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plus profondément, et rendre leur accord plus difficile. Dans l’antiquité, et même chez les cartésiens, la philosophie traitait plus souvent la science en sujette qu’en alliée. Le jour devait venir où la dernière se sentirait assez forte pour s’affranchir de cette tutelle. Par une réaction naturelle, à la dépendance résignée avait succédé bientôt l’impatient antagonisme ; à la soumission d’autrefois, les prétentions du présent. Après avoir combattu pour l’affranchissement, la science n’hésitait plus, dans l’orgueil de ses succès, à lutter pour la domination. Il fallait ramener à la modération, la science exaltée par ses récents triomphes ; la décider à se contenter d’être l’alliée, après qu’elle avait espéré un moment d’être la souveraine de la philosophie. Telle est la tâche que se proposa Lange.

Pour y réussir, bien des qualités diverses et rares étaient nécessaires. Lange lui-même nous les énumère dans le portrait qu’il trace du véritable philosophe. Le penseur idéal doit « à une forte culture logique, préparée par un commerce sérieux et soutenu avec les règles de la logique formelle et avec les principes de toutes les sciences modernes, par un usage constant du calcul des probabilités et de la théorie de l’induction, joindre l’étude approfondie des diverses sciences positives, non moins que de l’histoire de la philosophie ». L’érudition solide et de première main qui s’accuse à chaque page du premier volume ; la connaissance étendue de tous les travaux de la science moderne, qui fait l’incomparable richesse du second ; les critiques pénétrantes du logicien, qui se mêlent dans tout le cours de l’ouvrage à l’exposition historique des systèmes ; enfin la logique posthume de Lange qui a été publiée l’an dernier : tout