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aussi bien pour le développement de l’opposition en général contre les dogmes de l’Église qu’en particulier pour l’extension des théories matérialistes. Lorsque, dans l’année 1680, le chancelier Kortholt publia à Kiel son livre De tribus impostoribus magnis, en profitant du titre trop célèbre d’un ouvrage fantastique pour en faire la contre-partie, il appela Herbert de Cherbury, Hobbes et Spinoza les trois grands ennemis de la vérité chrétienne (45). Nous trouvons donc dans cette triade deux Anglais, dont l’un, Hobbes, nous est suffisamment connu. Herbert, mort en 1642, est un des représentants les plus anciens et des plus influents de la « théologie naturelle » ou de la foi rationnelle en opposition avec la religion révélée. L’influence que Hobbes et Herbert exercèrent sur l’Allemagne nous est nettement démontrée dans le Compendium de impostura religionum, publié par Genthe, ouvrage qui ne peut appartenir au XVIe siècle (46). Ce livre est plutôt le produit d’une époque peu éloignée de celle où le chancelier Kortholt essayait d’user de représailles. Cette époque fut féconde en essais de ce genre, provenant la plupart de libres-penseurs et tombés dans l’oubli. Le chancelier Mosheim, mort en 1755, possédait, dit-on, sept manuscrits de ce genre, tous postérieurs à Descartes, à Spinoza, et par conséquent à Herbert et à Hobbes (47).

L’influence anglaise se décèle surtout dans un petit livre, qui appartient tout entier à l’histoire du matérialisme, et que nous allons citer d’autant plus volontiers avec quelques détails que les plus récents historiens de la littérature ne l’ont pas apprécié, peut-être même pas connu.

C’est la Correspondance sur l’essence de l’âme, qui fit tant de bruit à l’époque où elle parut (1713) et dont on publia une série d’éditions. Elle fut combattue dans des brochures et des articles de journaux. Un professeur d’Iéna fit même une leçon dans le but exclusif de réfuter cet opuscule (48). Il se compose de trois lettres, attribuées il deux correspondants ; un troisième a écrit une préface détaillée, et, dans l’édi-