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individuel de certaines causes finales, une grande influence sur la direction et l’énergie du mouvement de l’esprit vers la vérité, nous ne devons pas oublier un seul instant que ce sont précisément les caprices de l’imagination, le point de vue mythologique qui ont entravé si longtemps et si puissamment le développement de la science et l’entravent encore aujourd’hui de tant de côtés. Dès que l’homme, libre de préjugés, commences examiner, avec netteté et précision, les faits particuliers, dès qu’il relie les résultats de ses observations à une théorie simple et solide, quoique parfois erronée, les progrès futurs de la science sont assurés. Ce procédé peut aisément se distinguer du procédé propre à l’imagination dans la découverte de certaines causes finales. Si ce dernier, comme nous l’avons indiqué, possède dans les circonstances favorables une haute valeur subjective, fondée sur ce qu’il facilite le jeu réciproque des facultés intellectuelles, on peut dire en revanche que le commencement de l’examen clair et méthodique des choses est, pour ainsi dire, le seul vrai commencement de la connaissance des choses. Cette méthode doit sa valeur à sa portée objective. Les choses exigent, en quelque sorte, qu’on les traite de cette façon, et la nature ne répond qu’à des questions bien formulées. Nous pouvons renvoyer ici aux origines de l’esprit scientifique chez les Grecs, c’est-à-dire au système de Démocrite et à l’action lumineuse qu’il a exercée autour de lui. Cette lumière éclaira la nation entière ; elle brilla de tout son éclat dans cette conception la plus simple, la plus sensée, que notre intelligence puisse se faire du monde matériel et qui résout l’univers, multicolore et changeant, en molécules inaltérables, mais mobiles. Bien que cette doctrine, d’ailleurs intimement liée au matérialisme d’Épicure, n’ait acquis sa complète importance que dans les temps modernes, elle n’en a pas moins exercé une grande influence dans l’antiquité, comme le premier modèle d’une théorie parfaitement nette de tous les changements. Platon lui-même a morcelé sa ma-