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récompense de la vertu, c’est la vertu elle-même, qui rend l’homme heureux ; car la nature humaine ne peut posséder rien de plus sublime que la vertu ; elle seule donne la sécurité à l’homme et le préserve de toutes les agitations. Chez l’homme vertueux tout est en harmonie : il ne craint rien, il n’espère rien et reste toujours le même dans la prospérité comme dans l’infortune. » Le vicieux trouve sa punition dans son vice même. Aristote dit dans le septième livre de sa morale : « Chez l’homme vicieux tout est dérangé. Il ne se fie à personne ; il n’a de repos ni quand il veille ni quand il dort, et, torturé par les souffrances comme par les remords, il mène une vie si misérable qu’aucun sage, quelque pauvre et chétif qu’il soit, n’échangerait son sort contre la vie d’un tyran ou celle d’un grand souillé de vices. »

Les apparitions de fantômes sont, suivant Pomponace, ou des illusions des sens produites par une imagination exaltée ou des impostures des prêtres ; les possédés sont des malades (arguments 5 et 6) ; cependant, il reconnaît comme vraies quelques apparitions, tout en les attribuant à l’influence des bons et des mauvais génies ou à des effets astrologiques. La croyance à l’astrologie était décidément inséparable de la doctrine d’Averroès.

Enfin Pomponace s’élève énergiquement (8e argument) contre ceux qui affirment que les hommes vicieux et troublés par les remords ont coutume de nier l’immortalité, tandis que les hommes justes et bons l’admettent. Nous voyons au contraire, dit-il, beaucoup d’hommes corrompus croire à l’immortalité, tout en se laissant entraîner par leurs passions, tandis que beaucoup d’hommes vertueux et honorables ont regardé l’âme comme périssable. De ce nombre furent Homère. Simonide, Hippocrate, Galien, Alexandre d’Aphrodisias et les grands philosophes arabes. Enfin, ajoute-t-il, parmi nos compatriotes « ex nostratibus » Pline et Senèque (ici se décèle chez le scholastique l’esprit de la Renaissance !)