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il ne nous restait presque plus rien. Il me semble qu’il devrait nous donner « une petite chance », comme on dit. N’est-il pas d’ailleurs assez riche pour nous attendre un peu ? Notre engagé ne nous a-t-il pas dit que M. Moore passait pour avoir quinze mille dollars en banque ?

— C’est vrai. Comme toi, Flore, je pense qu’il peut nous attendre sans se voir à la gène. Sais-tu, chère amie, que j’aurais bien du chagrin de perdre cette ferme, car j’ai confiance qu’elle nous apportera dans quelques années une belle aisance. Vois les fermiers du voisinage, ne sont-ils pas tous à l’aise ? Et M. Moore, en comptant le prix que nous lui payons pour sa terre, ne se trouve-t-il pas à la tête d’un capital de trente mille dollars ? Il a tout ce qu’il faut pour se faire de fort belles rentes pour le reste de ses jours.

— Oui, ce sont autant de raison pour qu’il nous soit possible de faire un arrangement avec lui.

J’ai déjà une idée. Je vais lui offrir de suite mille dollars. Puis je demanderai un délai jusqu’au printemps pour le deuxième mille, et pour le troisième mille un autre délai jusqu’à l’automne prochain. Il nous restera assez d’argent pour nous mener à notre deuxième récolte, si nous n’avons pas de malchance.

— Mais comment pourras-tu payer mile dollars au printemps ?

— J’emprunterai de la banque.

— Oui, mais nous aurons à payer l’automne prochain trois mille dollars au lieu de mille sans compter les intérêts.

— C’est vrai, mais n’oublie pas que notre deuxième récolte pourrait bien nous rapporter cinq mille dollars. Ce ne sera pour nous qu’une mauvaise année à traverser. En tous cas je ne vois pas d’autre moyen. En vois-tu un, toi ?