Page:Lamontagne-Beauregard - Légendes gaspésiennes, 1927.djvu/73

Cette page a été validée par deux contributeurs.
77
LE BATEAU NOIR.

mes — ces blancs papillons de la mer — craignent de s’y poser, et jamais leurs ailes gracieuses n’effleurent un instant ces sinistres sommets…

Parfois, le soir, quand la tempête s’élève au loin, que le vent siffle et que la vague écume sur les récifs, les pêcheurs voient, du seuil de leurs maisonnettes perchées sur les hauteurs, les pêcheurs voient le fantôme de la morte, une grande femme toute vêtue de blanc, qui flotte sur les ondes… Elle vole au-dessus du rocher sinistre, plus légère que les nuages, plus blanche que la neige, plus belle que l’aube dans les splendeurs du matin… De sa main gracieuse et vengeresse elle fait descendre du ciel une éternelle malédiction sur le vaisseau-pirate changé en rocher… Elle flotte, blanche vision, sur l’immense horizon de la mer… Les uns disent l’entendre chanter, d’autres disent l’entendre pleurer…

Grondez, grondez, brises des mers ! Brises des mers, grondez !