Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/261

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cha au commentateur Alexandre d’Aphrodisias. Au fond, dans cette querelle, il s’agissait de la théorie de l’âme et de l’immortalité, et les « alexandristes » étaient en général parfaitement d’accord avec l’école d’Averroès. Mais, dans la question de l’immortalité de l’âme, les « alexandristes » procédaient d’une manière plus radicale ; ils rejetaient le mono-psychisme et, d’après Aristote, ils déclaraient simplement que l’âme n’est pas immortelle, — sous la réserve ordinaire de la croyance de l’Église à cet égard.

Pomponace, dans son livre sur l’immortalité de l’âme, prend envers l’Église un ton très-respectueux ; il accorde de grands éloges à la réfutation de l’averroïsme par saint Thomas d’Aquin ; mais d’autant plus audacieuses sont les idées qu’il glisse dans sa critique personnelle de l’immortalité de l’âme. L’auteur procède d’une façon absolument scholastique, sans repousser le mauvais latin inséparable de la scholastique ; mais, dans son dernier chapitre (48), où il traite des « huit grands arguments en faveur de l’immortalité », il ne se contente plus de citer Aristote et de discuter ses idées, il déploie tout le scepticisme de l’époque et fait des allusions très-transparentes à la théorie des Trois imposteurs.

Pomponace regarde la mortalité de l’âme comme philosophiquement démontrée. Les huit grands arguments qu’il examine sont ceux que l’on emploie ordinairement en faveur de l’immortalité ; Pomponace les réfute, non plus d’après la méthode scholastique, attendu qu’ils ne sont pas revêtus de la forme scholastique, mais d’après le sens commun et à l’aide de considérations morales. Voici le quatrième argument : « Puisque toutes les religions (omnes leges) affirment l’immortalité de l’âme, le monde entier serait trompé, si l’âme mourait. » Voici maintenant la réponse : « On doit reconnaître que chacun est trompé par les religions ; mais il n’y a pas de mal en cela. Il existe trois lois : celles de Moïse, du Christ et de Mahomet. Or, ou bien toutes les trois sont