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UN CŒUR FIDÈLE

geais-tu là-bas ? As-tu rencontré de la misère ?

— Ah ! oui, à plein ! Tu sais que je suis parti avec deux autres, Joseph à Albert Blais et Baptiste Lemieux. On a fait un bout en char, mais l’argent a manqué, il a fallu aller à pied. Par là c’est pas comme ici : on héberge pas les passants. On couchait dans les granges, et on s’arrêtait dans les bois pour manger le pain et la viande qu’on prenait sur les planches des magasins. C’est effrayant, mais c’est vrai. On s’est rendu comme ça à la frontière des États, puis là on s’est engagé à un moulin de bois pour le flottage des billots. Deux jours après, Baptiste Lemieux est tombé à l’eau et a disparu pour toujours. J’ai donné la moitié de mon salaire pour le faire chercher,