulement faire ressortir ici ce tempérament énergique, qui se transforma en zèle ardent pour l’apostolat de la morale.

42 [page 54]. Voir l’éloge d’Alcibiade dans le Banquet de Platon, particulièrement 215 D et E.

43 [page 54]. Cela ressort, en ce qui concerne Socrate, principalement de sa conversation avec Aristodème (Xén., Mem. I, 4) citée en détail par Lewes l, p. 285 et suiv.

44 [page 55]. Dès la note 2, il a été question de la théocratie, mélange et fusion de plusieurs dieux et cultes dans l’unité du culte delphique. Le trait apollinien du génie socratique a été mis en évidence tout récemment par Nietzsche, dans son écrit : Die Geburt der Tragœdie aus dem Geiste der Musik, Leipzig, 1872. Cette tendance se développe pendant des siècles, conjointement avec la conception platonicienne de l’univers, et triompha, mais trop tard pour que le paganisme pût être