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pas tous à la fois sur telle autre localité, du moins sont-ils susceptibles de faire une apparition en tout temps de la saison d’été.

Cette année-là, heureusement, ce furent les seuls ennemis à redouter que les vers et la gelée. Le temps s’était remis au beau. Les grains avaient une nouvelle vigueur et le blé épiait.

Les pommes de terre aussi reprenaient vie, mais il ne faudrait pas compter sur leur abondance après le retard que la gelée leur avait occasionné. Hormis les tomates et concombres, tout le jardin potager avait retrouvé une vie nouvelle et il promettait le nécessaire. Mais la sécheresse aussi avait repris une vie nouvelle et non moins tenace que la première : il ne passa entre fin juin et commencement août qu’un fugitif orage. Tout de même les blés et les avoines avaient assez bonne mine. Placide Bernier, avec son manque d’expérience, s’imaginait que la récolte allait être abondante malgré tout : mais l’engagé hochait la tête avec doute et disait :

— Si vous retirez entre 15 et 18 minots à l’acre, ce sera beau. Je ne veux pas vous décourager, mais c’est ainsi.

Placide ne pouvait le croire. Pour faire un peu d’argent il avait dû tabler sur 30 minots à l’acre pour le blé.

N’importe, on verrait bien.

De temps à autre M. Moore venait faire la visite des champs. Lui aussi hochait la tête, disant :

— La récolte cette année ne sera pas bien payante, et pourvu qu’il ne survienne plus rien pour l’attaquer encore :

Disons ici que M. Moore ne s’était pas rendu en Angleterre comme il en avait manifesté l’intention ; il avait simplement passé un mois dans l’Ontario pour revenir ensuite à Tisdale. À son retour de l’Ontario il avait annoncé qu’il songeait à vendre sa terre pour s’en aller vivre le reste de ses jours