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Paul-Henri-Thierry d’Holbach, riche baron allemand, né à Heidelsheim dans le Palatinat, en 1723, vint dès sa jeunesse à Paris et, comme Grimm, son compatriote et son ami intime, il se plia complètement au tempérament de la nation française. Si l’on considère l’influence que ces deux hommes exercèrent sur leur entourage, si on leur compare les personnages de la société gaie et spirituelle qui se réunissait d’ordinaire autour du foyer hospitalier de d’Holbach, on assignera sans peine et tout naturellement un rôle prépondérant à ces deux Allemands, dans les questions philosophiques discutées par les habitués de ce salon. Silencieux, tenaces et impassibles, il restent assis comme des pilotes sûrs d’eux-mêmes au milieu de ce tourbillon de talents déchaînés. Au rôle d’observateurs, ils joignent, chacun à sa manière, une influence profonde, d’autant plus irrésistible qu’elle est moins perceptible. D’Holbach en particulier ne semblait être que l’éternellement bon et généreux maître d’hôtel des philosophes ; chacun était ravi de sa bonne humeur et de son cœur excellent ; on admirait d’autant plus librement sa bienfaisance, ses vertus privées et sociales, sa modestie, sa bonhomie au sein de l’opulence, qu’il savait rendre pleine justice au talent de chacun, lui-même n’ayant d’autres prétentions que de se montrer aimable amphitryon. Or cette modestie précisément empêcha longtemps ses amis de regarder d’Holbach comme l’auteur d’un livre, qui mettait l’opinion publique en émoi. Même après que l’on eut bien constaté que l’ouvrage était sorti du cercle de ses intimes, on s’obstina encore à en attribuer la paternité, soit au mathématicien Lagrange, qui avait été précepteur dans la maison du baron, soit à Diderot, soit à la collaboration de plusieurs écrivains. C’est aujourd’hui un fait mis hors de doute que d’Holbach fut le véritable auteur, bien que plusieurs chapitres aient été élaborés par Lagrange, pour sa spécialité, par Diderot, le maître du style, et par Naigeon, aide littéraire de Diderot et de d’Holbach (82). Non seulement d’Holbach rédigea tout l’ouvrage, mais il en fut