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— Mais tu le deviens… même que tu l’es déjà, bonne Flore de mon cœur !

Si elle l’était… fermière !

Voilà qu’elle « tirait » déjà les vaches… Matin et soir elle allait soigner les poules et levait les œufs, et des œufs si bons qu’on les mangeait à la douzaine. Et elle, Flore, à toutes ces petites besognes trouvait un plaisir sans nom. Un peu plus tard, elle allait s’occuper des couvées. Puis, quand serait venue la saison du jardinage, elle s’en donnerait à cœur-joie. Au reste, elle n’était pas étrangère à tous ces petits métiers, elle était fille de cultivateurs et elle en avait appris suffisamment pour se tirer d’affaire avec avantage.

Placide Bernier découvrait dans sa jeune épouse des qualités si précieuses et si rares chez la plupart des jeunes filles du siècle, qu’il s’en étonnait d’abord pour s’en réjouir ensuite et en complimenter sa compagne :

— Ma chère amie, disait-il, je suis bien content d’être tombé sur une petite femme comme toi. Vraiment, je me demande ce que j’aurais fait si j’étais venu seul en ce pays, ou si la malchance m’avait fait épouser une de ces demoiselles qui craignent toujours de se salir le bout des ongles. Mais avec une compagne comme toi, j’aime à te le dire, ma Flore, je suis sûr du succès et du bonheur.

Placide parlait avec vérité. Il avait une compagne « dépareillée », selon l’expression de nos bons vieux de Québec. Non seulement elle était bonne et vaillante, cette Flore, elle était aussi très jolie… Une petite blonde, mignonne et rieuse, habile et pleine de bonne volonté… Elle possédait trois trésors en surplus : la santé du corps, celle de l’âme et celle de l’esprit. Pour tout dire, la jeune femme possédait tout ce qu’il faut pour plaire et égayer, pour seconder son « homme » et réussir dans la dure entreprise qu’on